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Vos recommandations...

JEUNESSE de Pierre NORA - Ed. Gallimard

Émetteur du florilège : François C.

Hendaye était le bout de l’exode, et le saut dans un autre monde… Après un moment d’hébétude – «Qu’est-ce qu’on va faire?»-, ce fut une explosion de joie ; on ne quitterait pas la France!

Ce jour-là, j’ai pris conscience de la tragédie qui se jouait.

(Shoah) Des hommes avaient fait cela à des hommes, à des femmes. Ces images sont entrées en moi comme des couteaux, et elles y sont restées pour toujours.

Je ne suis jamais allé à Auschwitz, non par indifférence mais par crainte de me laisser engloutir par ce trou noir ; je sentais que si j’y plongeais, je ne saurais pas en remonter.

Pour moi, le judaïsme est tout entier histoire. Ce n’est pas une religion, à la différence du christianisme ; ce n’est pas non plus une culture, à la différence de l’islam. C’est une histoire… Elle a abouti de nos jours, sous nos yeux, à deux phénomènes monstres: la première et la seule tentative d’extermination industrielle d’un peuple ; et la création au forceps d’un État-nation à la fois exaltant et, pour le meilleur comme pour le pire, sans équivalent.

Jusque-là, la mort paraissait cogner discrètement à la porte de son corps ; tout à coup ce fut l’inverse, elle était dans la place et c’était elle qui décidait des moments de répit qu’apportait la morphine.

Quelques pas plus loin, en montant la rue de Miromesnil, mon père croise une belle inconnue à l’étoile jaune, bouleversée. Leurs regards se rencontrèrent. Trente mètres plus loin, tous deux se retournent et, après un instant d’hésitation, courent l’un vers l’autre pour s’étreindre un long moment. Puis chacun repartit de son côté, sans avoir échangé un mot.

(Jean-François Revel) Ils ne peuvent s’imaginer le jeune homme truculent, à la voracité intellectuelle ravageuse, amoureux de la vie, nature boulimique habitée d’un formidable appétit de tout: d’idées, d’histoire, de poésie, d’amitié, mais aussi, hélas, déjà, de bonne chère et de bon vin dont il a abusé jusqu’à se ruiner sauvagement la santé.

J’étais soudain saisi de la profondeur du temps, de l’intérêt des longues durées, de l’apport de tant de savoirs positifs, loin du verbeux des lettres et de la philosophie.

Après des nuits d’insomnie et des jours de détresse, de jalousie, de remords, de mépris de moi-même, de sentiment d’échec sur tous les plans, j’ai trouvé en moi assez de raison -et de raisons- pour émerger d’un long tunnel.

Ernest Lavisse s’est révélé un homme-clé d’une époque-clé: l’artisan de la nouvelle Sorbonne, le fondateur du cursus agrégatif, le directeur de l’Histoire de France en vingt-sept volumes…

(Collection Archives) Chacun de ces livres a été au départ une aventure avec l’auteur, à qui cette formule paraissait attirante et provocatrice.

 

 

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Impact par Olivier Norek - Pocket (policier en poche

Émetteur du verbatim: François C.

I.                    GREENWAR

ImpactMort prématurée, saturnisme, cancer, troubles cardio-vasculaires, respiratoires, neurologiques. Ici, un gamin sur deux est malade. Du pétrole, du schiste, du gaz fossile, plus c’est sale, plus vous gagnez d’argent. Ce que nous semblons ignorer, c’est le conflit planétaire qui arrive. Qu’adviendra-t-il lorsque la moitié de la planète sera exsangue, privée d’eau, de nourriture, de lieux habitables ? Le pilote distingua alors, à moins d’un mètre de sa cabine, des millions de tonnes de détritus soulevés par les eaux. Bouteilles, bidons, pailles, morceaux épais et colorés de ce qui avait été des objets entiers, pneus, sacs de toutes tailles, le tout coagulé par une mélasse de microbilles plastiques, comme si un monstre poubelle avait pris vie dans cet océan et que sa bouche d’ordures s’ouvrait en grand pour avaler l’hélicoptère. La pollution de l’air dans le monde tue 600 000 enfants par an. Votre bébé a contacté une grave infection respiratoire. On assiste à une situation inédite où le criminel n’est presque pas mis en cause. Dans l’esprit du public, si PDG est libéré, c’est que Total l’aura décidé. Si PDG meurt, c’est aussi que Total l’aura décidé. La résistance violente intervient lorsque la résistance passive a abattu toutes ses cartes. La justice ? Face à l’argent elle n’existe pas. Le droit des hommes non plus. Dans la société comme dans la nature, la force, la puissance et le pouvoir sont les seules mesures du droit. Un bunker reste un bunker. On parle de survie et pas d’autre chose. Guerre globale, virus, effondrement climatique, vous pouvez même vous y protéger d’un hiver nucléaire. Mais entre la pollution, le réchauffement climatique, les catastrophes naturelles, les virus et les futurs mouvements migratoires massifs, il y a quand même assez peu de chances de sauver tout le monde. Les bien-nés sous l’étoile de l’opulence, aux parents magnats ou industriels, les enfants à particule d’un monde parallèle où de nobles Olympe et Hermine battaient des cils pour des Côme et des Ambroise.

II.                 ATOMIC

Souvent en entretien, Diane évoquait avec ses patients les moments charnières de leur vie. Ces choix qui changent tout. Ces moments à saisir qui font de vous ce que vous êtes. Vous le savez, la montée des eaux, les famines, l’absence d’eau potable, les inondations et les sécheresses provoqueront des déplacements massifs de population. Et les conflits qui les accompagneront ne feront qu’ajouter de l’horreur aux drames. La main d’œuvre la moins chère et la moins protégée de toutes, aux mains de multinationales accusées de torture, d’esclavagisme, de maltraitance et d’exploitation d’enfants pour un dollar par jour, dans des usines au bout du monde, hors de tout contrôle et de surveillance. Ces réfugiés, forcés de quitter leur pays à cause de catastrophes climatique provoquées par l’action collatérale des entreprises polluantes, se retrouveront ainsi dans les camps qu’elles auront fabriqués, sans autre choix que de travailler pour elles. Dans les guerres, la publicité et le marketing sont des armes aussi létales que les grenades. Gerda, en avocat chevronné, maître des coups fourrés et des surprises de dernière minute, entrevoyait déjà la stratégie mise en place par la Justice, et certainement pas par elle seule. Comme une punition divine, feu, terre et glace s’abattaient sur eux dans une même fureur. Fabien Attal se déplaçait mentalement dans toute l’architecture de sa défense, un plan en trois dimensions que lui seul pouvait voir dans sa totalité. Une construction complexe dont il connaissait chaque pièce, chaque coursive, chaque porte dérobée, et chaque fragilité. Nous survivons dans un monde de financiers où les 1% les plus riches détiennent deux fois plus que tout le reste de l’humanité, mais où 100% de la population subit leur pollution. Si Virgil Solal était suivi par des centaines de millions de personnes sur le web, ses soldats prêts à agir pour la cause constituaient une armée non moins impressionnante, mondiale, répartie dans toutes les classes sociales, les administrations, les services publics, des tours d’immeubles jusqu’aux fermes, des villes aux campagnes, des simples sympathisants jusqu’aux illuminés. En Angleterre, quelques disciples de Greenwar avaient réussi l’exploit d’une fragilisation immédiate de la Bourse grâce à la technique du « deepfake », permettant de faire dire n’importe quoi à n’importe qui en alliant intelligence artificielle et images d’archives. Certaines prières mettent vingt-cinq années à se réaliser. Elle lui sourit, tout en essayant de ne pas pleurer. Il sortit enfin de la cabine et pas à pas, l’un et l’autre se rapprochèrent. Je l’appellerai Moeava. Celle qui demeure dans les espaces infinis. Elle n’aura pas de frontières. J’ai rendez-vous avec elle. Ici. Dans quelques années. Et tu seras là, je l’ai rêvé. Virgil lui raconterait les erreurs des hommes pour qu’il les corrige. Il lui raconterait le monde et sa fragilité. Comme un vieux livre, il lui raconterait ce qui a disparu, et ce que l’on peut encore sauver.

QU’EST-CE QU’ON VA FAIRE DE TOI? - 21 métiers du futur à l’ère des robots et de l’intelligence artificielle de Nicolas HAZARD - Ed. Flammarion

Émetteur du verbatim: François C.

Introduction Le monde du travail va être bouleversé par la quatrième révolution industrielle, celle de l’Intelligence artificielle et de la robotique.

Première partie LA QUATRIÈME RÉVOLUTION INDUSTRIELLE VA TOUT BOULEVERSER

Rémi – Nanomédecin Il est fort probable que les diagnostics médicaux seront demain tous produits par des algorithmes, mais on aura toujours besoin de médecins pour le choix des traitements et la relation avec le patient, d’où la probable apparition à terme du métier de nanomédecin.

Marine – Cheffe cuisinière 3D Visée: utiliser cette technologie de l’impression 3D pour fabriquer des gâteaux, biscuits et desserts de toutes sortes : la pâtisserie numérique est née. Selon Marine, un robot peut ici servir d’assistant pour continuer à fabriquer des produits artisanaux, locaux et sans additifs. Il suffit d’insérer dans de petits cylindres, des seringues ou des bidons les produits dont on a besoin (chocolat, crème, garniture…) et l’imprimante confectionne les gâteaux et les fait cuire avec un terminal de cuisson attenant.

Renaud & Romain – Éducateurs de robots L’un des emplois du futur sera vraisemblablement celui d’éducateur de robots. Il maîtrisera à la fois les compétences techniques nécessaires pour la programmation des machines, mais aussi la capacité à les adapter aux attentes de leurs futurs utilisateurs.

Fanny – Psychologue de robots Le concept de Mon Sherpa est simple: à travers l’application téléchargeable gratuitement sur toutes les plateformes, on peut soit parler à un médecin en téléconsultation, soit échanger avec un chatbot (en complément généralement d’une visite psy).

Gaël – Data policier Le data-policier résoudra des problèmes complexes à partir d’une somme colossale de données de tout ordre qu’il sera allé chercher. Assisté par une IA, le data policier pourra démêler des affaires insolubles, identifier des activités illégales ou encore démanteler des réseaux de crime organisé. 

Deuxième partie ON NE TRAVAILLERA PLUS JAMAIS COMME AVANT

Bastien – Nostalgiste Les technologies permettant de se projeter dans des univers différents ne vont cesser de se multiplier… Le nostalgiste créera des expériences sur mesure, via la réalité virtuelle, à des fins curatives mais également récréatives. On pourra ainsi replonger en enfance pour se remémorer des moments heureux ou retisser le fil de sa vie.

Gauthier, Hugo & Pierre – Artistes transgéniques La robotique et l’IA vont devenir des outils dont les artistes de demain sauront s’emparer… L’artiste de demain sera peut-être un artiste transgénique utilisant les biotechnologies pour créer de nouvelles espèces, des croisements d’animaux, peut-être même des créatures entre l’animal et l’homme, à des fins artistiques.

Sabine – Assistante au bonheur Le développement des écrans nomades a fait exploser le temps qu’on leur consacre…L’addiction suscitée par cette industrie en forte croissance va sans nul doute engendrer le développement de toutes les professions liées au sevrage de ces outils technologiques. Le métier d’assistant au bonheur apparaîtra pour accompagner les individus dans leurs grands choix de vie. Quel que soit le support qu’offrira l’IA, il me semble que rien ne pourra remplacer l’écoute, l’empathie et le sens du service d’une aide à domicile, d’une infirmière ou d’une paychologue.

Ondine – Réensauvageuse Un job qui émergera bientôt sera donc sans doute celui de réensauvageur. Avec les progrès de la génétique, nous pourrons dans quelques années travailler sur la réintroduction de plantes ou d’espèces disparues.

Catherine – Éthicienne d’IA Les entreprises devront systématiquement se doter de véritables éthiciens d’IA, pour questionner les nouveaux algorithmes et objets qu’elles vont créer, et ce avant même de les concevoir. Il s’agira d’appréhender l’ensemble des impacts sur la société et de permettre aux humains de décider ou non s’ils souhaitent voir arriver ces nouveaux outils et accepter leurs implications. Je suis convaincu que l’utilité, l’éthique et le sens de notre travail seront des facteurs de compétitivité majeurs de la quatrième révolution industrielle.

Troisième partie UNE RÉVOLUTION ÉDUCATIVE EST INDISPENSABLE

Benoît -Meta-architecte Avec l’émergence de la domotique, de la modélisation des données du bâtiment (BIM), le métier de constructeur nécessitera de plus en plus la maîtrise des nouvelles technologies. Le méta-architecte proposera ses services pour concevoir et construire la maison de vos rêves dans le monde de votre choix, le tout rémunéré en cryptomonnaie.

Maxime – Contrôleur aérien de drones Le contrôleur de drones sera le garant et le coordinateur d’un espace aérien remodelé qui nous simplifiera un peu plus la vie, tout en devenant toujours plus complexe à surveiller et à sécuriser.

Thomas – Terraformateur L’un des jobs du futur pourrait donc être celui de terraformateur, un scientifique qui travaillerait à rendre la vie humaine possible dans l’espace, que ce soit sur une planète, un satellite naturel ou un corps céleste.

Nicolas – Assistant du virtuel Leur job consistera à nous aider à créer notre identité et notre avatar virtuels correspondant à ce que nous rêvons d’être dans cet autre univers. Ainsi, l’assistant virtuel identifiera pour nous la panoplie d’objets digitaux qui nous seront essentiels et opérera comme un chasseur de tendances et de nouveautés, et comme intermédiaire pour négocier les transactions en crypto-monnaies.

Amélie – Éleveuse de criquets La géoponie rotative sur sol vivant… Le résultat est très impressionnant : pour un hangar de 1 000 mètres carrés, on peut cultiver soixante fois plus de fraises que sur un sol traditionnel! L’éleveur de criquets devra ainsi maîtriser les différentes technologies et leurs applications, pour faire grandir des espèces adaptées aux différents marchés.

Jean-Louis - Neuromanager L’innovation technologique et l’innovation sociale doivent marcher ensemble. Chacun doit pouvoir s’épanouir dans son travail et atteindre son plein potentiel. Le rôle du manager de demain sera celui d’amplificateur de talent, capable de trouver les outils pour faire réussir tout le monde.

Quatrième partie L’ÉDUCATION EST NOTRE BIEN COMMUN

Augustin & Emmanuel – Dépollutionneurs L’aventure Lemon Tree peut commencer. Pour cela, ils innovent et conçoivent des machines de tri aussi intelligentes qu’incitatives afin d’optimiser la collecte du papier, du plastique, des métaux, du bois et du verre. La mission du dépollutionneur sera de nettoyer les milliards de déchets que nous produisons, qu’ils soient enfouis ou à la surface des océans.

Saad – Sportif augmenté Ces données sont des éléments essentiels pour l’aide à la décision du coach. Elles lui offrent la possibilité de faire du prédictif, en définissant les paramètres physiques et techniques adaptés pour optimiser les chances de réussite de chaque match. Des puces seront directement intégrées dans le corps pour analyser avec précision les performances, et les entraînements revêtiront un caractère toujours plus scientifique.

Makiehitu – Exo-artisan Nombreux sont les artisans qui vont utiliser les avancées scientifiques et techniques pour étendre leurs capacités. Plutôt que de subir les machines, ils pourront les mettre au service de la valorisation de leur travail ou, plus encore, d’une dextérité et d’une acuité gestuelle augmentée. L’imprimante 3D autorisera la duplication à l’infini de n’importe quelle forme, tandis que les outils de frappe nanométriques permettront au graveur des prouesses inconnues jusqu’alors… et avec elles l’avènement de l’exo-artisan.

Helena & Claude – Data journalistes Le data journaliste utilisera les outils d’analyse de la donnée et créera ses propres algorithmes. La formation à l’éthique sera dans ce contexte un prérequis à la manipulation des données.

Nicolas – Pentester L’un des emplois qui ne cessera de grandir sera celui de pentester (la contraction de « pénétration « et « test »), i.e. un professionnel chargé de tester les résistances de tous nos systèmes de sécurité en essayant de pénétrer les réseaux et de comprendre leurs faiblesses.

Conclusion

Toutes les technologies évoquées sont à portée de main. Certes, elles sont plus ou moins démocratisées, mais elles préfigurent tout ce que l’Intelligence artificielle, l’Internet des objets, la robotisation, l’exploitation des données, la réalité virtuelle ou la révolution verte vont engendrer comme changements au sein de notre société. Autres points évoqués:

Première partie

Intelligence artificielle, robots, Internet des objets, réalité virtuelle, virage écologique …Toutes ces forces vont faire bouger les plaques tectoniques sur lesquelles nos sociétés sont installées, et ce de façon irréversible. La mauvaise nouvelle, c’est que sur cinq ans, 75 millions d’emplois à travers le monde vont effectivement disparaître du fait de l’automatisation. La bonne, c’est que ce sont 133 millions de nouveaux emplois qui devraient être créés. Et paradoxalement, je crois que plus les robots prendront une place importante dans nos vies et dans nos entreprises, plus notre économie sera centrée sur l’humain. Ce sont donc des facultés purement humaines qui feront la différence sur le marché du travail et qui seront à l’avenir les plus convoitées. Sans diplôme d’études supérieures, point de salut dans le monde de demain. De plus, même avec un diplôme et un emploi, les salariés devront acquérir de nouvelles compétences très régulièrement pour rester à la page.

Deuxième partie

La primauté de l’individu sur le groupe, teintée d’un narcissisme de plus en plus prégnant, est une caractéristique forte de notre société…Demain, il faudra réussir à concilier l’individualisme qui nous caractérise et notre besoin d’épanouissement collectif dans le travail.  Savoir résoudre des problèmes complexes avec l’aide des machines et de leurs données quasi infinies, c’est bien à cela que ressemblera l’archétype du job du futur.

Troisième partie

À l’heure des machines intelligentes, de l’obsolescence accélérée des compétences, des opportunités permanentes et de l’imprévisibilité, ce mode de vie où tout était appris une fois pour toutes n’est plus envisageable.  Le plus grand échec du système éducatif est de laisser sur le bord du chemin environ 100 000 élèves d’une classe d’âge. Ces derniers quittent l’école avant d’avoir obtenu le moindre diplôme.  J’imagine l’enseignant devenir une sorte de coach qui aura à sa disposition un ensemble de données pour définir la meilleure stratégie de succès.  Les nouvelles technologies vont rendre possible l’accès à des ressources d’apprentissage très variées, à tout moment, en tout lieu, par toutes sortes de moyens, et il nous faudra travailler à créer une multitude de moyes de formation et de valorisation des compétences.

Quatrième partie

Dès aujourd’hui, il faut s’occuper de sa formation comme on s’occupe de sa santé, procéder à des check-up réguliers afin de bien se connaître et d’évaluer son employabilité, identifier les organes qui vont bien comme ceux qui souffrent, et ne pas tarder à en prendre soin au risque qu’il ne soit trop tard. Le monde technologique de demain sera en constante évolution, et les compétences humaines seront les plus recherchées. Fini donc la standardisation et le formatage, la pluralité des savoir-faire et des aptitudes deviendra un vrai facteur différenciant. Pour se réinsérer, on a besoin de temps. D’argent. De ressources. Et de quelqu’un qui nous fasse confiance, sans juger, en respectant les choix et les rythmes des personnes, et en sachant les conseiller quand il le faut. L’accompagnement est un art, et il nous faut plus d’artistes. Les journalistes le savent bien, lorsqu’une information vraie va toucher 1000 personnes, des informations erronées sur le même sujet vont en atteindre jusqu’à 100 000. L’éducation, au même titre que la préservation de nos ressources et de la biodiversité terrestre, est à mes yeux la grande cause pour laquelle il est crucial de se battre aujourd’hui. Il faut encourager, faciliter, financer et promouvoir toutes les initiatives qui redonnent de la fraîcheur et de l’ambition à notre système éducatif. C’est ainsi que Singapour a promu au rang de valeurs fondamentales le respect, la responsabilité, l’intégrité, l’attention, la résilience et l’harmonie, censées favoriser la communication, l’éducation civique et la pensée critique.

 

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Blizzard de Marie Vingtras - L'olivier (roman)

Coup de cœur d’Élodie, libraire à De fil en page: Au cœur d’un violent blizzard en plein Alaska, un petit garçon disparaît. Bess n’a pourtant lâché sa main qu’un bref instant. Elle se lance à sa recherche, tout comme Bénédict et Cole. Alors que chacun lutte contre les éléments, les souvenirs remontent, le passé ressurgit.

Un premier roman captivant au suspens maîtrisé qui nous plonge en plein froid comme dans les tourments de l’âme humaine.

Les gens d’ici vous demandaient jamais d’où vous veniez. Vous pouviez vous être sorti les fesses tout droit de l’enfer ou être descendu du paradis, ça faisait pas de différence. Si vous étiez prêt à vivre au milieu de nulle part, à travailler dur, et à pas vous plaindre, il y avait une place pour vous.

Elan Vital : antidote philosophique au vague à l'âme contemporain par Sophie Chassat - Calmann Levy (essai)

Émetteur du verbatim: François C.

élan vital : antidote philosophique au vague à l'âme contemporainLa présence de l’élan vital se reconnaît à ce que, quelque chose bougeant en nous, dans tout notre être, corps et âme, nous sommes conduits à faire bouger quelque chose à l’extérieur de nous sous la forme d’un inédit, d’une origine. L’élan vital n’est pas là pour nous faire traverser l’existence sans heurts, car, quand l’élan vital n’est plus, nous perdons tout simplement “l’envie”, qui porte si bien son nom : en vie ! Cultivons notre élan vital. La vie ne vaut pas d’être vécue en mort-vivant.

Première partie DESCRIPTION : L’ELAN VITAL Cerner l’élan vital pour apprendre à le (re)connaître

Mouvement

L’élan vital se manifeste quand nous coïncidons pleinement avec ce mouvement de la vie en nous, quand nous ne faisons plus qu’un avec l’impulsion génératrice de vitalité qui est en nous…Aussi nous sentons-nous invincibles quand il nous habite et que rien ne l’amoindrit : notre vivacité est intarissable, rien ne peut nous arrêter. L’élan vital est d’ordre germinatif, bourgeonnant. Le sentiment qu’il procure est celui d’un afflux de suc, d’une inflorescence, d’une émergence chrysalidaire. Pour le vivant, l’enjeu est donc moins le maintien de l’équilibre immobile de son milieu intérieur que le mouvement perpétuel qui lui permet de s’adapter à d’incessantes métamorphoses. La vie est une aventure, pas une sinécure. « Augmenter sa puissance d’être », tel est bien, pour reprendre la formule spinoziste, le programme du vivant qui vise sa propre expansion : fuser, rayonner, abonder. L’élan vital apporte un surcroît d’être.

Temps de la qualité : des temps où « notre moi se laisse vivre », des temps pour soi, des temps solitaires, le temps des expériences esthétiques, du « quality time » avec ses proches. Ce type d’expériences temporelles exige toujours une forme de suspension : la mise entre parenthèses de l’agenda… Temps du continu : des temps longs qui excèdent les délais dits raisonnables… Temps de l’intensité : des temps soutenus, des temps exceptionnels, des contretemps, des temps qui rompent avec la monotonie… Temps de la différence : créer des occasions de premières fois, il y a tant à faire, tellement de choses à découvrir !

En cultivant au quotidien ces instants et ces lieux chargés d’élan vital, nous nous donnons les moyens de revenir à nous, i.e. à la source même de notre impulsion vitale. Pas d’explication rationnelle à ces effets de synchronicité et de sérendipité, mais c’est bien dans ces moments de lune de miel entre nous et le monde que nous éprouvons le plus ce sentiment de vitalité illimitée qui nous fait nous sentir vraiment vivants.

Créations

Sans cesse, donc, la vie dévie. Génératrice ininterrompue de nouveautés, d’individuations absolument singulières, mais aussi source d’imprévisibilité, elle bifurque, ne cesse de prendre la tangente…C’est pourquoi la véritable « adaptation » est invention et non accommodation. S’adapter, c’est toujours innover ; la contrainte appelle une réponse qui n’est pas prédéterminée, ce qui exige d’aviser et d’oser ce qui n’existe pas encore.

Cette sensation d’avoir la primeur du monde, c’est bien l’état dans lequel nous sommes quand l’élan de vie bat à plein en nous. Tout est plus clair, lumineux, tout semble inédit. Nous nous faisons « voyants » car nous voyons effectivement tout, plan large autant que détails microscopiques. Nous naissons à nous-mêmes et au monde sans discontinuité, rejouant ainsi la logique même de toute impulsion vitale : percer et s’ouvrir.

A notre échelle, nous avons tous le pouvoir d’être des créateurs. Par nos actions, bien sûr, quand l’action est « créaction » (action originante), mais aussi par nos idées qui ont la puissance d’ouvrir d’autres horizons possibles au réel, d’en révéler des dimensions inexplorées jusque-là. A quelque degré que ce soit, ce qui compte, c’est de mettre en œuvre des processus créatifs car toute création est mise au monde du monde lui-même.

Dans ce devenir qui nous fait advenir à nous-mêmes, il y a d’abord la trace de la volonté. Nous sommes ce que nous voulons devenir, nous avons le choix. Laisser couler, attendre que ça passe : un choix ; adopter la solution de facilité : un choix ; se laisser gagner par le cynisme : un choix ; partir ou rester : un choix ; sourire ou pas ; un choix. Nous nous modelons au quotidien par tous ces micro-choix, et nous finissons par leur ressembler.

La puissance vitale est fertile, généreuse, contagieuse, elle dote toutes choses de sa qualité : elle fait « être plus ». Au contraire, celui qui est privé de l’ivresse vitale retire également à toutes choses leur puissance d’être et les fait « être moins ». On songe ici à la façon dont les individus chagrins et lugubres nous contaminent de leur tristesse d’être, quand les personnes solaires nous font rayonner à leur seul contact.

Corps compris

L’élan vital suppose et exige ainsi une pleine et totale incarnation. Retrouver le goût de la vie demande d’ailleurs souvent d’apprendre d’abord à habiter à nouveau son corps. Quand on se sent privé d’énergie vitale, il ne faut surtout pas penser, il faut bouger…Tout (re)commence par le corps, car la vie n’est pas éthérée, la vie est matérielle. Son mouvement de création incessante se nourrit du plus tangible.

Il y aurait ainsi toute une physiologie de l’élan vital à faire. Abordons l’exercice par un détour : toutes les métaphores qui dépeignent l’élan vital sont corporelles. Elles ne se contentent pas d’emprunter une image au monde matériel comme le font toutes les métaphores, elles racontent souvent aussi un état physique de l’être. Les images convoquées sont en majorité charnelles, viscérales, organiques : Force vitale. Energie vitale. Goût de vivre. Appétit de vivre. Souffle de vie. Flamme intérieure.

Les épreuves auxquelles la vie nous confronte ne sont donc pas en soi ce qui brise notre élan vital. Les obstacles peuvent même nous conduire à son affirmation redoublée quand, au contraire, l’absence de difficultés et d’entraves conduit souvent au vague à l’âme, au taedium vitae (« lassitude de la vie »). L’élan vital s’expérimente parfois à son acmé dans le passage de l’ombre à la lumière, le clair-obscur semblant favoriser la « fureur de vivre ».

Deuxième partie PRESCRIPTION : LES BIOPHORES Discerner ce qui active et nourrit l’élan vital

Les biophores

Croire en l’élan vital, puis l’activer partout où cela est possible. Pour cela, identifier les « biophores », littéralement les « porteurs de vie ». Est biophore toute expérience qui active, nourrit et transmet l’élan vital. Est biophore ce qui éveille, stimule et féconde la « vie vivante ».

La vie intérieure

Se constituer une « poche mentale » qui soit un lieu de ressourcement -tout à la fois un refuge et un petit monde à soi…La coloration de mon univers mental dépend à la fois de ce que j’y ai accumulé, mais aussi de la façon dont je l’ai ordonné et, surtout, du tourbillon que j’y active à chaque instant. Car l’élan vital se nourrit de tous ces liens qui se tissent entre ces éléments qui m’habitent.Il y a ainsi toute une dynamique de l’intérieur qui reflète notre dynamique intérieure. D’où l’importance de se sentir bien chez soi et de rythmer ses espaces pour que s’y reflète la puissance plurielle de notre sève intime. Un « chez soi » peut être un biophore intense, il peut aussi être notre prison. Plus qu’un havre de paix, une vie intérieure ressemble ainsi à un incessant voyage où nous ne devons pas craindre les multiples transmutations qui nous font renaître à nous-mêmes.

Les trésors du monde

Je crois que l’élan vital se nourrit de la contingence, que quand tout est devenu nécessaire dans une vie, il s’épuise. En regardant le monde que nous côtoyons au quotidien comme fondamentalement contingent, comme pouvant ne pas être et ne pas être tel quel, nous éprouvons le sentiment de l’inventivité du réel – et peut-être avons-nous besoin de ressentir cela pour nous rappeler que nous pouvons, nous aussi, nous réinventer à chaque instant, même quand la quotidienneté s’est installée.

Ce renouvellement constant du monde nous fait cependant éprouver le nevermore de chaque instant. Ce qui a eu lieu n’aura plus lieu, ce que j’ai vécu ne reviendra pas. Pas de seconde fois. Pourtant, loin de devoir nous rendre tristes, cette conscience de l’irréversibilité du temps nous appelle à vivre toujours plus intensément l’unicité absolue du moment présent et surtout à appréhender le cours de l’existence comme une succession ininterrompue d’occasions, de chances à saisir. Chaque fois que j’apprends la destruction d’un écosystème, la disparition d’une espèce, la mort d’un paysage, je me sens meurtrie, parce que les coups infligés à l’élan vital dans le monde vivant sont des coups qu’on inflige à mon propre élan vital. 

Le lien aux autres

Plongée tout à coup dans une situation « entre la vie et la mort », elle avait traversé une profonde crise existentielle où la hiérarchie de ses valeurs s’était entièrement recomposée. S’en étant finalement sortie, elle avait formulé l’hypothèse selon laquelle la réflexion sur le sens de la vie n’était pas une question d’âge comme on le croit souvent, mais le résultat d’une situation où l’horizon temporel se rétrécit, laissant entrevoir un terme possible à l’existence. Ce qui compte vraiment dans la vie s’éprouve quand le temps est compté, et cela quel que soit le nombre d’années au compteur.

Authenticité, réciprocité, unicité, transformation, symbiose : l’amitié coche toutes les cases. Elle préserve sur le long terme la délicate équation de la relation biophore…L’autre m’est totalement indispensable à la fois puisque la seule idée de sa disparition me cause une peine immense et parce que son absence m’amoindrit quand sa présence me revigore.

Troisième partie PROSCRIPTION : LES BIOCIDES Identifier et lutter contre tout ce qui nous dévitalise

Biocides

Si ce qui caractérise l’élan vital est mouvement, création et corporéité. Ce qui, en contrepoint, l’affecte négativement est immobilité, stérilité et anesthésie. L’amour de la vie se révèle quand celle-ci nous échappe. Alors se produit une ruade vitale, du même ordre que celle que décochent, paraît-il, les animaux aux abois. Tout proteste et résiste à la perspective de la non-vie, tout redevient possible, on se promet que si on en revient, tout renaîtra.

L’idéal

Si la beauté idéale est captivante, elle n’est qu’»un rêve de pierre », un fantasme minéral et non un vécu organique. Le charme, lui, est palpitation, vibration…Humaine, la beauté a besoin du « grain de beauté », du « je-ne-sais-quoi ».  Car c’est dans les brins d’imperfection que se niche « le sel de la vie ». C’est que tout va ensemble : pas d’enthousiasme sans travail, fatigue et douleur. Si on veut le premier, on ne peut s’épargner les trois autres. Toute création est une mise au monde qui nous met « à vif ». Vouloir la vie, c’est vouloir toute la vie. On ne peut pas faire le tri, il n’y a qu’un seul lot. Ainsi, alors que l’idéal de perfection exige l’instantané et la performance, le perfectionnement implique le temps long et la persévérance. Le perfectionnement pourrait même se révéler être l’éthique de l’élan vital : se perfectionner en sachant qu’on n’atteindra jamais la perfection, mais ne cesser d’y tendre.

La plainte

Quand je me plains, je dis en somme que la vie m’est une insulte intolérable et que je mérite mieux que ça. Et j’attends. J’attends que quelque chose ou quelqu’un m’indemnise pour cette injustice qui m’est faite. Car la plainte, loin de conduire à vouloir changer ce réel irritant, amène à enregistrer l’existant. L’inaction est la vérité de la plainte, la revendication sans fin son horizon. Car la vie est action, invention, par nature pourvoyeuse de résolutions en forme de révolutions. Elle n’est même que cela. Les organismes vivants sont des exemples de solutions actives et créatrices à des problèmes qui se posent à eux. Nous avons le pouvoir de transfigurer nos blessures et, par la réactivation de notre élan vital, de produire de nouvelles gerbes de vitalité. Rien n’est jamais sans espoir. Evangile selon saint Matthieu : « Vous êtes le sel de la terre. Mais si le sel perd sa saveur, qui la lui rendra ? Et si c’était nous-mêmes ?

La norme

Nos choix de société actuels, en cours (car rien n’est encore joué) vont dans le sens d’une mécanisation exponentielle de la vie. Toujours plus tatillonnes, réglant les menus détails de nos actions quotidiennes, les normes ne se contentent pas d’émettre des recommandations, elles ont une force contraignante : nous devons les respecter, suivre les consignes, nous soumettre à des contrôles et à des évaluations. La norme n’a pas d’esprit, elle n’a qu’une lettre, aucune interprétation ou second sens n’est possible. La norme est ainsi biocide de toute « énergie spirituelle » : elle étouffe dans l’œuf l’expression de notre vitalité créatrice et vide toute chose de la possibilité d’un sens qui soit irréductible à la logique de la normativité. La norme est insensée, elle est anti-vitale.

CONCLUSION

L’élan vital n’est plus une option, il est notre manière d’affirmer, contre tous les biocides en cours, le parti pris de la vie contre ce qui la réduit, l’empêche, la menace. Cet « élan » doit reprendre son sens premier d’arme de combat : une « lance » à jeter avec force contre l’ultra-mécanisation et la dévitalisation en cours de nos existences. Notre responsabilité est de le réactiver, de l’amplifier et de l’essaimer autour de nous, partout où cela est possible. Littéralement, il nous faut désormais être sur le qui-vive.

Réveillons-nous ! par Edgar Morin - Denoel (essai)

Émetteur du verbatim: François C.

Réveillons-nous !1 DEUX FRANCE EN UNE

Depuis la Révolution de 1789, deux France se sont succédé ou ont coexisté : la France humaniste et la France réactionnaire. La loi de 1905 et l’affaire Dreyfus ont radicalisé l’opposition entre une France humaniste, républicaine, dreyfusarde, sociale, et une France réactionnaire prônant le retour à la monarchie, le privilège de l’Eglise catholique, l’expulsion des juifs - en fait la disparition de la France humaniste. Le désastre militaire de 1940 permit le triomphe de la France réactionnaire dans la défaite nationale avec l’accession du maréchal Pétain au pouvoir, « Travail, Famille, Patrie » remplaça « Liberté, Egalité, Fraternité ». Dans l’absence de tout grand mouvement politique porteur d’espérance, ces fortes inquiétudes favorisent le repli identitaire, revitalisent les racismes qui se prennent pour des racines, et réveillent un suprématisme dormant hérité de l’ère coloniale. Car c’est bien la purification ethnique et religieuse qui est devenue la ligne maîtresse de la France réactionnaire, dans son obsession d’éliminer l’immigration arabe, africaine, musulmane.

2 UNE NOUVELLE ERE ANTHROPOLOGIQUE

Dès lors, le progrès scientifique révèle sa terrifiante ambiguïté. La science la plus avancée devient productrice de mort pour toute civilisation. La rationalité scientifique révèle une face irrationnelle. Le progrès de la puissance humaine débouche sur l’impuissance humaine à maîtriser sa propre puissance. Mais tout cela est comme anesthésié dans le somnambulisme général de notre vie « au jour le jour ». Un péril écologique global de désastres massifs et multiples est apparu depuis un demi-siècle sans que les dirigeants et les peuples en prennent conscience. Ses causes sont non seulement dans les énergies polluantes qui prédominent dans nos économies, mais surtout dans le déchaînement techno-industriel pour le rendement et le profit, animé à la fois par la frénésie du capital et la volonté de puissance des Etats. Ces forces puissantes dominent les esprits humains qui devraient les dominer…L’anthropocène est aussi le thanatocène. Toute la philosophie transhumaniste masque le vrai problème de l’humanité, qui n’est pas dans l’augmentation quantitative de ses pouvoirs mais dans l’amélioration qualitative des conditions de vie et des relations humaines. L’enjeu essentiel n’est pas de changer la nature humaine, mais d’en inhiber le pire et d’en favoriser le meilleur. Le transhumanisme escamote la nécessité première de régénérer l’humanisme. Pandémie : cette crise révèle que les interdépendances de la mondialisation techno-économique n’ont apporté aucune solidarité ; elle remet en question les problèmes d’autonomie et de dépendance des nations. En même temps, elle parachève une communauté de destin de l’humanité dans le péril et la menace d’une crise gigantesque commune, sans que pourtant cette communauté de destin soit consciente. Inconscience et somnambulisme règnent. Nous sommes maintenant au cœur de la crise et la crise est au cœur de l’humanité.

3 PENSEE DE LA CRISE ET CRISE DE LA PENSEE

Les déviances désorganisatrices d’un système peuvent devenir organisatrices d’un système transformé. La crise peut se résoudre de façon réactionnaire, conservatrice, réformatrice ou révolutionnaire. Elle peut également combiner une synthèse de l’ancien et du nouveau. Ainsi, il nous faudrait aujourd’hui paradoxalement arrêter la croissance pour sauver la planète et soutenir la croissance pour sauver la régulation des sociétés modernes. La plupart de nos responsables, incapables d’affronter cette contradiction, oublient l’intérêt général à long terme, qui est planétaire, pour se concentrer sur leurs intérêts particuliers immédiats liés à la croissance économique.

L’aveuglement face à la crise en cours tient à la conception linéaire et quasi mécaniste du devenir, à la croyance que le futur est prédictible, à l’ignorance du travail souterrain à l’œuvre sous la surface du présent. En se fiant au calcul, on anesthésie sans cesse l’imprévu, lequel ignore le non calculable de nos vies et de nos sentiments. Selon une de mes maximes favorites, la connaissance est une navigation dans un océan d’incertitudes, où l’on peut se ravitailler sur des îles ou archipels de certitudes. Une fois encore, il s’agit de penser simultanément la nature de la crise et la stratégie qui conduira à sa solution, ce qui nécessite de remédier à la crise de la pensée. L’ère nouvelle apporte déjà les débuts incertains et ambigus d’une révolution anthropologique affectant la condition humaine sur la Terre, dans son rapport avec la mort, la vie, le monde et la relation entre humains eux-mêmes. Ainsi, la crise de l’humanité, qui est à la fois thanatologique (portant en elle une menace de mort), écologique, économique, civilisationnelle, historique, est pour toutes ces raisons conjuguées une crise anthropologique portant sur la nature et le destin de la condition humaine.

4 REVENIR A NOTRE TERRE

Cette ère nouvelle est marquée par des incertitudes en chaîne sur le présent et l’avenir. Nous sommes contraints à une navigation dans l’incertain, ce qui signifie le renoncement à toute conception linéaire de l’histoire…Le principe premier de l’écologie de l’action nous dit que tout acte échappe aux intentions de l’acteur pour entrer dans le jeu des inter-rétroactions du milieu, et l’acteur peut déclencher le contraire de l’effet souhaité.

La planète est en détresse : la crise affecte l’humanité entière, entraîne partout des ruptures, fait craquer les articulations, rallume les guerres, détermine les replis particularistes ; la vision globale et le sens de l’intérêt général sont ignorés. Civiliser la Terre, transformer l’espèce humaine en humanité devient l’objectif fondamental et global de toute politique aspirant non seulement à un progrès, mais à la survie de l’humanité. Le progrès matériel ne fait pas qu’occulter les catastrophes, il les prépare…Alors que sans cesse l’inattendu arrive, il est rapidement anesthésié. On est incapables de concevoir les ambivalences, les ambiguïtés et les contradictions des progrès scientifiques, techniques et économiques que notre logique, et par conséquent notre rationalité restreinte, occulte.

(Réforme de la pensée) Il s’agit de remplacer les principes qui engendrent des pensées simplificatrices, unilatérales, partielles et évidemment partiales, par des principes qui permettent à la fois de reconnaître, de distinguer et de réunir des antagonismes complémentaires…Car l’univers, la vie, l’humain obéissent non à un déterminisme mécaniste, mais à une dialectique d’ordre/désordre/organisation/désorganisation, comportant aléas et bifurcations, créations et destructions. Nous devrions savoir que l’histoire ne progresse pas de façon linéaire mais par déviances qui se fortifient et deviennent tendances, qu’elle est à la fois rationnelle et démente, marxienne et shakespearienne. Nous devrions savoir aussi que tout ce qui est humain est bipolarisé selon des notions en apparence antinomiques : Homo est à la fois sapiens et demens, faber et mythologicus, economicus mû par l’intérêt et ludens mû par le jeu et la gratuité. Sa raison peut se mettre au service de sa folie comme dans la guerre et le génocide…L’humain est un être instable et versatile, vivant de contradictions, capable du meilleur et du pire, devant contrôler sans cesse ses passions par sa raison, et réchauffer sans cesse sa raison par ses passions.

La politique de civilisation vise à ré-humaniser et à re-convivialiser nos existences. Elle vise à développer l’autonomie individuelle, la responsabilité, la liberté, et à lutter contre l’égoïsme. Cette politique de civilisation humaniserait les administrations, humaniserait les techniques, défendrait et développerait les convivialités et les solidarités. Elle serait une politique de la reconnaissance de la pleine humanité d’autrui. Il nous reste pourtant des principes d’espérance. Le premier est de miser sur l’improbable…L’espérance est dans l’improbable. Comme souvent dans les moments dramatiques de l’histoire, les grands événements salvateurs ont été inattendus. Le deuxième principe d’espérance se fonde sur les possibilités et la créativité de l’esprit humain. Le troisième principe d’espérance se fonde sur l’impossibilité de durer à l’infini pour tout système qui transformerai la société et les individus en machines.

La nouvelle politique humaniste de salut public est le grand projet qui peut réveiller les esprits accablés ou résignés. Ce n’est plus l’espérance apocalyptique de la lutte finale. C’est l’espérance courageuse de la lutte initiale : elle nécessite de restaurer une conception, une vision du monde, un savoir articulé, une éthique, une politique. Elle doit animer non seulement une résistance préliminaire contre les forces gigantesques de barbarie qui se déchaînent, mais aussi un projet de salut terrestre. Ceux qui relèveront le défi viendront de divers horizons, peu importe sous quelle étiquette. Ils seront les redresseurs de l’espérance.

LA PARENTHÈSE BOOMERS - Réconcilier les générations! de François DE CLOSETS - Fayard

Émetteur du verbatim: François C.

AVANT-PROPOS

Ils appartenaient à la génération de l’après-guerre, cette fameuse génération des boomers qui n’a connu ni guerre, ni épidémie, ni crise, a accumulé sur le dos de ses enfants une montagne de dettes et cinq années de retraite en plus, et a entraîné dans une interminable dégringolade la France glorieuse dont elle a hérité.

Un système de solidarité intergénérationnelle conçu pour la France de 1946 ne peut convenir à la France de 2050.

Ce nouveau tableau des générations se plaque sur une France aux multiples fractures, où toute différence devient source de victimisation, de discrimination et d’affrontement.

Première partie «GÉNÉRATION», VOUS AVEZ DIT GÉNÉRATION?

1. La ronde des générations

Chacun s’approprie sa génération en plaquant des stéréotypes sur les âges d’avant, d’aujourd’hui et d’après.

Je ne crois pas que le passage d’une France conquérante à une France démissionnaire qui intervient dans les années 1970-1980 était une fatalité. Il correspond bien davantage à une absence de volonté. Face à la perte de l’autorité politique, la conjoncture a pris les commandes.

(Mai 68) L’individu-roi remplace le Français… C’est bien une nouvelle génération qui s’impose et qui va entraîner le pays dans un irrésistible déclin. Une génération totalement libérale par sa revendication d’un individualisme sans limites, mais totalement socialiste par son exigence clientélaire d’un État omni-protecteur.

Les boomers se retrouvent à tous les niveaux de la société, dans toutes les positions, ils ont le même âge, mais surtout, ils partagent la même idéologie, celle de l’égoïsme, de l’hédonisme, du présentéisme. «Moi d’abord, ici et maintenant» et «après moi le déluge».

2. Du meilleur au pire

Pour faire face au réchauffement ou au vieillissement, il fallait se lancer dans des politiques nouvelles, audacieuses. Nous n’eûmes pas ce courage.

Le champion des années 1970, celui qui dominait l’Europe par son rayonnement, en est devenu l’homme inguérissable. La génération au pouvoir en France entre 1980 et 2020 a réussi l’exploit de ruiner le pays et de compromettre l’avenir de ses enfants.

De Gaulle avait mis les Français au service de la France, ses successeurs ont mis la France au service des Français… Cette génération «boomers», qui bascule aujourd’hui dans le grand âge, a hypothéqué l’avenir.

Deuxième partie LE RÈGNE DES BOOMERS

3. On a changé de république

Pour le meilleur ou pour le pire, les Français ne sont plus «raisonnables». Ils résonnent au son du tambour, ils ne raisonnent pas à quelques milliards d’euros près.

La Vème République s’était construite sur le primat de la France, elle va continuer, avec les mêmes institutions, sur le principe inverse, le primat des Français, un primat poussé jusqu’à l’autodestruction.

Les Français l’ont emporté sur la France. C’est l’intérêt individuel qui prévaut sur le bien commun, l’instant sur la durée, la génération en place sur les générations à venir. Les boomers ont troqué l’autorité contre le pouvoir, abandonnant les moyens de gouverner pour ne préserver que les privilèges.

4. La génération «Toujours plus!»

À l’opposé du toujours mieux, le toujours plus impose le quantitatif contre le qualitatif. Plus d’argent, mais aussi plus de vitesse, plus de temps libre, plus de droits, plus de privilèges.

En 2000, le revenu annuel d’un actif était encore de 2000 euros supérieur à celui d’un retraité. Aujourd’hui, c’est l’inverse… La génération boomers a géré dans l’instant, au mieux de ses intérêts, sans jamais intégrer le long terme dans ses calculs.

Si l’on prend le prix du mètre carré à Paris, il est multiplié par cinq entre 1995 et 2020, dans le même temps l’inflation n’a été que de 45%… Le marché de l’immobilier dans les grandes villes est devenu inaccessible pour les moins de 30 ans. Seuls 13% d’entre eux ont pu s’y risquer. L’inflation immobilière a enrichi une génération et exclu la suivante.

La France consacre déjà 14% de son PIB au paiement des retraites, loin devant l’Allemagne, 10,1%, le Danemark, 8,1% ou la Suède, 7,2%.

Les plus de 50 ans représentent 37% de la population et possèdent 68% du patrimoine… Le taux de pauvreté n’est que de 7% au-delà de la soixantaine, alors qu’il atteint 21% pour les moins de 30 ans.

5. La jeunesse corvéable

Le jeune non qualifié a devant lui des années de galère, enchaînant CDD, stages et contrats aidés avec des passages répétés au chômage, lorsqu’il se présente sur le marché du travail… Chacun porte son diplôme, ou son absence de diplôme, comme un code-barres qui le suit tout au long de son existence.

Nous avons mis sur pied un système dual avec un personnel qualifié, en CDI, très bien protégé, et un personnel non qualifié en situation précaire.

L’irrésistible montée du taux d’abstention prouve que les jeunes ne se reconnaissent plus dans la république, confisquée par une classe d’âge.

Pour supporter le poids des crises sanitaires comme des crises économiques, la mentalité des boomers conduit toujours à faire passer les seniors avant les juniors, à protéger le passé, quitte à offenser l’avenir.

6. La vie à crédit

L’endettement flambe dans tous les pays. Partout, la dépense est immédiate, les comptes remis à plus tard. Cet argent déversé à tout-va n’est ni gagné, ni gagé, rien que fabriqué. Autant dire que c’est de la fausse monnaie.

La droite avait eu le déficit honteux, la gauche aura le déficit glorieux, non pas caché mais proclamé.

Le crédit n’accompagne pas la politique, il la remplace. Tout problème trouve sa solution dans une facture. C’est l’outil de la procrastination. Il suffit de mettre de l’argent, ce qui est toujours agréable, pour différer la solution, qui est toujours désagréable. Notre endettement n’a servi qu’à financer le statu quo, à payer l’absence de réformes.

Depuis un demi-siècle, le pouvoir n’est plus en état de tenir le présent pour assurer l’avenir. Cet «après moi le déluge» se retrouve à droite comme à gauche. Il s’agit bien d’un phénomène de génération et pas de parti. Le crédit correspond parfaitement à l’hédonisme des boomers, à la perte d’autorité de l’État, au remplacement du citoyen par le client.

La France perd toutes ses usines et se désindustrialise comme aucun autre pays européen. Soit dit en langage clair: la France des boomers ne sait plus produire, car elle ne sait plus travailler.

La grande misère du service public… Toute difficulté prend une forme monétaire et toute facture devient légitime et doit être payée. L’euphorie financière interdit tout recours à une quelconque limite budgétaire. Quant à lier l’accroissement des budgets à des réformes radicales, on n’y pense même pas… Le secteur public coûte en France plus cher que dans les pays voisins, les agents sont plus nombreux, les budgets plus élevés et les services rendus médiocres… Tel est le bilan de l’ordre syndicalo-bureaucratique qui résiste depuis cinquante ans à toutes les tentatives de modernisation.

La France euphorique de la fin 2021 est une gigantesque salle de shoot où les descendants des boomers s’injectent par doses massives la drogue du crédit… Avec la crise sanitaire et le «quoi qu’il en coûte», les Français se sont totalement libérés des contraintes financières. Ils vivent dans un monde où l’argent n’est plus le problème mais la solution.

7. Le chacun pour soi

La politique pouvait d’autant moins prospérer à l’ombre des boomers qu’elle devait s’accommoder de l’indifférence française pour le militantisme. Depuis 1980, le pourcentage des Français qui adhèrent à un parti politique varie entre 2 et 3% de la population.

La génération boomer est tout entière au service de l’individu, de l’instant et de l’émotion, elle pratique le «moi d’abord» et le «maintenant, tout de suite», repoussant à plus tard le collectif comme l’avenir, la fraternité ou la raison.

La France post-68, la France des boomers, est donc malade d’individualisme, malade de n’être plus qu’une collection d’individus les uns à côté des autres et non plus un rassemblement de citoyens solidaires formant une société.

Ainsi en arrive-t-on à cumuler les inconvénients de la social-démocratie -avec une bureaucratie étouffante et des prélèvements accablants- et de l’ultralibéralisme -avec une société qui se défait, se déchire, s’archipélise, et des corporations qui se sentent dévalorisées. Nous payons comme des Scandinaves pour être servis comme des Américains. À ce double jeu, la démocratie n’a cessé de régresser dans les esprits.

Les boomers, eux, ont mis en place un État-providence d’une générosité sans pareille, qui offre tout sans rien imposer. C’est la politique sans peine qui, en une quarantaine d’années, a épuisé la partitocratie.

La République française est en morceaux et l’on risque de chercher longtemps un homme non pas providentiel, mais nécessaire, ou un parti pour la reconstruire.

8. Les enfants gâtés de l’histoire

Notre histoire contemporaine est marquée par la rupture des années 1970. Celle qui nous a fait basculer des Trente Glorieuses aux Trente Piteuses dont nous ne sommes toujours pas sortis.

Les Français accepteront-ils de supporter le prix de leur engagement contre Poutine? Une telle attitude représenterait une rupture avec la mentalité des boomers, qui exige de l’État-providence une protection universelle contre tous les aléas, toutes les fluctuations, tous les drames imaginables et, surtout, inimaginables.

Pour réconcilier ce cadre lumineux (beauté de la France) et cette humeur sombre (patrie de la rouspétance, du pinaillage, du mécontentement, du dénigrement, des affrontements, des troubles sociaux), l’étranger conclut que la France est habitée par des enfants gâtés. «Vivre au paradis et se croire en enfer», c’est, me semble-t-il, un trait de caractère unanimement reconnu aux Français, c’est lui qui va façonner la régression nationale.

Les Français ont compris que la parenthèse enchantée est terminée, que cinq crises majeures -sanitaire, militaire, financière, démographique et écologique- s’abattent ou s’abattront sur nous, mais ils entendent toujours que leurs sacro-saints droits acquis soient préservés.

Troisième partie LE TEMPS DE LA LONGÉVITÉ

9. Le système générationnel

L’accumulation des dettes, la perte de la cohésion sociale, le recul économique, l’appauvrissement des Français, le délabrement de la République et même la gérontocratie qui les opprime inquiètent moins les jeunes générations que le réchauffement climatique, la multiplication des calamités naturelles, la montée des océans, la perte de la biodiversité, l’épuisement des ressources, etc.

Aucun État, aucune organisation n’est à la mesure du planéto-désastre que nous voyons se mettre en place. Nul ne pourra donner quitus aux générations qui ont ainsi naufragé l’avenir de leurs enfants.

Nous arrivons à une nouvelle phase de la révolution démographique qui va subvertir notre organisation sociale.

Le principe, pour faire simple, c’est la conservation des droits acquis, un principe sacro-saint en France. On ne remet pas en cause les avantages reconnus à une quelconque catégorie, car les avantages se transforment en droits irréversibles. Mais que faire lorsque des changements obligent à modifier une situation devenue intenable?

Car le conservatisme construit une lecture pieuse du statu quo… C’est toujours la même procrastination face aux réformes indispensables, la même fuite en avant dans le déficit et l’endettement, la même spoliation des jeunes par ceux qui tiennent le pays.

En 2016, le nombre des plus de 60 ans a, pour la première fois en France et de façon définitive, dépassé celui des moins de 20 ans.

10. Le désordre des générations

Nous voilà donc potentiellement avec cinq générations (enfance, adolescence, âge adulte, senior, vieillard) qui ne se superposent pas, mais cohabitent, s’imbriquent, s’entremêlent et nouent de multiples relations d’interdépendance.

Dans le système qui s’est mis en place sans avoir été ni pensé, ni préparé, nous réussissons à combiner le jeunisme et l’âgisme, à maltraiter une jeunesse que nous survalorisons, à dévaloriser une vieillesse qui nous commande, à laisser les plus jeunes s’enfoncer dans la pauvreté, tandis que les plus âgés s’enrichissent sans rien faire.

Le boomer devenu quinquagénaire sait que l’entreprise commence le décompte des années. Trop vieux pour le travail, trop jeune pour la retraite, il s’est préparé une fin de vie professionnelle incertaine et une reconversion difficile.

11. Les deux âges de la retraite

Deux populations totalement différentes, tant pour les individus que pour la collectivité. D’une part, les seniors qui ont entre 60 et 75 ans ; d’autre part, le grand âge, qui peut aller jusqu’à 100 ans et plus… Le quatrième et le cinquième âge sont aussi dissemblables que l’enfance et l’âge adulte.

Les plus de 75 ans n’étaient que 3,4% de la population française en 1945, ils sont aujourd’hui 9,5%, ils seront 11% en 2025… À l’inverse, les moins de 20 ans, qui étaient 30% à la Libération, ne seront plus que 23,5% en 2025.

La première vie, de 60 à 75 ans, offre des années en mieux, des années en pleine santé ; la seconde n’offre que des années en plus, pas les meilleures, qui s’accompagnent d’une dégradation inéluctable de notre condition physique et intellectuelle.

La génération du court-termisme n’a pas vu plus loin que la case senior. Elle a repoussé devant elle ce cinquième âge -la falaise grise- qui l’attend et qui fait peur à tout le monde… Les «anciens» forment une population en perte d’autonomie sur laquelle tombent toutes les misères du grand âge, déficit de mobilité, multi-pathologies, état de dépendance, démence sénile, etc… une population qui exige une prise en charge moderne, selon les critères de sa génération.

Aujourd’hui, les plus de 65 ans représentent 20% de la population. Le vieillissement va porter cette population à 24,5% en 2030 et 27% en 2040… On estime aujourd’hui à 2,5 millions les personnes ayant besoin d’une assistance continue, mais la suite est connue: 3 millions en 2027 et 4 millions en 2050.

12. La génération dépendante

C’est donc le grand âge qui va envahir notre société dans les vingt prochaines années. La progression des seniors ne sera que de 20%, en revanche celle des octo-nonagénaires atteindra 70%. Quant au nombre de centenaires, il augmentera de 314%!

À la naissance, le Suédois, le champion de la bonne santé, peut compter sur 72 années avant de devenir vieux. Le capital du Français n’est que de 63 ans. Dix années de moins. La santé, ça se mérite ; son prix s’appelle la prévention.

La gériatrie distingue trois façons d’être vieux: Le mode «robuste et usuel», qui représente la moitié de la population âgée, ne correspond à aucune altération significative des grandes fonctions vitales. Le «vieillissement fragile». Les statistiques indiquent qu’en France, parmi les plus de 65 ans, 30% sont pré-fragiles et 15% fragiles. La dépendance, troisième stade du vieillissement. Il concerne environ 10% des personnes âgées et correspond à des pathologies sévères, évolutives, génératrices de handicaps.

À 90%, les gens souhaitent rester à leur domicile le plus longtemps possible et, rappelons-le, même en ayant besoin d’une assistance médicale.

13. Une longévité solidaire

La maîtrise du grand âge n’a rien à voir avec celle de la période 60-75 ans, elle ne peut se résoudre en faisant payer la génération suivante… La solution est à chercher dans de nouvelles solidarités.

La société se trouve donc contrainte par cette vie prolongée de dépasser l’individualisme égoïste du marché libéral pour retrouver un mode de fonctionnement plus solidaire.

Une stratégie qui consiste à financer en priorité des mesures de prévention de la perte d’autonomie est conduite dans quatre directions: la prévention de la perte d’autonomie par un suivi précoce et attentif, le traitement de la perte d’autonomie dans le but de rendre des aptitudes perdues, l’utilisation de technologies modernes pour suivre et assister la personne, et enfin une lutte obstinée contre l’isolement.

Le senior ne doit pas se mettre en retraite à 60 ans sans effectuer une activité sociale. Le bénévolat ne peut suffire. Ce service social doit s’effectuer au sein d’une organisation, qui fixe les règles, décide des affectations et vérifie la bonne exécution des tâches.

Tous les seniors seraient donc tenus de prendre une assurance dépendance qui subviendrait à leurs besoins en cas de perte d’autonomie. La prime serait évidemment proportionnée aux revenus, au patrimoine, ou aux deux.

Le «chacun pour soi» conduit au vieillissement dans la solitude de son logement ou à l’encasernement dans un Ehpad. La longévité ne peut qu’être solidaire, à l’opposé de l’esprit boomer. Telle est la révolution que nous impose notre évolution démographique.

Proposition LE CONSEIL DE PRÉVISION

Imaginer concrètement ce à quoi pourrait ressembler une fin de vie qui, l’âge venant, trouverait son équilibre entre le devoir de solidarité de tous vis-à-vis de chacun et les droits à la dignité et à l’indépendance de chacun vis-à-vis de tous.

Imaginer que chaque individu, homme ou femme, la cinquantaine venue, se voie inviter à un Conseil de prévision. Celui-ci servirait, comme son nom l’indique, à prévoir et préparer sa vieillesse, avec la perspective d’un service non pas militaire, mais social.

La première fonction de ce rendez-vous serait médicale ; il s’agirait tout simplement d’apprendre le vieillissement. La deuxième étape de ce Conseil de prévision serait assurantielle. Le ou la quinquagénaire aurait à faire le choix d’une «assurance dépendance». Le troisième temps serait professionnel, permettant à chacun de choisir son mode de vie pour ses dernières décennies. Le quatrième rendez-vous de ce Conseil de prévision serait patrimonial. Chacun aurait à sa disposition un conseiller financier pour l’éclairer sur la gestion de son patrimoine.

Conclusion LIBRES TOUS ENSEMBLE

La révolution de la longévité sera celle d’une liberté collective et d’un ordre social exigeant.

Dans tous les domaines, pour faire face aux crises qui s’annoncent, les libertés excessives de l’ère boomer devront être réduites. Qu’il s’agisse d’arrêter la machine infernale climatique, de remettre nos finances en ordre ou de construire la société du vieillissement, il faudra reconsidérer cette primauté de l’individu, revenir au collectif.

Notre passage de la liberté abstraite, souveraine et inaltérable à la liberté en situation, relative et responsable, ne fait que commencer.

Le pire du meilleur est devant nous.

Quarante ans plus tard, l’insatisfaction est générale, la République en panne, sans même prendre en compte le péril mortel de l’hyper-endettement. Le refus des contraintes est tel que même la vie à crédit semble insupportable. La liberté n’a pas été celle de l’engagement qui se met au service du bien commun et de ses valeurs, mais celle qui oppose le «moi d’abord» au «tous ensemble». Or la démocratie ne peut se construire sur l’addition de refus, sur la juxtaposition d’égoïsmes.

Dans ce monde impitoyable, une liberté ne saurait être vide de contenu. Elle ne peut miser sur l’égoïsme individuel et le nihilisme collectif. Il faut, tout au contraire, retrouver le civisme et le sens du bien commun. Les boomers les ont oubliés, leurs héritiers ne s’en souviennent plus. Mais avec des maîtres comme le réchauffement climatique, le vieillissement, l’endettement, les pandémies et, sait-on jamais, la guerre, nous ne pourrons plus ignorer que la liberté n’est pas un droit, qu’elle n’est pas donnée. Elle est en construction, elle a un coût. Elle se mérite.

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Les livres de la rencontre du Samedi 11 juin avec Camille Jedel, Séverine Mikan et Laëticia Tran

Nous retrouverons Camille Jedel, Séverine Mikan et Laëtitia Tran le Samedi 11 Juin ! Voici les livres qu’elles nous présenteront et que vous pourrez faire dédicacer!

Faux départ t.1 : Blois sous la pluieFaux départ t1. Blois sous la pluie par Laëticia Tran

Mathieu est un jeune Parisien à qui tout réussissait. Mais sa vie toute tracée prend un autre tournant quand, pour couper les liens avec sa ville natale, il accepte un poste de professeur de littérature dans un lycée de la ville de Blois. À peine arrivé, il fait la connaissance de Mateo, étudiant en coiffure surdoué à l’enthousiasme rafraîchissant.

Par une suite d’heureux hasards, les deux hommes se rapprochent et, bientôt, malgré leurs différences, ne peuvent plus nier leur complicité naissante… Mais les averses ne sont jamais loin : entre likes Instagram, poids du passé et traditions conservatrices, Mathieu et Mateo arriveront-ils à accepter et dépasser leurs peurs pour construire ensemble une histoire qui leur ressemble ?

Blois sous la pluie est un récit sur l’acceptation de ses peurs et de soi-même. Il aborde des thèmes actuels comme l’anxiété, les clichés dans la communauté LGBT, la différence d’âge, de maturité ou encore d’origine dans les relations, ainsi que l’influence des institutions comme la famille, la religion ou le mariage.

Ce qu’il se passe à l’intérieur par Laëticia Tran

17 mars 2020. La France entre en confinement afin de lutter contre l’épidémie de COVID-19. Timéo et David, à peine séparés après trois ans de vie commune, se voient forcés de passer leurs journées ensemble, coincés dans leur petit appartement parisien.

Confronté à l’apparente décontraction de David face à la situation, Timéo, d’un naturel anxieux, a du mal à trouver sa place. Alors que les deux hommes communiquent difficilement, les vieux ressentiments se mêlent aux problèmes professionnels et familiaux. Pourtant, cette proximité pourrait-elle leur être salutaire ?

Dans ce moment hors du temps, Timéo et David devront trouver au fond d’eux-mêmes ce qu’ils désirent réellement pour réparer leurs blessures et se montrer enfin tels qu’ils sont. 

Fragments d’éternité, t4, Londres 1946 par Séverine Mikan

La guerre vient de s’achever. Londres respire enfin. La ville, encore couverte de cendre, s’ébroue comme si le temps reprenait son souffle. Benjamin écoute.

Dans l’air flotte une rime qu’il connaît, peut-être bien tout un poème, celui des premières amours et des coups de folie, de la jeunesse qui swingue et qui croit en l’avenir.

C’était hier, et pourtant… Si le destin lui redonnait une chance ? Si, en cet instant suspendu entre passé et présent, celui qu’il a aimé passionnément lui était rendu ?

Les deux royaumes t2. Deux âmes liées par Camille Jedel

Seul, Damon doit faire face non seulement à la vie qui grandit en lui, mais aussi à la disparition progressive de ses pouvoirs. Peu à peu, son lien si précieux avec la forêt s’effrite, le laissant aussi désemparé que terrifié.

Adrias, quant à lui, est pris dans la tourmente d’une guerre qui menace tout ce pour quoi il s’est battu. Une seule pensée le gouverne : y mettre fin, car ce n’est qu’une fois la paix retrouvée qu’il pourra rejoindre son aimé.

Mais quand la folie de la guerre s’empare des Hommes, nul n’est à l’abri.

 

LE GRAND VIEILLISSEMENT de Maxime SBAIHI - Ed. de l’Observatoire 2022

Émetteur du verbatim: François C.

Introduction COUP DE VIEUX

Jamais dans sa longue histoire la population de notre pays n’a été aussi vieille, jamais elle n’a compté autant de seniors et ceux-ci n’ont jamais vécu aussi longtemps et dans un tel confort matériel qu’aujourd’hui… Plus la France vieillit, plus les actifs triment, plus les jeunes trinquent. Il est vrai que toute jeunesse vit trop jeune dans un monde trop vieux, mais aucune jeunesse française n’a été confrontée à un pays aussi vieillissant que la France d’aujourd’hui.

Les lourdes conséquences économiques, politiques et sociales du «grand vieillissement» sont en train de remettre en cause l’équité entre les générations et de menacer par là même la cohésion sociale.

Chapitre 1. LA DÉMOGRAPHIE SENS DESSUS DESSOUS

Des centenaires à ne plus savoir qu’en faire

La population du Vieux Continent est la plus vieille du monde. L’âge médian y est de 43 ans, contre 39 ans en Amérique du Nord, 32 ans en Asie et 20 ans en Afrique.

Les plus de 75 ans représentent déjà près de 9% de la population française et cette proportion devrait doubler d’ici à 2070 pour dépasser les 15%. C’est du jamais vu.

Alors que la France comptait 5 actifs pour 1 personne âgée inactive en 1945, ce rapport n’a cessé de se dégrader depuis. Il est passé sous la barre de 4 pour 1 en 1994, puis 3 pour 1 en 2016, et devrait passer sous la barre de 2 pour 1 d’ici à 2040.

Les quelque trois millions de personnes âgées en perte d’autonomie que compte déjà la France. Et le problème va aller grandissant puisque ce seront quatre millions de seniors qui seront en perte d’autonomie d’ici à 2050.

Le «grand vieillissement» déséquilibre tellement la solidarité intergénérationnelle que ses bénéficiaires sont désormais en moyenne plus riches que ses contributeurs.

Vivre comme Dieu en France

Constitué de dizaines de régimes différents, notre système de retraite est devenu une usine à gaz déficitaire, illisible, et surtout une machine à produire des injustices entre les générations.

Les retraités français bénéficient d’un des taux de remplacement (le rapport entre la retraite perçue et le dernier revenu d’activité) les plus généreux au monde: 75% en moyenne, contre 50% en Allemagne et 40% au Japon.

Rappelons que la France détient aujourd’hui le taux de cotisations sociales le plus élevé de l’OCDE et dépense deux fois plus que la moyenne pour ses retraités.

La France a fait le choix d’un système par répartition, mais il ne garantit pas l’équité entre les générations, faute d’avoir été recalibré à temps.

Les actifs et les comptes publics voient rouge

Ce mauvais réflexe de délester sans cesse sur l’avenir les charges et les erreurs du passé est encore plus visible sur l’héritage collectif qu’est notre dette publique… Pas un seul Français de moins de 48 ans n’a connu un budget excédentaire ou à l’équilibre.

Prise dans l’engrenage du «grand vieillissement», notre dette publique a tout d’une fuite en avant et rien d’une préparation de l’avenir… La tendance des gouvernements à agir au présent d’une manière non optimale pour le futur porte le nom d’«incohérence temporelle» dans la science économique.

À l’image de nos comptes publics et de notre système de retraite, les choix collectifs du passé ont trop souvent fait primer le présent sur l’avenir, la procrastination sur la préparation.

Chapitre 2. PAUVRES JEUNES, RICHES VIEUX

D’un point de vue strictement budgétaire, ce devoir d’«équité intergénérationnelle» dicte à chaque génération de ne pas laisser aux prochaines les mauvaises factures du passé et la non-constitution d’une épargne collective en prévision de ses propres besoins -devoir que les boomers ont clairement failli à respecter.

La paupérisation de la jeunesse

Tout au long de leur vie, les effectifs de la première vague des boomers se sont retrouvés au bon endroit et au bon moment pour bénéficier des hausses de niveau de vie.

De toutes les tranches d’âge, le taux de pauvreté calculé par l’Insee est le plus bas chez les plus de 65 ans et le plus haut chez les moins de 30 ans. Et il est deux fois plus élevé chez ces derniers que chez les premiers.

Pendant que la France vieillit, la jeunesse s’appauvrit. Les jeunes ont été forcés de se confiner pour protéger leurs aînés du virus mais, contrairement à eux, ils ne sont pas protégés de ses répercussions économiques. La crise de la Covid-19 a réussi la double injustice de se venger sur la classe d’âge qui est à la fois la plus pauvre et la moins vulnérable face au virus.

Patrimoine concentré, héritage retardé

Alors que le patrimoine net médian (l’ensemble des actifs détenus, moins l’endettement) des trentenaires était supérieur de 45% à celui des plus de 70 ans en 1986, il est désormais trois fois plus faible.

Une nouvelle règle des «3x60»: les plus de 60 ans détiennent désormais 60% du patrimoine non financier et 60% du patrimoine financier en France.

Aujourd’hui, l’âge moyen à l’héritage est supérieur à 50 ans et il devrait continuer à être repoussé puisque l’âge des enfants au décès de leurs parents ne cesse d’augmenter.

«À ton âge, j’avais une maison et deux enfants»

L’immobilier est au fil du temps devenu un privilège de l’âge.

Tandis que les primo-accédants d’hier sont devenus de très riches propriétaires, les primo-accédants d’aujourd’hui doivent fournir des efforts financiers toujours plus conséquents pour franchir la barrière d’entrée. Là où le patrimoine des uns se gonfle, les rêves des autres se dégonflent.

La nature et la durée de la jeunesse ont été transformées ; celle-ci est devenue une longue antichambre d’une vie adulte qui tarde à s’établir.

Générations scarifiées

À la mi-2020, le nombre de jeunes en décrochage complet a atteint un pic historique avec pas moins de 1,7 million de Français âgés de 15 à 29 ans n’étant ni en emploi, ni en études, ni en formation (taux NEET).

Tous ceux qui ont quitté l’enfance durant cette crise ne sont pas (encore) une génération sacrifiée, mais sont assurément déjà une génération scarifiée… Avant même d’avoir atteint la quarantaine, nous avons déjà subi les deux plus grandes crises économiques de l’après-guerre.

La jeunesse d’aujourd’hui est confrontée à «4P» autrement moins reluisants que paix, prospérité, plein-emploi et progrès: la pandémie a échangé sa liberté contre une crise ; le «papy-boom» prend toute la place, et elle aborde la vie adulte sous l’étoile de la pauvreté. Le quatrième P en est la conséquence politique, celle d’un populisme qui braconne allègrement sur les terres de son désespoir.

Chapitre 3. DE LA DÉMOCRATIE À LA GÉRONTOCRATIE

À force d’être boudés par des décideurs rivés sur un électorat vieillissant et mobilisé, les jeunes semblent se résigner au choix de la radicalité politique ou de la renonciation démocratique.

L’abstention ou l’extrême

Les jeunes sont les électeurs qui s’abstiennent le plus mais aussi ceux qui sont le plus fréquemment intermittents – pratique électorale consistant à ne participer qu’à un des deux tours d’un scrutin.

Les plus de 50 ans détiennent désormais la majorité absolue parmi les 48 millions d’électeurs en âge de voter que compte la France.

Papy-boomer fait de la résistance

Que ce soit pour la gestion de la crise sanitaire, la réforme des retraites, la refonte de la CSG ou celle de l’aide médicale à domicile, les bonnes intentions politiques ont toutes fini par s’écraser sur le mur électoraliste du «grand vieillissement». Les mesures d’équité intergénérationnelle semblent être systématiquement condamnées aux rétropédalages pour ne pas fâcher les électeurs âgés.

Rancune et rancœurs intergénérationnelles

L’addiction de toute une génération aux écrans et aux réseaux sociaux va devenir un gigantesque problème de société et de santé publique dans les années à venir mais, qu’on le veuille ou non, c’est par ces filtres que le nouveau peuple de citoyens forme ses opinions, souvent via des influenceurs TikTok plus connus que les hommes politiques au pouvoir.

La colère et l’inquiétude de la jeunesse à la sortie de cette crise historique sont devenues les graines d’une rancœur générationnelle qui pourrait bien, à terme, germer en rancune.

Un vent mauvais souffle sur la jeunesse occidentale prise d’une poussée de «wokisme» ; idéologie de la soi-disant «conscience éveillée» qui est en réalité un totalitarisme déguisé en progressisme.

Déconsolidation démocratique

Ce qui transparaît est moins un conflit de valeurs entre générations que des jeunes en demande des mêmes chances dans la vie que leurs aînés.

Le vrai risque d’une jeunesse en détresse n’est pas tant celui de la transformation de sa rancœur en rancune, qui déboucherait sur une pseudo-guerre des générations, mais pire encore, celui d’une déconnexion des nouveaux citoyens avec la démocratie.

À force d’être oubliés, malmenés par les choix politiques, économiques, et dernièrement sanitaires… les jeunes risquent de se venger, au mieux en se tournant vers des irresponsables, au pire en tournant carrément le dos au capitalisme, aux valeurs libérales et à la démocratie.

Chapitre 4. DOMPTER LE «GRAND VIEILLISSEMENT»

Le constat des nombreuses difficultés de la jeunesse n’est pas le résultat d’une volonté groupée et préméditée de la mettre à mal ; il est la conséquence d’une procrastination réitérée depuis quarante ans et surtout d’un refus patent de regarder notre démographie dans le blanc des yeux.

Que faire? Quatre choix s’offrent à nous: le déni, le bricolage, l’attente, l’audace (favorisant l’action immédiate par des mesures concrètes et efficaces).

L’autonomie à tout âge

Partager le fardeau, renvoyer l’ascenseur

Par la mise en place d’un système de retraite universel en comptes notionnels qui établit un lien clair et direct entre le niveau de cotisations et le niveau de pensions. Chacun bénéficierait d’un compte personnel de retraite où s’accumuleraient les droits acquis pendant la vie active.

Faire circuler le patrimoine entre les générations

Un patrimoine improductif dans des mains de plus en plus âgées a des effets macroéconomiques néfastes. Sa transmission accélérée pourrait faire d’une pierre trois coups: donner un coup de pouce aux jeunes générations, et ainsi un coup de fouet à l’investissement des ménages et à la création d’entreprise.

Conclusion. UNE SECONDE JEUNESSE

En se réconciliant avec ses jeunes, la France peut s’offrir une seconde jeunesse. Contrairement aux poncifs médiatiques, la nouvelle génération n’est pas sacrifiée -pas encore. Elle le deviendra si nous choisissons de sortir de cet épisode sanitaire en persévérant dans le déni et le bricolage, en choisissant de l’abandonner à elle-même, avec les séquelles et la facture de la crise en plus du coût de notre lâcheté collective. Ne sous-estimons plus le prix de l’inaction. Attendre que jeunesse se passe, c’est prendre le risque que jeunesse se défasse. Ce qui nous guette est pire que la guerre des générations, c’est le séparatisme de la jeunesse.

*

LA SOCIÉTÉ TRES SECRÈTE DES MARCHEURS SOLITAIRES de Rémy OUDGHIRI - Ed. PUF

Émetteur du florilège: François C.

Le point commun de tous ces marcheurs solitaires, c’est qu’ils ne cherchent pas à sortir de l’errance mais à y rester. C’est elle qui guide leurs pas. Vers quoi? Telle est la question que je pose et à laquelle ils apportent, chacun, une réponse différente et néanmoins semblable.

Quand je marche, tout m’inspire. Des mondes se lèvent à chacun de mes pas. Sentir sous mes pieds le jaillissement incessant de la vie est un délice. Peu à peu, je traverse la paroi transparente entre deux mondes où le temps ne s’écoule pas de la même façon.

Je flâne pour m’émerveiller. Il y a plein de petites sources d’émerveillements quand on parcourt les rues au hasard: un beau bâtiment, une jolie façade, un tag insolite, un dessin inattendu… Comme dit André Breton, on marche à travers des «forêts d’indices». Pour moi, la ville est une forêt qui fourmille de signes.

Marcher au hasard permet de révéler les choses. Je suis commissaire d’exposition et c’est le principe de l’art de révéler la vie. L’art ouvre les yeux. L’errance aussi.

Marcher au hasard, c’était donc rêver les yeux ouverts et, comme dans les songes, une partie de l’histoire restait dans l’ombre. Rares étaient ceux qui en parlaient. On racontait volontiers ses cauchemars, mais on oubliait ses rêves. En serait-il de même pour l’errance sans but?

Dans le fait de flâner, ajouta-t-elle, il y a une dimension spirituelle. Il est important pour moi d’accueillir ce qui nous dépasse. Je me sens plus proche des personnes qui accueillent que de celles qui agissent et décident.

Il me semble que plus je marche, plus mon esprit s’éparpille au gré du vent et du hasard, et plus mes pensées se font morcelées, complexes, incohérentes. L’instant d’après, au contraire, j’ai l’impression que les phrases dans ma tête se mettent en ordre sans difficulté, et que plus je vais, plus ma démarche devient légère, harmonieuse, cohérente.

Comme les arômes d’une plante au printemps, tous mes sens se libèrent dans l’élan de mes pas: mon corps progresse à un rythme qu’il apprend peu à peu à maitriser, mon imagination s’évade où la conduisent ses désirs et ses rêves, mes yeux s’enrichissent des détails les plus insolites et les plus insignifiants, mon odorat s’imprègne des parfums mêlés du bitume et des fleurs, mes oreilles s’exercent à reconnaitre le bourdonnement incessant de la vie.

J’acquis peu à peu la conviction que les cimetières formaient des sortes de temples pour tous ceux qui marchent au hasard. C’est à l’intérieur de leurs murs que ceux-ci assouvissaient leur besoin vital.

Le moment où elle prenait conscience qu’elle était perdue l’enchantait. C’était une offrande: la plus belle qu’une ville puisse offrir au petit peuple des flâneurs. Il y avait toujours un détail qui retenait son attention et l’entrainait dans une longue rêverie nonchalante. Elle avait constaté que les yeux de celui qui marche au hasard se posent naturellement sur ce qu’il y a de plus beau.

Les couleurs autour de moi ou l’air que je respire sont identiques à ce qu’ils étaient quelques minutes auparavant. Les rues, comme les immeubles ou les magasins, ont conservé leur aspect. Rien n’a changé et cependant je sais, avec la force de l’évidence, que je suis ailleurs. Un ailleurs qui vaut tous les trésors du monde.

L’Errante ne cherchait pas à avoir raison. Elle n’éprouvait aucun besoin de justifier son rapport au monde. Elle ne jouait pas un rôle. Peu lui importait d’être jugée. Elle accueillait ce qui venait: la pluie, le soleil, les pierres, la lumière, le ciel, la vie. Le mot «accueillir», auquel elle avait souvent recours dans la conversation, était peut-être celui qui la définissait le mieux.

Pourtant aujourd’hui je fais tout le contraire. Le contraire de ce que j’ai fait toute ma vie. Je prends plaisir à cette légèreté, à cette absence de but, à ce refus du programme. On n’est jamais déçu quand on part au hasard, on passe toujours un bon moment, car on n’attend rien.

*

Le questionnaire

Vous arrive-t-il de marcher au hasard, sans itinéraire précis?

Si oui, que recherchez-vous quand vous marchez au hasard? Que ressentez-vous?

Qu’est-ce que vous aimez quand vous marchez au hasard?

Vous arrive-t-il de sortir de chez vous ou de votre lieu de travail exprès pour marcher au hasard?

Dans quelle situation, le plus souvent, cette envie naîit-elle en vous?

À quand remonte cette envie chez vous? Êtes-vous capable de dire quand et comment cela a commencé?

Dans quels lieux aimez-vous marcher au hasard?

Aimez-vous le faire dans un cimetière? Pourquoi?

Vous est-il déjà arrivé de le faire avec quelqu’un?

Parlez-vous aux autres de cette pratique qui est la vôtre? Si oui, comment la considèrent-ils?

Avez-vous rencontré des personnes qui, comme vous, aiment marcher au hasard? Si oui, savez-vous pourquoi elles le font?

Pensez-vous qu’il existe beaucoup de gens qui, comme vous, marchent au hasard?

À quoi ressemble pour vous la promenade au hasard idéale? Pourriez-vous la décrire en quelques phrases?

LA FRANCE Déclin ou Renaissance de Philippe ANSEL & Christian SAINT-ÉTIENNE - Ed. Économica

Émetteur du verbatim: François C.

INTRODUCTION

La France est désormais dans une situation critique:

. vice-champion d’Europe pour la désindustrialisation derrière la Grèce,

. champion du monde des dépenses publiques,

. champion du monde de la dépense sociale,

. champion du monde des impôts,

. champion de la dette (État + Ménages + Entreprises),

. champion de l’inactivité parmi les pays développés,

. cancre de l’éducation pour les mathématiques et les sciences.

Chapitre 1 LES CHIFFRES DU DÉCLIN ÉCONOMIQUE FRANÇAIS

  • La désindustrialisation par l’impôt

Les entreprises françaises payent six fois plus d’impôts à la production que les entreprises allemandes.

Les impôts de production sont la principale cause de notre crise de production. La relance de notre industrie ne réside pas dans des aides ou du protectionnisme, mais dans leur suppression. Les industriels français ne veulent que pouvoir affronter la compétition internationale à armes égales.

  • Avec la désindustrialisation, l’appauvrissement relatif du pays

Comme nous produisons moins que dans d’autres pays, nous gagnons moins… Pour augmenter nos revenus, nous devons produire davantage, faire «grossir le gâteau». Il n’y a pas d’autre moyen.

  • La compensation de l’appauvrissement par le record mondial de dépenses sociales (31% du PIB)

Ainsi, au fil des années, on a empilé des dispositifs d’aides qui aboutissent à dissuader de travailler et de progresser dans son travail… L’enchevêtrement de ces dispositifs, leurs contradictions et leurs effets pervers témoignent de la nécessité de revoir de fond en comble la gouvernance de notre système économique.

  • Record mondial de dépenses sociales + mauvaise gestion de l’État = record mondial de dépenses publiques en proportion du PIB

La dérive de notre dépense publique se constate en effet d’abord au niveau de l’échelon territorial avec l’extraordinaire expansion de sa fonction publique territoriale… Ses effectifs ont augmenté presque de moitié en 20 ans!

On observe cette création artificielle d’emplois au niveau des hôpitaux: 3000 hôpitaux en France contre 1400 en Allemagne qui a une population supérieure de 16 millions d’habitants… Comme pour la presque totalité des dépenses publiques, ce n’est pas une question de moyens -les budgets sont là- mais une question de gestion de ces moyens.

  • La France, championne du monde des impôts

L’Etat prélève donc chaque année, sous une forme ou sous une autre, 45,4% de ce que tous les Français produisent contre 38,8% en Allemagne et 28,5% en Suisse.

Évidemment, ce moindre dynamisme des entreprises oblige l’État à soutenir financièrement plus de chômeurs et d’inactifs, l’incite à compenser par des «mesures de pouvoir d’achat», toutes choses qui l’obligeront à dépenser davantage et donc à imposer davantage ou à s’endetter encore plus. C’est un terrible cercle vicieux qui enfonce chaque jour un peu plus notre économie dans le déclin.

  • La France, championne de la dette

Notre dette totale (État + Ménages + Entreprises) équivaut à 3,7 fois le PIB français, donc une hausse de 1% des taux d’intérêt coûte 3,7% du PIB.

  • La France, championne de l’inactivité

Ce record d’inactivité -la France est le pays occidental où l’on travaille le moins- ne découle pas du fait que les Français ne travaillent pas assez, mais du fait qu’un nombre insuffisant de Français travaillent, en particulier:

. les 15-24 ans dont seulement 32,8% sont en emploi contre 49% en Allemagne ;

. les 25-29 ans dont 20% ne sont ni en emploi ni en formation ;

. les 55-64 ans dont 55% sont en emploi contre 73% en Allemagne ;

. les immigrés (9,7% de la population) et les descendants d’immigrés (21% de la population) dont seulement 58% sont en emploi contre 67,5% pour l’ensemble de la population française.

Cette faible activité des Français a d’énormes conséquences économiques… et également de grandes conséquences sociales.

  • La France, cancre de l’éducation pour les mathématiques et les sciences

La France n’amène que 3% de ses élèves au niveau avancé en sciences alors qu’ils sont en moyenne 10% dans les pays de l’UE et de l’OCDE et 15% pour les pays en tête du classement.

  • Remettre à plat toute notre gouvernance publique

Notre gouvernance publique a perdu la tête. Notre État s’est transformé en une gigantesque et folle pompe aspirante/refoulante qui prélève des ressources à des entreprises qui en ont besoin (l’industrie) pour investir et se développer afin de le redonner à des secteurs économiques qui n’en ont pas forcément besoin (la construction, les services) et ce, avec un très mauvais rendement, du fait de ses coûts de fonctionnement élevés.

Chapitre 2 LES RESSORTS POLITIQUES DE NOTRE DÉCLIN ÉCONOMIQUE

  • À partir de 1974, la bureaucratie administrative remplace la technocratie efficace

La technocratie efficace oriente la décision publique par son expertise. La bureaucratie administrative fait prévaloir le droit et la règle… Jusqu’en 1974, la France a connu un développement accéléré grâce à ses entrepreneurs et grâce à une haute fonction publique remarquable par son intelligence, son efficacité et sa diversité.

Cette vision post-industrielle du début des années 2000 était une sottise absolue à l’époque, cela l’est toujours aujourd’hui… Elle a permis à l’ENA de se défaire de l’impératif industriel qui était au cœur des politiques publiques depuis 1945 et d’asseoir ainsi sa domination complète sur l’appareil d’État.

L’industrie est, dans l’angle mort de la vision des énarques, un tabou, car le «meurtre» de l’industrie française est fondateur de la prise de pouvoir par l’ENA.

  • La défaite des partis pro-ouvriers

L’État a clairement opéré un transfert de ressources en faveur du secteur du tourisme aux dépens de l’industrie.

L’aboutissement du cheminement intellectuel et stratégique anti-ouvrier du Parti Socialiste sera la note de 2011 du think tank socialiste Terra Nova qui préconise d’abandonner les ouvriers et de se tourner vers un nouvel électorat urbain.

  • L’absence de véritable alternative politique

En réalité, soumise au magistère moral de la gauche qui s’exerce via les médias dominés par les valeurs dites «progressistes» et aux diktats de la bureaucratie administrative d’où elle est issue, la droite aura rarement mené des politiques économiques de droite.

Dans le meilleur des cas, les gouvernements de droite seront parvenus à stabiliser la croissance de la dépense publique, donc sans pouvoir inverser la tendance et être en mesure d’alléger la surtaxation des entreprises françaises.

  • La captation du pouvoir par la bureaucratie administrative

Il y a désormais une telle osmose entre la haute fonction publique administrative et le pouvoir politique qu’on peut les confondre. Le pouvoir politique apparaît presque comme une excroissance de la haute fonction publique administrative.

  • La domination du Parlement par la fonction publique

La dérive de l’État s’explique en grande partie par le fait que ses intérêts sont devenus ceux de la corporation de la fonction publique, défendus par les fonctionnaires présents à tous les niveaux politiques, ministres, cabinets ministériels, mais également au Parlement.

En réalité, la gouvernance française est détenue par la fonction publique à tous les niveaux.

  • L’impréparation des élites administratives à diriger le pays

L’échec de nos élites administratives est dû avant tout à l’inadéquation de leur formation, de leurs savoirs, avec les trois grandes ruptures qui ont bouleversé le monde, les deux chocs pétroliers des années 1973 et 1979, la mondialisation de l’économie et la révolution technologique qui s’accélère dans les années 1990 face à l’explosion d’Internet. Face à elles, ces élites administratives ont multiplié et répété les erreurs de politique économique.

Une part du drame français réside dans leur «ignorance de leur ignorance» et dans notre ignorance de leur ignorance. Nos élites administratives sont en particulier démunies et perdues face à la révolution technologique. a) Plus que jamais, la révolution technologique fait de l’entrepreneur le moteur du progrès… Elle renforce les capacités d’auto-organisation de la société si bien que la zone d’intervention efficace de l’État se réduit au profit de l’action entrepreneuriale. b) La révolution internet favorise la communication et la coopération horizontale… Cela signifie repenser le rôle de l’État dans un monde horizontal de coopération, réévaluer la place qu’il doit occuper… Il doit se transformer en un État allégé, agile, capable de déléguer, de coopérer, de faire confiance au lieu d’édicter des règles à foison.

  • Avec la domination du politique par l’ENA, le politicien s’est substitué au politique

L’ignorance économique et scientifique de la haute fonction publique administrative la contraint, quand elle descend dans l’arène publique, à développer des tactiques politiciennes faute d’être en capacité de développer une vision politique pour le pays.

L’exemple qui l’illustre le mieux est celui de l’énergie.

  • En échec économique, le pouvoir politico-administratif en est réduit à la seule mise en scène de son action

Le fait que l’on claironne le lancement de ces plans d’investissement, mais jamais leurs résultats, témoigne de leur insignifiance et de leur vocation première de communication et d’occultation de la réalité de la situation: surcroît d’impôts de production sur cinq ans par rapport à l’Allemagne: 70 x 5 = 350 milliards d’euros. Plan d’investissement sur 5 ans = 30 milliards d’euros

  • L’extraordinaire concentration de tous les pouvoirs dans les mains d’un seul homme

Mais au lieu de lui donner une extrême liberté d’action, paradoxalement cette détention de tous les pouvoirs le paralyse par la thrombose et l’embolie, car toutes les décisions lui remontent. Il est donc obligé de s’appuyer sur la haute administration qui ne fera que perpétuer les politiques en place.

Chapitre 3 COMMENT REDRESSER L’ÉCONOMIE DU PAYS?

L’ iconomie entrepreneuriale – avec un «i» comme intelligence, informatique, internet, innovation, intégration- est le fruit de trois nouvelles formes d’innovation, de production, de distribution et de consommation: 1 ; la mutation scientifique et technologique (économie de l’informatique, de l’internet et des logiciels en réseau) ; 2. la mutation capitalistique et entrepreneuriale ; 3. une mutation organisationnelle et comportementale (économie servicielle traduisant une mutation des usages qui privilégie le cognitif sur le physique).

La France n’a pas d’avenir comme grande nation indépendante sans une réindustrialisation dans l’iconomie entrepreneuriale (électronique, pharmacie, informatique quantique, finance, alimentaire, bois doivent également se robotiser, se numériser et s’européaniser).

  • Défaire l’emprise de la fonction publique sur le pouvoir exécutif et le Parlement

Nous sommes parvenus à un stade où l’économie n’est plus en mesure de financer la dépense publique… Le budget 2022 de l’État prévoit 292 milliards de recettes pour 495 milliards d’euros de dépenses. Les recettes ne couvrent que 60% des dépenses.

Le nombre de députés est réduit à 300 et celui des sénateurs à 150 et leurs moyens sont doublés. De plus 20% des députés sont élus au scrutin proportionnel.

Réforme des collectivités locales, réduction massive du nombre d’agences publiques, numérisation de l’action publique dans le cadre de sa réorganisation.

  • Transformer l’État et sa culture

Le meilleur moyen de changer la culture bureaucratique de l’administration est de réformer les modalités de recrutement de la haute fonction publique.

Croire que l’administration d’un pays peut fonctionner uniquement grâce à des spécialistes de la réglementation relève d’une croyance dans une religion dont les énarques seraient les grands-prêtres.

  • Mener des politiques économiques de l’offre

Notre déficit commercial indique qu’il y a en réalité trop de pouvoir d’achat en France

Seul moyen d’augmenter réellement le pouvoir d’achat: produire davantage par l’augmentation des investissements des entreprises et l’augmentation du nombre de Français en emploi.

  • Baisser les impôts de production pour réindustrialiser: une mesure très rentable pour le budget de l’État!

La réindustrialisation du pays est «un Jackpot» pour le budget de l’État.

  • Accélérer le développement des entreprises

Baisser le taux d’IS à 20% ; apporter une garantie au capital investi dans les petites et moyennes entreprises ; inciter fiscalement l’actionnariat de long terme ; permettre aux Français de consacrer 10% de leur cotisation retraite à l’investissement dans des fonds de pension.

  • Plus de Français en emploi

Reculer l’âge de la retraite à 65 ans ; simplifier et activer les aides sociales, en les conditionnant à une formation et à la recherche d’emplois ; restreindre l’immigration non qualifiée hors UE dont le taux d’emploi est particulièrement faible (moins de 50%).

  • Diviser par 2 le nombre de règlements

En vingt ans, le nombre de textes législatifs est passé de 162 000 à 242 000 (+ 49%) et le nombre de règlements de 53 000 à 89 000 (+ 68%).

  • Relever le niveau d’éducation et de formation des Français
  • Créer un grand ministère de l’Industrie, l’Énergie, la Recherche et le Commerce extérieur
  • Les politiques d’offre sont favorables aux finances publiques

Chapitre 4 GÉRER LES ADMINISTRATIONS ET LES DÉPENSES PUBLIQUES

Bien gérer, cela signifie numériser, s’inspirer des méthodes qui fonctionnent ailleurs, dans d’autres pays ou dans les entreprises, c’est comparer ses résultats avec ceux des autres pays, c’est développer des approches globales à la place des approches en silos propres aux organisations bureaucratiques.

  • Numériser l’administration

Cela nécessite de permettre à l’État d’interconnecter ses fichiers en tant que de besoin, et donc de modifier la loi Informatique et libertés de 1978… Les restrictions posées à l’action de l’État dans l’utilisation des données imposées par cette loi sont un handicap majeur pour la réforme de l’État… Les informations pertinentes concernant un administré devraient être immédiatement accessibles à un service de l’État à partir d’une identification forte en complément d’une carte d’identité numérique.

  • Développer une approche globale des enjeux: l’exemple du système de santé

Ces petits hôpitaux visent plus à fournir des emplois qu’à soigner. Il faut réduire drastiquement leur nombre et les remplacer par des maisons de santé, pour faire d’importantes économies et surtout bénéficier d’hôpitaux mieux équipés permettant d’améliorer la qualité des soins.

  • Une idée follement originale: supprimer les doublons dans les administrations

L’État a créé au fil du temps plus de 500 agences publiques. Il faut y ajouter une petite trentaine d’autorités administratives et plus de 400 hauts conseils et observatoires. Leurs effectifs sont passés de 246 000 en 2007 à 458 000 en 2018.

Au-delà de l’inflation des coûts, ce double système Administrations/Agences dilue les responsabilités et crée beaucoup d’incertitudes autour des décisions… Supprimer une partie notable de ces agences permettrait donc de réaliser de très importantes économies tout en gagnant grandement en efficacité, en réactivité et en cohérence.

  • Le chef d’œuvre de la meilleure administration du monde: le «millefeuille territorial»

Cette organisation comporte:

. 13 régions ;

. 22 métropoles ;

. 101 départements en tant que circonscriptions administratives et 93 départements en tant que collectivités territoriales ;

. 14 communautés urbaines ;

. 222 communautés d’agglomération ;

. 1254 intercommunalités ;

. 35 000 communes, soit 40% des communes de l’UE pour une population moyenne de 1800 habitants contre 5500 dans l’UE.

Il y a d’énormes gains d’efficacité et de coûts à réaliser en réformant le millefeuille territorial. En effet, chaque entité de chaque échelon possède son budget, son personnel, ses directions…

Conclusion AU-DELA DE LA PROSPÉRITE, LA DIGNITÉ

Au-delà de la prospérité, le principal enjeu est de regagner notre dignité par le travail, l’accomplissement personnel et collectif, et le rétablissement économique, social et culturel de notre pays.

La faillite ou la renaissance de la France par les deux leviers de la relance productive et de la bonne gestion publique: tel est l’un des enjeux stratégiques majeurs des deux quinquennats à venir (dix années).

 

*

Tomie de Junji Ito - Mangetsu (manga)

Afficher l’image source

Coup de cœur de Cassandra : Tomie est une adolescente jolie, attirante et mystérieuse. Cependant, toute personne prenant contact avec cette dernière développe une obsession envers elle jusqu’au point d’être pris de folie et de l’assassiner brutalement. Malheureusement, elle détient une capacité hors du commun: elle ne meurt jamais et se duplique! En se multipliant et se proliférant tel un virus, de nouvelles Tomie prennent vie au fil des chapitres. 

Coupez-là en deux: deux autres Tomie surgissent pour être aussi manipulatrice, joueuse et monstrueuse que l’originale.

La première œuvre de Junji Ito présente un personnage tout aussi monstrueux que fascinant. Ce tome constitué de plusieurs histoires de Tomie toutes aussi différentes les unes que les autres ne lasse pas. Tomie me fascine car au fil des chapitres on réalise que le concept est éternel et on en veut toujours plus! 

Junji Ito est un mangaka d’horreur qui ne me déçoit jamais!

Pour en finir avec le déclin par P.Artus et MP.Virard - Odile Jacob (actualité)

Pour en finir avec le déclin : les priorités économiques et sociales de la France

Émetteur du florilège : François C.

 En 2022, la question de la remise en mouvement de l’économie et de la société est toujours d’actualité. Il s’agit de transformer la mélancolie qui gagne en énergie collective suffisamment puissante pour redonner confiance, notamment aux classes moyennes et populaires, et sortir le pays d’une sorte d’engourdissement qui se révélerait mortel s’il devait s’installer durablement.

 Ch 1.- Pouvoir d’achat, bas salaires : une affaire de solidarité publique ou de solidarité privée ?

Les Français sont de plus en plus nombreux à rencontrer des difficultés à vivre décemment au quotidien. Beaucoup ne sont pas sortis indemnes des deux années qui viennent de s’écouler. La prolifération des « bad jobs » (personnels de santé, salariés de l’hébergement-restauration, distribution, construction, transports…), mauvaise nouvelle pour le pouvoir d’achat. Augmenter les bas salaires ici et maintenant.

Nos propositions :

  • Redresser le taux d’emploi, bien trop faible en France.
  • Développer la part des « good jobs ».
  • Mieux payer les emplois peu ou pas qualifiés en incitant les entreprises à ouvrir des négociations salariales au niveau des branches dans les secteurs non exposés à la concurrence internationale (hôtellerie-restauration, bâtiment, services à la personne, distribution…).
  • Faire de la pédagogie auprès du citoyen-consommateur…en lui donnant des gages quant à la réorganisation et à la diminution des transferts, donc quant à l’allégement de son fardeau de contribuable.
Ch 2.- Où il est question des prix de l’immobilier, de l’économie de spéculation et de la politique monétaire

La flambée des prix de l’immobilier, symbole des inégalités patrimoniales…Soutenir la demande quand l’offre ne suit pas fait seulement monter les prix : la spéculation plébiscite naturellement la rareté. De Paris à Pékin, la lutte contre les inégalités patrimoniales, immobilières mais aussi financières, fait retour dans le débat public…En France, les inégalités de patrimoine n’ont cessé de se creuser au cours des dernières décennies. Politique monétaire expansionniste, croissance et inégalités. Taux d’intérêt inférieurs au taux de croissance, attention danger ! Politique monétaire : les emprunteurs et les détenteurs d’actifs font la loi. Les questions d’économie politique liées aux inégalités, à la pauvreté des Etats par rapport aux intérêts privés, vont occuper une place centrale dans le débat, et méritent une réflexion nouvelle.

Nos propositions :

  • Renoncer aux politiques monétaires continûment expansionnistes et renouer avec des politiques monétaires contracycliques.
  • Décourager l’investissement dans les actifs spéculatifs et privilégier l’investissement productif.
  • Sortir d’une logique de soutien de la demande de logements pour entrer dans une logique de l’offre.
  • Augmenter l’offre de logements tout en maîtrisant l’artificialisation des sols.
Ch 3.-Formation et compétences, la mère des batailles

Le niveau de connaissances des jeunes Français(es) se dégrade depuis plus de vingt ans (enquête PISA). L’éducation et les compétences au cœur du projet national. La faiblesse des compétences, clé de la désindustrialisation. L’industrie française face à la « qualité allemande ». Créativité, innovation, robotisation, clés de la réindustrialisation et de la croissance. Les difficultés de recrutement s’emballent (bâtiment ; métallurgie/mécanique ; médecins, infirmiers et paramédicaux ; aides à domicile ; réparation automobile ; conducteurs de transports en commun ; métiers de l’alimentation ; maintenance informatique).

 Nos propositions :

  • Accélérer sur la formation des jeunes sans emploi ni en formation ni en études (NEET).
  • Augmenter massivement le nombre de jeunes en apprentissage.
  • Faire de la formation des chômeurs une priorité.
  • Accélérer la formation professionnalisante dans les TPE – PME.
  • Promouvoir les études en mathématiques et en sciences.
  • Organiser efficacement la reconversion des salariés dont les emplois sont menacés.
Ch 4 Pas de transition énergétique réussie sans redistribution vers les plus fragiles

La « nouvelle stratégie de croissance de l’Europe » ne sera pas un sentier semé de roses. Même raisonnée et raisonnable, la transition énergétique s’annonce brutale (à force de ne rien faire ou si peu, nos dirigeants sont condamnés à agir sans délai et sans excès de précaution) et douloureuse (coûts et modifications nécessaires des comportements individuels et collectifs), notamment sur le plan financier. Quatre raisons : 1. Flambée des prix de l’énergie et aggravation des inégalités ; 2. Destruction d’un stock de capital ; 3. Nouveaux investissements mais, dans un premier temps, recul de la croissance ; 4. Augmentation du chômage structurel dans les secteurs concernés. Mettre en place des politiques de redistribution pour les plus fragiles.

 Nos propositions :

  • Corriger la perte du pouvoir d’achat due, pour les plus modestes, à l’augmentation du prix de l’énergie.
  • Accroître la pression fiscale pour financer les investissements nécessaires à la transition.
  • Renoncer à la baisse de la taxation du revenu du capital mise en place au cours des dernières années.
  • Relocaliser la production des équipements nécessaires.
  • Sur le plan européen, faire en sorte que le marché du carbone (Emissing Trading System, ETS) mis en place au sein de l’Union fasse ses preuves.
Ch 5 Refaire de la France une grande nation d’innovation grâce à une nouvelle alliance entre l’Etat et les entreprises

L’investissement net en valeur baisse en France depuis dix ans. Lorsque l’incertitude prévaut, les entreprises préfèrent le cash à l’investissement productif. L’appétit des actionnaires et la préférence pour la rente. Distribution de dividendes et rachats d’actions toujours d’actualité. Le modèle américain Darpa : audace, réactivité, indépendance.

 Nos propositions :

  • Favoriser le développement des actionnaires (actionnaires familiaux ; fonds de pension publics ; ménages) dont les exigences de rentabilité sont plus mesurées.
  • Acclimater Bercy à l’idée que l’Etat peut (et doit) si nécessaire perdre de l’argent public (cf modèle de la Darpa américaine).
  • Développer dans les sphères publiques une approche nouvelle de la gouvernance des projets d’investissement (bottom-up plutôt que top-down).
Ch 6 Concentrer la dépense publique là où elle est la plus efficace

Le « quoi qu’il en coûte » sera difficile à débrancher. La tentation de faire le pari de la croissance pour réduire les déficits. La dette publique française est-elle soutenable ? La renégociation des règles budgétaires européennes s’annonce tendue. Réduire le déficit structurel de la France sera pénible. Efficacité de l’Etat français : un déficit de productivité par tête de 15%. Opérer une taxonomie de la dépense publique, comme on l’a fait pour le « vert ».

Nos propositions :

  • Concentrer la dépense publique là où elle est efficace et privilégier celle dont la rentabilité met à l’abri de la remontée des taux.
  • Eviter à tout prix les impôts (tels les cotisations sociales des entreprises et les impôts de production) qui créent des distorsions trop importantes (compétitivité des entreprises).
  • Négocier le bon réglage européen.
  • Faire en priorité la réforme des retraites.
  • Améliorer l’efficacité de l’Etat.
Conclusion

Il est plus que jamais nécessaire de poser les bons diagnostics et de mettre en œuvre dès les premiers mois du nouveau quinquennat les mesures et les réformes indispensables à la restauration dans notre pays d’une économie compétitive et durable : augmenter les bas salaires et faciliter l’accès au logement du plus grand nombre, réduire les inégalités, accélérer la transition énergétique, moderniser entreprises et administrations (notamment grâce au numérique), investir massivement dans la recherche et l’innovation et maîtriser les finances publiques.

Tu le sais bien, le temps passe de Catherine Nay - Bouquins

Émetteur du florilège : François C.

 

Tu le sais bien, le temps passeUne affaire de famille

Mais, grand classique en politique, le prédécesseur est toujours un incapable et le successeur un imposteur.

Le souverain captif

Chirac n’était pas encore remis de ces sept années écoulées où il avait eu son lot de malheurs.

« En quelques semaines, le bel alezan piaffant s’est métamorphosé en veau aux hormones ».

Le fils préféré

Philippe Séguin

L’équipe gouvernementale comportait quarante-deux ministres et secrétaires d’Etat ! Une armée mexicaine difficile à piloter.

(1995) Il aurait fallu dissoudre après la présidentielle, mais Jacques Chirac avait refusé et cette majorité n’était pas vraiment la sienne.

Le bon plaisir

A 46 ans, Mitterrand est tombé amoureux d’une enfant de 19 ans, sa « merveilleuse fille », comme il l’appelle alors…

Mazarine naît le 18/12/1974

Mais cette vie privée et publique sans entrave qu’il s’était choisie nous parle d’un monde englouti. Mitterrand est mort au siècle dernier, quand les portables n’existaient pas, ni Internet, ni les réseaux sociaux.

Une idée de génie

(1997) Morale de l’histoire : Chirac ayant refusé de divorcer d’avec Juppé, les Français avaient divorcé avec lui… » Jacques Chirac a inventé le septennat qui dure deux ans. »

Celui qu’on n’attendait pas

Cinq ans ! La cohabitation allait durer cinq ans. Quel tunnel ! Les deux acteurs ne se connaissaient pas, n’avaient jamais eu affaire l’un à l’autre. Comment le couple allait-il fonctionner ? Je savais d’avance qu’ils finiraient par se détester.

Jamais Lionel Jospin n’aura réussi à se hisser au rang de fils préféré de Mitterrand. Une déception, une blessure qui en rappellent une autre : celle d’un Philippe Séguin qui n’a jamais pu admettre que Jacques Chirac lui ait toujours préféré Alain Juppé.

Jacques, Lionel, Bernadette et les autres

En janvier 98, le couple Clinton avait frôlé le divorce avec l’affaire Monica Lewinsky.

 Partie II

Europe 1, une famille ébranlée

A Europe 1, Jérôme Bellay n’avait pas l’âme d’un repreneur, il entendait faire table rase du passé. Il ne supportait pas ceux qui existaient avant lui et qui avaient un nom.

Avec la mort de Jean-Luc Lagardère (mars 2003), c’était tout un pan de ma vie de journaliste qui disparaissait.

Les âmes qui montent au ciel

A cet instant, je mesurais peut-être pour la première fois combien mes parents étaient devenus fragiles.

Et voilà que ce passé lui revenait comme un ouragan dans la tête, l’extirpant de ce couloir terrible de l’anonymat où vous plonge la retraite, où l’on doit s’habituer à n’être plus rien dans le regard des autres, à devenir invisible.

La comédie des trente-cinq heures

Martine Aubry, toujours tellement sûre d’elle, au point de se faire affubler du surnom de « la Méremptoire »…a en effet très vite tourné casaque sur les trente-cinq heures.

En octobre 1998, Seillière et Kessler lançaient à Strasbourg le MEDEF.

Entre 1998 et 2005, le Smic horaire a augmenté de 31% avec pour conséquence un décrochage industriel ravageur.

La fêlure plurielle

Mais le Premier ministre Jospin, soucieux de ne jamais heurter sa majorité plurielle, lâchait toujours face aux syndicats, y compris ses amis.

Réformateur, Lionel Jospin ? Oui, mais en ayant lâché sur presque tout.

Rendez-vous à Montretout

1987 : divorce de Pierrette Le Pen

1986 Grâce à la proportionnelle, le Front national faisait son entrée dans l’hémicycle avec 35 députés.

« Jean-Marie Le Pen est un char d’assaut qui n’a pas de marche arrière. » Quitte à verser directement dans le fossé.

Mais qu’est-ce qu’il a Philippe ?

Philippe Séguin demeure pour moi le plus désenchanté, tourmenté, pessimiste, déroutant. En définitive, décevant.

16 avril 1999 Le destin politique de Séguin s’est brisé ce jour-là.

Une carrière au forceps *

(1983) Nicolas Sarkozy devenait, à 28 ans, le plus jeune maire d’une ville de plus de cinquante mille habitants.

Le novice ovationné respirait un parfum de destin. Sa vocation venait de naître. Il en était sûr : il ferait de la politique.

(2002) Faute d’être Premier ministre, Nicolas Sarkozy recouvrait sa pleine liberté pour viser plus haut. Il allait le faire savoir assez vite.

La bienfaitrice

Bernadette Chirac

Quand le plus usé des deux n’est pas celui qu’on croit

(2001) Le moral des Français fléchissait, les socialistes continuaient de rouler des mécaniques.

(PS) A la fin de l’année 2001, chacune de ses composantes avait déjà investi son candidat. Chevènement pour le MDC, Noël Mamère pour les Verts, Robert Hue pour le PC, Christiane Taubira pour le Parti radical de gauche.

Jacques Pilhan l’avait théorisé : « La politique n’est ni une logique ni une morale. C’est d’abord une dynamique. » Traduction : il suffit d’une fausse manœuvre, d’un grain de sable, d’un rien même, pour que les vents porteurs se retournent en bourrasque en pleine face. Prophétique.

Jacques Chirac allait rempiler pour un deuxième mandat après cet invraisemblable concours de circonstances.

Paul Guilbert le magnifique

D’un trait, il saisissait un caractère, une ambiance. Pour moi ses papiers étaient des petits chefs-d’œuvre, sans parti pris ni jugement moral.

Le premier des ministres

Tous les sondages avaient prédit une large victoire à Jacques Chirac. Passer de moins de 20% des suffrages au premier tour (son étiage habituel) à 82,21% au second relevait de l’anomalie électorale. Unique dans l’histoire politique de la Vème, donc dérangeante.

Le rival déclaré

Fin novembre 2003, Jean-Pierre Raffarin était au plus bas dans les sondages, passé de 64 à 33% d’opinions favorables en moins d’un an. Nicolas Sarkozy devenait l’homme le plus populaire de France, avec 60% d’opinions positives.

Nicolas Sarkozy venait de démontrer que l’Etat n’est pas impuissant si le volontarisme et la démocratie marchent de pair.

Ce qui n’empêche pas la gauche de lui coller l’étiquette d’ultra-libéral. Un contre-sens à tout le moins.

Il n’y a plus de petite miette

Maman est partie. Quel vide immense pour moi et mes frères ! Mais sa voix, je l’entends, elle me parle, est toujours présente. Le passé n’efface rien. Je crois aux forces de l’esprit.

Jusqu’à la fin de ma vie, je détesterai les mois de novembre…

L’épreuve Cécilia

(Mai 2005) La vérité est que Nicolas Sarkozy vivait une épreuve dramatique : le départ de Cécilia l’avait anéanti, comme s’il était amputé de la moitié de lui-même. Pas un coup de fatigue, mais un coup de massue, un tremblement de terre.

2005, Annus horribilis

  1. Pour Nicolas Sarkozy, l’année de ses 50 ans et de la brisure de son couple.
Depuis le début de la crise conjugale, Cécilia ne s’était plus jamais placée au premier rang -autre petit caillou blanc. En préambule du discours, Nicolas Sarkozy avait fait sienne cette prière de Michel-Ange : « Seigneur, accordez-moi la grâce de toujours désirer plus que ce que je peux accomplir. »

 Villepin en scène

2006 lui serait moins favorable. Pour marquer sa détermination dans le combat contre le fléau du chômage, obsession française depuis le premier choc pétrolier, il avait concocté une mesure phare avec un membre de son cabinet : le contrat première embauche, le tristement célèbre CPE…L’annoncer sans concertation, avec une totale absence de pédagogie, revenait à prendre un énorme risque, en effet. La mobilisation s’organisait.

Un vaincu de l’amour

Deux phrases avaient retenu mon attention. La première : « Il y a sans doute la bonne solitude, celle de la réflexion, celle qui offre le silence, la sérénité, la liberté » ; la seconde résonnait comme le témoignage d’un homme en grande détresse : « Il y a la solitude poisseuse, celle qui oppresse, qui naît de la privation de l’écoute, du soutien du regard de l’autre, celle qui fait oublier le sentiment d’aimer et d’être aimé. »

Pour la première fois, un président en exercice divorçait. Napoléon avait répudié Joséphine. Cette fois, c’est Joséphine qui répudiait Napoléon.

Avec le Fouquet’s, le yacht Bolloré, les vacances américaines, tout ce qu’il avait dû concéder à sa femme, Nicolas Sarkozy avait complètement raté son entrée en scène et détérioré son image. Ses actes ne correspondaient pas à son discours de campagne, à sa promesse d’un style de présidence irréprochable. Il était devenu le président bling-bling.

Carla, un miroir gratifiant

Le 5 avril 2008, Le Parisien titrait : « Les Français aiment déjà Carla » avec ce commentaire élogieux : « Deux mois après son mariage, Carla Bruni-Sarkozy impose son style : élégante, moderne, intelligente et sympathique. Son allure séduit à droite, son côté aristo-bobo attire les sympathies à gauche. 75% des Français se disaient satisfaits de la première dame. Elle devenait un atout maître pour son mari dont la fougue brouillonne déroutait les Français. »

« Ma vie privée est en ordre », assurait le président.

Le barreur de haute mer

Au second semestre 2008, changement de décor, changement de personnage. On découvrait un leader sur la scène européenne et internationale, capable d’entraîner, à l’écoute, à l’aise, inspiré, reconnu, admiré et fêté.

Nicolas Sarkozy demeure à mes yeux un personnage hors normes, doté de qualités exceptionnelles qui m’ont toujours impressionnée, et de défauts qui m’ont souvent navrée. Ainsi de son inaptitude à maîtriser son verbe et son comportement.

Un Président dit « normal »

François Hollande, c’est l’histoire d’un antihéros à qui il est arrivé des choses extraordinaires. Hormis ses interventions sur le Mali, son comportement après les tueries de janvier 2015 à Charlie Hebdo où il avait convié le monde entier à partager « notre peine », où on l’avait trouvé digne, dans son rôle, c’est un président qui n’a jamais su donner un sens à son action, l’expliquer, en faire un grand récit national. On attendait quelque chose qui n’est jamais venu, et lui a toujours cru que les choses finiraient par s’arranger, que la croissance allait repartir, la courbe du chômage s’inverser. Un optimisme trompeur ou une insondable naïveté ? Sa bonne étoile fut une étoile filante.

Le secret d’Albin

Albin est mort vers 23 heures, le 29 juillet 2020. Je suis assommée, envahie par un chagrin que je sais irréparable.

Albin n’est plus là. Pour moi c’est un vide immense. Quelques mois avant sa mort, un jour que nous étions tous les deux en voiture, soudain j’avais vu qu’il pleurait. « Mais qu’est-ce qu’il y a, mon chéri ? » Il m’avait répondu : « C’est parce que je ne veux pas te quitter. »

Et l’irrémédiable est arrivé. Pour m’imprégner de cette fatalité à laquelle personne n’échappe, je me répète ce qu’il me disait comme pour m’y préparer : « Tu le sais bien, le temps passe. »

Café sans filtre de Jean-Philippe Blondel - L'iconoclaste

Coup de cœur d’Élodie, notre amie libraire: Depuis la réouverture du Tom’s après le confinement, Chloé s’y réfugie chaque jour, discrète observatrice des gens qui passent avec leurs histoires, cette femme avec son fils, ces deux hommes qui se retrouvent, mais aussi Jocelyne, l’ancienne patronne du bar et Fabrice, qui a pris la suite, avec José et ses envies d’évasion…

Un roman frais et léger qui se savoure comme un café en terrasse et qu’on referme avec le sourire !

Le chaos de la démocratie américaine de Ran Halevi - Gallimard

Émetteur du florilège : François C.

Le chaos de la démocratie américaine : ce que révèle l'émeute du capitoleINTRODUCTION

Mais la portée de la journée du 6 janvier va plus loin et plus profond. L’événement aura été le symptôme exorbitant, la flambée imprévisible des tendances à l’œuvre qui consument la démocratie américaine depuis trente ans. Il donne un tour explosif non seulement à la polarisation délétère qui déchire le pays mais encore à la désagrégation des normes civiques, morales et culturelles qui ont longtemps gouverné la société américaine.

Aujourd’hui, la démocratie sert plutôt à faire prospérer deux pathologies formées en son sein aux pôles opposés: d’un côté, le populisme dans sa variante il-libérale, infusé et relayé à flux ininterrompu par les réseaux numériques et les talk-shows radiophoniques ; de l’autre, la révolution identitaire, «différentialiste», racialiste qui a fini par déborder l’enceinte universitaire pour atteindre la sphère politique proprement dite.

I UNE ÉMEUTE SANS REPÈRES

Les images du 6 janvier paraissent d’autant plus saisissantes que cette émeute visait le panthéon de la démocratie américaine, dont les émeutiers souillaient l’enceinte, piétinaient les principes et attaquaient les symboles.

L’événement retentissant qu’est devenue cette émeute sans repères… a aussi son lot de vrais extrémistes, des groupes organisés, décidés de longue main à en découdre.

Les suprémacistes d’aujourd’hui trouvent dans le trumpisme un compagnon de route qui offre à leurs passions délétères une visibilité inespérée.

L’épisode auquel ils prirent part, de près ou de loin, est une manifestation caractérisée d’extrémisme, un outrage aux lois, aux conventions, aux procédures qui gouvernent la vie de la Cité : débats d’opinion, pétitions, manifestations, négociations, compromis…

Le 6 janvier est le rejeton délétère de cette fraternité virtuelle fermentée dans le chaudron des passions et des colères qui lui tiennent lieu d’identité.

II LES SORTILÈGES D’UNE PRÉSIDENCE «ALTERNATIVE»

De toutes les normes démocratiques que Trump a bousculées au cours de son mandat, ces manquements à la pacifique transmission du pouvoir sont d’une gravité comparable à sa dénégation controuvée des résultats de l’élection présidentielle.

Ce fut la conclusion crépusculaire d’une présidence qui ne ressemblait à aucune autre, ballottée par une gestion échevelée, des polémiques et des scandales à répétition.

Donald Trump transféra au domaine public une règle de vie qui l’avait guidé dans la gestion de ses affaires : le mensonge n’est qu’une variante de la vérité, une «hyperbole véridique», une vérité alternative, contingente, un point de vue subjectif, révisable, affaire de moment, de situation, d’opportunité, qu’on adapte, ou abandonne, suivant les nécessités ou la demande.

Donald Trump politisait à son profit l’art débonnaire de «baratiner»…Il en usait libéralement, compulsivement, en multipliant sans compter les imputations approximatives, exorbitantes ou proprement fallacieuses qui visaient non à persuader mais à entretenir justement des ressentiments, des préjugés, des soupçons, des certitudes illusoires, à fort potentiel électoral.

Les années Trump furent une terre d’accueil fertile – un véritable théâtre expérimental – aux nouveaux usages de la très vieille obsession du complot.

Lui seul possédait le secret de fabrication de son personnage… un composé de culot et d’obscénité, de narcissisme et d’autorité, de crânerie et de pétulance, de franchise politique et de cécité morale, réfractaire à toute imitation.

Le «pacte populiste» que Trump a noué avec ses partisans ressortissait à deux mouvements de fond inséparables: la polarisation idéologique et culturelle qui déchirait la société américaine bien avant que lui-même entre en scène et, par ailleurs, déjà évoquée, la haine des «élites» -politiques, économiques, universitaires- qui dépasse la division traditionnelle entre démocrates et républicains.

III INVAINCU

La bataille postélectorale, ruineuse et vaine, dans laquelle Trump entraîna le Parti républicain et une armée d’élus et de juristes obéissait plus à ses impulsions familières qu’à une conception élevée de la justice, ou au bon sens politique et à la moindre analyse rationnelle de ses chances d’aboutir.

Le monde de Donald Trump est structuré par cette distinction binaire entre winners et losers, non pas à proprement parler, mais selon qu’ils savent ou non placarder les signes extérieurs, les artifices flatteurs, de la réussite et de la puissance même lorsqu’ils échouent: «La réalité est secondaire, tout est affaire de perception» (Michael Cohen)

IV GUERRE D’OPINIONS

Trump n’a sans doute pas imaginé, ni peut-être voulu, le drame qui allait s’ensuivre. Mais comment s’étonner que ses sombres harangues contre la Constitution et la trahison du vœu populaire aient mis le feu aux poudres?

Les faits parlent d’eux-mêmes: les déclamations toxiques, les faussetés, les sommations, les insultes, les calomnies proférées sans discontinuité pendant des mois réunirent les conditions qui devaient aboutir à l’explosion.

MISÈRE DES CONVENTIONS

Si le système de freins et de contrepoids pouvait se maintenir si longtemps aux États-Unis dans un équilibre satisfaisant, c’est que les trois pouvoirs, exécutif, législatif et judiciaire, consentaient à les exercer avec une assez grande retenue qu’aucune loi écrite ne prescrivait formellement.

L’infraction aux conventions n’est pas propre à la seule démocratie américaine. Elle participe d’une radicalisation politique que le populisme de droite ou de gauche et le progressisme identitaire et «sociétal» infusent à nos mœurs publiques.

Trump pourra vérifier en temps réel à l’échelle nationale l’étendue des ravages que la fin de sa présidence et ses prolongements auront infligés à l’esprit des institutions: l’affaiblissement dramatique de la confiance spontanée dans les institutions politiques, l’extension légale de la défiance à l’ensemble de la procédure du vote, une judiciarisation massive des contestations électorales, des violences peut-être et, partant, un système fédéral impuissant et perclus, car privé du titre de légitimité primordial qui donne vie à tout gouvernement légal: la sanction irréfutable, et communément acceptée, du suffrage universel.

CONVERGENCES ILLIBÉRALES

Là où le populisme trumpiste et l’idéologie progressiste se retrouvent, c’est dans la représentation belliqueuse de l’ordre des choses, qu’ils cultivent avec ou sans le secours de la théorie: celle d’une société livrée à une lutte perpétuelle, guerre des droits et guerre des mémoires, où chacun désigne à sa guise les dominants, les opprimés, les «élites» de son choix, ainsi que leurs boucs émissaires de prédilection.

Diversitaires et populistes sont également habités par toute une imagerie de compétitions, conflits, haines recuites, assujettissements, humiliations historiques, violences symboliques ou réelles. Les premiers partent de l’individu, les seconds ne réfléchissent qu’en termes de communauté, de genre, de race, mais avec le même esprit réducteur. Pour les uns et les autres, la complexité n’a pas droit de cité : la simplification à l’extrême de la marche du monde est le seul mode possible de le penser, avec, pour chacun, sa manière particulière de se mettre à l’abri de la réalité, son «narratif» propre, ses complots, ses oppresseurs à punir, ses victimes à dédommager.

Le trumpisme comme le progressisme cherchent à instrumentaliser la démocratie représentative pour satisfaire des pratiques qui sapent ses fondements. Et ils usent souvent, pour ce faire, des mêmes moyens : la pression, l’intimidation, la peur, l’exclusion.

Ce refus commun de penser la chose commune autrement qu’en termes essentiellement improbateurs de culpabilisation et de victimisation, avec ou sans le secours de la théorie, rend les deux mouvements à la fois intellectuellement stériles et politiquement redoutables. Dans le monde progressiste, il finit par assécher toute réflexion positive sur le destin de la démocratie américaine, tout en politisant à l’extrême, et en défigurant, l’idée même de démocratie.

CONCLUSION

Ce qui sape la démocratie américaine et ne cesse de la retourner contre elle-même, ce sont moins les dissentiments politiques, propres à toute démocratie, que les fractures culturelles qui les parasitent et les radicalisent ; c’est la manière de concevoir l’être-ensemble national, le passé, le gouvernement de la Cité.

L’assaut du Capitole révéla au monde ses fêlures, que les lendemains de l’événement allaient aggraver. Un an après -et on ne sait pour combien de temps encore-, le 6 janvier apparaît comme une journée sans fin.

*

EN ATTENDANT de GAULLE… de Franz-Olivier GIESBERT - Albin Michel

Émetteur du florilège : François C.

AVANT-PROPOS

Emmanuel Macron a du charisme, avec le sourire afférent, mais il lui manque le caractère. Il biaise, procrastine, finasse, dit une chose et son contraire «en même temps», pour plaire à tout le monde.

Mais force est de constater que, depuis le départ du grand homme, le pays n’a cessé de dégringoler sur la pente du déclin… la France, sereine et immuable, a continué de suivre «la politique du chien crevé au fil de l’eau» comme disait de Gaulle.

Alors que les effectifs de la fonction publique ont progressé, en trente ans, presque deux fois plus vite que ceux de la population active, la France est devenue le pays le plus désindustrialisé d’Europe, avec la Grèce.

De Gaulle invitait sans cesse à prendre de la hauteur, la position « généralement la moins encombrée ». Rien ne sera possible tant que ses successeurs ne s’inspireront pas de son exemple pour sortir enfin de leur bougeotte aboulique de « bourdons sur la vitre ».

MACRON VA-T-IL RÉUSSIR À SE RÉINVENTER?

Quand le feu couve, il est toujours dangereux de jouer avec les allumettes.

L’humanité est au creux d’un carrefour vers lequel dévalent plusieurs camions fous dont les freins ont lâché.

Aux États-Unis comme en France, le duo infernal juge-journaliste dézingue sans cesse tout ce qui bouge, en tout cas à droite. Il ne le fait pas exprès. Il est hémiplégique.

(14/18) Sur les champs de bataille, la France perdit 27% des 18-27 ans.

Après le règne de l’enfant-roi, voici celui du casseur-roi.

Le démago-dégagisme a fait reculer la démocratie.

La morale de tout cela: l’écologie est décidément une chose trop importante pour être confiée aux politiciens ou aux communicants, ce qui revient souvent au même.

Si la France va mal, c’est parce qu’elle vit, à travers le jacobinisme, sous une gouvernance à irresponsabilité illimitée.

Mais la grande absente du logiciel présidentiel, c’est la France éternelle en crise morale, identitaire, métaphysique, qui se demande si elle est encore de son temps.

Philippe Juvin dresse, à travers son récit, un état des lieux accablant du système sanitaire le plus coûteux du monde, qui, pendant la crise, a toujours eu un train de retard, miné qu’il était par une bureaucratie fabriquant de la nuisance pour se donner de l’importance.

COMMENT LA DROITE VA PEUT-ÊTRE S’EN SORTIR?

La droite fait face aujourd’hui à une sorte d’hystérie judiciaire.

La radicalisation d’une gauche sans boussole, de plus en plus islamo-gauchiste, obsédée par les «lois liberticides» ou les «violences policières».

Si la droite a pu sortir du piège, elle le doit à ce qu’on peut appeler la «gauche folle», qui, en sombrant dans le communautarisme, l’islamo-gauchisme, l’obsession anti-policière, est devenue un épouvantail pour beaucoup de Français, comme le montre le fiasco des «escrologistes» et de la France insoumise aux régionales.

LA NOUVELLE INQUISITION

Le propre du totalitarisme est son rapport très aléatoire avec la vérité, qu’il écrabouille sans complexe.

Ce qui est à l’œuvre à Grenoble, c’est bien une entreprise totalitaire qui utilise le mensonge et la terreur intellectuelle.

Force est de constater que, dans ses territoires perdus, zones de non-droit, l’État est marginalisé, ridiculisé, à la ramasse.

Le dhimmi, i.e. le non-musulman, est une sorte d’Untermensch, comme on disait sous le IIIème Reich.

Souvent plenellisés, nos chers confrères seront-ils maratisés dans la foulée? Pauvre presse! Pauvre France!

L’heure est à la mise au pilori si l’on n’appartient pas à la «gauche» tendance Le Monde.

DIRIGER LES FRANÇAIS, QUELLE GALÈRE!

La France est toujours une usine à gaz, à tartufferies, à impostures, à fausses valeurs.

N’a donc pas ému grand monde, sur ce continent, la conquête de l’enclave kurde d’Afrique par le rouleau compresseur turc et ses chars allemands, le tout avec les ex-soldats de Daech et d’Al-Nosra, nos pires ennemis.

(gilets jaunes) Idéologiquement, c’est la fête à Neuneu, avec pour marqueurs le nationalisme, le dégagisme «antisystème», des pulsions d’extrême droite, d’extrême gauche, d’extrême centre.

Force est de constater que l’islam français est troué de partout par le salafisme et ses cousins islamistes, tous hostiles à la République, que l’État a laissés proliférer avec une complaisance insane.

Il y a quelque chose de terrifiant à voir déferler sur la France éternelle de Montaigne ou de Hugo la mode des fadaises américaines standardisées, de la cancel culture au Black Lives Matter, avec leur haine de l’universalisme et leur culte de la proscription, la mise à l’index, la réécriture de l’Histoire, qui nous ramènent aux temps noirs de l’Inquisition.

«IL VENAIT DE LA NUIT… OU LES AVENTURES DE Z COMME…

Il a peur de tout. Des migrants en général et des musulmans en particulier, de l’Amérique, de l’Allemagne, de la mondialisation, du cosmopolitisme, du capitalisme, du libéralisme. Sans parler du féminisme… C’est un héraut de la droite extrême de plus en plus compatible avec la gauche extrême. Une créature étrange, pleine de contradictions, exagératrice, révoltée, fascinée par la force, par le Mal au pouvoir.

Plus la bien-pensance médiatique dénoncera Zemmour avec son hystérie infantile, plus il grimpera dans les sondages.

L’ISLAMO-GAUCHISME VA-T-IL TUER LA GAUCHE?

François Pupponi a écrit un livre formidable sur la progression des islamistes qui prospèrent notamment grâce à la veulerie des politiques de la gauche niqab ; la pleutrerie des parquets judiciaires ; le noyautage des associations d’insertion, permettant de faire financer les militants radicaux par le contribuable.

L’Occident est une forteresse criblée de trous. Pour un peu, on verrait à travers.

L’intellectuel de gauche n’apprend pas. C’est même son signe distinctif. Après s’être fourvoyé en défendant les régimes mortifères de l’Union soviétique et de la Chine populaire, du Cambodge, il continue, ces temps-ci, à tomber dans tous les panneaux, de l’islamisme à l’antiracisme identitaire importé des universités américaines.

Ce rôle de généreux bienfaiteur de l’intégrisme, voire du terrorisme, est désormais dévolu à l’émirat du Qatar, as du dessous-de-table et mille-pattes de l’Orient qui, à force de les mettre partout, risque de se prendre un jour les pieds dans ses jambes et dans le tapis!

Un sondage de l’Ifop pour la Fondation Jean-Jaurès révélait, il y a peu, que 74% des musulmans de moins de 25 ans mettaient l’islam, donc d’une certaine façon la charia, au-dessus de la République. Des chiffres glaçants contredits par les musulmans de plus de 35 ans, qui étaient seulement 25% sur la même ligne.

La vieille pente vichyssoise des élites françaises les a déjà amenées, parfois, à «comprendre» la tuerie de l’équipe de Charlie par des islamistes (relire Despentes ou Plenel). Après chaque attentat, une petite musique nous intime de faire des concessions sur le voile intégral et, surtout, sur le délit de blasphème, auxquels il serait vain, voire honteux, de continuer à s’opposer.

JUSTICE, LES HYÈNES ET LES MOUTONS

En 1940, à part le seul et admirable Paul Didier, tous les juges prêtèrent serment au maréchal Pétain avant d’appliquer sans sourciller les lois d’exception qui faisaient des juifs des citoyens de second ordre.

Est-il sain pour la démocratie qu’une petite coterie journalistico-judiciaire ait droit de vie et de mort sur les élus? La justice, la vraie, n’est-elle pas en train de crever de ce mélange des genres, au profit d’un tribunal permanent qui condamne, comme pendant la Terreur de 1793, à la tête du client?

Au train où vont les choses, il faudra bientôt écrire le mot justice avec des guillemets.

PAYS EN DÉCLIN CHERCHE SAUVEUR

Le spectacle qui s’offre partout, sauf dans les vertes campagnes de la douce France, est celui d’un monde où tout s’affaisse. L’autorité, la culture, l’économie, la bonne intelligence.

Le laisser-aller du pouvoir et la complaisance de la presse bien-pensante, obnubilée par le spectre de l’État policier, se sont conjugués pour engendrer une bête immonde où cohabitent l’extrême gauche, les racistes, les identitaires. Une menace réelle pour la République.

La machine à inepties est en état de marche, il suffit de mettre une pièce dedans. Avec la crise économique qui vient, sa production pourrait bien dépasser toutes les prévisions.

À l’aube de 2021, deux dangers menacent la France: l’américanisation par le politiquement correct (pour la tête) et la soviétisation par l’hyper-bureaucratie (pour le reste du corps).

Pinailleuse et envahissante, la bureaucratie ne fait rien mais elle bloque tout.

Mais, attention, la guerre d’aujourd’hui ne se limite plus au champ militaire. Elle est aussi technologique, économique, environnementale, sanitaire.

PARIS-MARSEILLE, LA DOUBLE MÉPRISE

Quand en finira-t-on avec le caporalisme? Jupiter ne touche toujours pas terre: les leçons de la crise des gilets jaunes n’ont pas encore été tirées par le pouvoir.

La culture du déni, spécialité française, à gauche comme à droite, permet à nos «élites» d’occulter tout ce qui menace notre identité, sinon notre essence: la désindustrialisation, l’acculturation, la montée de la délinquance, l’accélération des flux migratoires, le grand délire de nos dépenses publiques, les plus élevées des pays d l’OCDE. Sans parler de l’endettement de l’Etat, qui culmine désormais à 120% par rapport au produit intérieur brut. Tout cela dans un climat de laisser-aller général, sur fond de perte d’autorité.

La France a-t-elle un Mario Draghi en magasin?

L’EUROPE, INVENTION FRANÇAISE

Faute d’un capitaine à la barre, l’Europe est un canard sans tête, un rassemblement hétéroclite à irresponsabilité illimitée, une carpette sur laquelle tous les politiciens essuient leurs pieds crottés, le bouc émissaire de toutes leurs lâchetés, pleutreries, névroses. Comment voulez-vous qu’elle marche? Et pourtant, comme disait l’autre, elle tourne! Mais dans quel état!

Ne nous lassons pas de répéter, comme tous les bons Européens, ces vérités indélébiles =: la Commission ne compte que 33 000 fonctionnaires, soit la moitié du personnel de la ville de Paris, et son budget représente seulement 1% du PIB européen, 80% étant redistribués aux pays européens!

D’autant que, à en croire Stephen Smith, les ennuis sont devant nous. Au train où vont les choses, il pourrait y avoir sur le Vieux Continent, dans trente ans, 200 millions d’Afro-Européens, contre 9 aujourd’hui.

Devant les perspectives d’immigration massive, l’Europe doit trancher. Ou bien elle devient une «forteresse Europe» inaccessible derrière ses grillages ; ou bien elle se réinvente comme une sorte d’«Eurafrique», sur fond d’universalisme humaniste, ce qui sonnerait le glas du modèle social à l’européenne, un Etat providence sans frontières n’étant pas viable ; ou encore elle tente de survivre avec une politique «de bric et de broc» en suivant plusieurs stratégies à la fois. C’est sans doute ce dernier scénario qui prévaudra. Mais il ne nous mettra pas à l’bri des tempêtes, des coups de vent, des crises…

DINGUE, «LE DONALD»?

ERDOGAN-LA-MENACE

C’est au cours de l’affreux XXème siècle, quand leur espace vital s’est rétréci, que les Turcs furent frappés du syndrome de la purification ethnique et religieuse. Ils ont ainsi exterminé 1 200 000 Arméniens lors du génocide perpétré de 1915 à 1916, liquidant les deux tiers d’une population qui habitait cette terre depuis des temps immémoriaux, bien avant que les Turcs l’envahissent et se l’approprient.

Chacun ses juifs. Erdogan persécute les 15 millions de Kurdes de Turquie tout en essayant de massacrer, à intervalles réguliers, les 2,5 millions qui vivent encore de l’autre côté de la frontière, en Syrie: coupables d’avoir mené le combat contre Daech qu’il soutenait en douce, ils sont à ses yeux des «terroristes».

Erdogan ne cache pas ses intentions, l’Empire ottoman est de retour, tout le monde est prévenu: les Arméniens, les Kurdes, les Grecs et les Européens, dont il contrôle quasiment la pratique de l’islam par associations interposées. Tous les grands criminels de l’Histoire ont toujours annoncé la couleur, c’est même à ça qu’on les reconnaît.

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HUMAN PSYCHO - Comment l’humanité est devenue l’espèce la plus dangereuse de la planète de Sébastien BOHLER - Ed. Bouquins

Émetteur du verbatim: François C.

Première partie Les piliers de la folie

Pour produire les destructions monumentales qui avaient cours tout autour du globe, il avait fallu que tout le monde s’y mette. Que 8 milliards d’humains, aux commandes de dizaines de milliards d’automobiles, de téléphones, d’avions, d’usines ou d’ordinateurs, se comportent tous ensemble avec la planète comme un essaim ravageur vis-à-vis d’un champ de blé ou de luzerne.

Il avait fallu que collectivement nous soyons entraînés à faire des choses qu’individuellement aucun de nous n’aurait souhaité faire.

C’est finalement la recherche de nouveaux besoins et la course à l’innovation technologique qui décident de l’évolution du monde et de son impact sur l’environnement naturel. Les retombées de ce jeu qui se déploie d’après ses propres lois, ce sont les individus qui en font les frais et qui malgré eux en perpétuent la dynamique.

Une des lois essentielles de l’univers. À savoir que les propriétés d’un système sont, le plus souvent, totalement différentes de celles de ses composants… Ce livre postule que l’humanité est une entité qui se développe, qui agit et qui «pense» de manière autonome. Son fonctionnement est potentiellement très différent de celui des individus humains.

Les quatre caractéristiques fondamentales de l’humanité (sur le plan du langage, de la cognition, de l’émotion et de l’action). Nous avons devant nous un être à l’ego démesuré, doté d’une incroyable aptitude à manipuler les autres, d’une absence totale d’empathie et d’une tendance à agir de manière instantanée et sans tenir compte des conséquences.

Psycho I Human ego

Dès les premiers instants, l’humanité se dépeint comme au-dessus. Au-dessus de tout. Des plantes, des animaux, des roches, des océans.

Le cortex orbitofrontal, zone clé de la psychopathie… Logiquement, les individus dont le cortex orbitofrontal a été détruit sont incapables d’intégrer l’existence des autres dans leurs raisonnements et leurs agissements. Comment le pourraient-ils? Ils ne savent pas comment agir et penser d’une manière acceptable socialement.

Où est le cortex orbitofrontal de l’humanité? La réponse est simple: elle n’en a pas -ou bien, si un jour elle en a eu un, il a dû recevoir une grosse barre à mine en pleine tête… La collectivité humaine, cette chose tentaculaire qui exploite, essore et abandonne tout ce qui lui tombe sous la main, sans l’ombre d’un remords, sans le début de la moindre interrogation.

Psycho II Human techno

Aujourd’hui, on estime qu’environ 1% de la population remplit les critères de psychopathie.

Toujours opère entre nos mains le même principe: du sous-sol de la Terre à la Lune en passant par les nuages, l’espèce humaine décompose, exploite, utilise, convertit, instrumentalise tout, y compris le cœur du vivant.

Pour l’humanité, la nature est une proie. Tout ce qui s’y trouve a par définition une utilité.

Les défaillances du cortex orbitofrontal poussent à se servir d’autrui, à tromper et à mentir… Mentir, tromper, dissimuler, manipuler, tout cela fonctionne ensemble. Et suppose de déconnecter son cerveau orbitofrontal.

Les pannes du cortex orbitofrontal se traduisent par une ignorance morale (tendance à agir en considérant autrui comme un moyen) accompagnée d’une absence de culpabilité.

L’humanité agit vis-à-vis des espèces animales, des ressources naturelles, des lacs et des rivières en les instrumentalisant, à la façon d’un prédateur, sans une once de culpabilité. Dès lors, le monde, devenu système, se meurt.

Psycho III Human monster

En quoi l’humanité remplit-elle les conditions d’un tel manque d’empathie? Dans les rapports entre l’espèce sapiens et la nature, sapiens est le bourreau, et la nature est la victime.

L’histoire de l’émergence de l’homme est donc celle d’une perte progressive d’empathie pour les autres formes de vie.

Psycho IV No future

Dans sa façon d’agir envers la biosphère, les espèces animales, les forêts ou les ressources naturelles, l’espèce Homo sapiens ne se pose presque jamais la question des conséquences. Ou, si elle les présuppose, elle les ignore délibérément et n’en tient pas compte pour modifier ses décisions présentes.

Le système même de production et de consommation des biens matériels, bien au-dessus des consciences et des actions individuelles, est fait pour agir dans l’instant, de manière impulsive, sans prendre en compte l’avenir à long terme.

Au fil du temps, nous avons donné naissance, par nos inventions, par nos moyens de communication et de transport, par nos lois et nos traités internationaux, à un super-être qui ne réfléchit pas à l’avenir. Sa puissance n’a d’égale que son inconscience. Son caractère, celui d’un ego démesuré qui se croit au-dessus de tout, qui ne pense qu’à exploiter la nature, qui n’éprouve aucune compassion ni empathie pour les êtres qui le peuplent, et qui se moque éperdument de ne laisser derrière lui qu’un champ de ruines. Même s’il doit lui-même y laisser sa peau.

Deuxième partie La source du mal

L’empathie a tendance à vous faire préférer aider une personne qui vous ressemble plutôt qu’une personne dissemblable.

Simplement, ces résultats révèlent qu’une force biologique sélectionnée par des millions d’années d’évolution, avant même l’émergence de l’humanité, tend à nous faire éprouver de moins en moins d’empathie vis-à-vis d’une personne, à mesure qu’une personne nous est de moins en moins semblable.

Dès qu’un groupe social est affublé des qualificatifs de sale, repoussant, dégoûtant, inférieur, le cortex préfrontal ventromédian, qui inclut le cortex orbitofrontal, s’éteint entièrement.

Nous, humains, sommes en grande partie des êtres mimétiques. Nous nous définissons par notre groupe d’appartenance et par notre entraide à l’intérieur des limites de ce groupe. C’est pourquoi la déshumanisation est le corrélat inévitable de l’humanité ; elle se mesure couramment au sein même de nos sociétés.

Dans ce contexte, l’empathie préférentielle conduit à deux effets: d’une part, une hausse de l’empathie des humains à l’intérieur du groupe humain (qui constitue désormais l’endogroupe), d’autre part un effondrement de l’empathie des humains pour les autres formes de vie qui forment désormais un exogroupe.

L’histoire de notre espèce montre que l’empathie à l’intérieur des frontières de l’humanité n’a fait que s’accroître au fil des siècles, tandis que vis-à-vis du monde animal et végétal elle se mourait.

Nous vivons toujours et plus que jamais dans la sacralité de notre espèce, mais l’homme de Vitruve ne règne à présent que sur un monde desséché d’où s’élèvent des colonnes de fumée noire. Et le voilà condamné à devoir répondre, dans l’avenir, à des questions insolubles.

Troisième partie Stopper le psychopathe

Mais le jour où les Biden, Poutine, Xi Jinping comprendront que leur ennemi commun est cet organisme malade qui les conduit au bord du précipice, comme le joueur de flûte de Hamelin, peut-être décideront-ils des statuts d’une instance régulatrice informatisée globale qui sanctuarisera les ressources fossiles de la planète en les dispensant de se concurrencer en permanence. Le psychopathe global sera alors domestiqué par un cortex orbitofrontal digne de ce nom.

Homo sapiens n’est pas la huitième merveille du monde mais un poison à pénétration lente et sournoise. L’humanité est responsable de la sixième extinction de masse de l’histoire de la vie depuis quatre milliards d’années… Elle a évolué d’un stade d’hominidé relativement inoffensif vers celui de méga-organisme toxique et invasif capable de réduire à néant des millions d’hectares de forêts et de recouvrir la surface des océans de plastique tout en saturant l’atmosphère de gaz toxiques.

L’humanité est une masse autoorganisée qui ne sait que produire des flux de matières, extraire, recracher et croître. Elle ne possède pas de représentation de l’avenir. Il lui manque une structure mentale décisive pour cela.

De la Renaissance à la révolution industrielle, de Descartes aux OGM, notre vision du monde nous prépare à un état agentique vis-à-vis de la nature. Au point que le fantasme de solutions technologiques à l’effondrement planétaire en autorise certains à tout détruire. Pour la nature elle-même, c’est une mauvaise nouvelle. Et le plus terrible est que personne ne prendra sa défense ; il n’y a pas de procès de Nuremberg de la nature, parce qu’elle n’est pas un sujet humain.

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La Cabane Magique, tome 1, La vallée des dinosaures de Mary Pope Osborne - Bayard Jeunesse (Roman jeunesse)

Coup de cœur de Lena, petite stagiaire de la semaine : Tom et sa sœur Léa vont découvrir près de chez eux, dans le bois de Belleville, perchée en haut d'un chêne, une cabane remplie de livres. Cette cabane s'avère être une cabane MAGIQUE ! En ouvrant un des livres de la cabane, un ouvrage sur les dinosaures, puis en posant son doigt sur une image de dinosaures et en souhaitant de voir ce dinosaure, Tom fait voyager la cabane dans le passé!

Tom et Léa se retrouvent donc à l'époque des dinosaures, cette aventure extraordinaire leur réserve bien des surprises et ils vont apprendre beaucoup de choses sur ce monde peuplé d'animaux disparus. Au cours de cette expédition un mystère apparaît : à qui peut donc appartenir cette cabane? Pour ça Tom et Léa doivent trouver des indices.

J'ai vraiment aimé ce livre, il m'a fait découvrir un aspect de fantaisy qui nous emmène dans différents mondes et donne envie de découvrir le propriétaire de cette fameuse cabane. Plus on lit de tomes plus les indices augmentent, pour ensuite arriver à la réponse.

Les infiltrés de Matthieu Aron et Caroline Michel-Aguirre - Allary (essai)

Émetteur du verbatim : François C

Les infiltrés : comment les cabinets de conseils ont pris le contrôle de l'EtatLes sommes versées aux cabinets de conseil oscillent entre 1,5 et 3 milliards d’euros par an. Soit, au plus haut de cette moyenne, l’équivalent du budget du ministère de la Culture.

Chapitre 1 Covid : les grands cabinets à la manoeuvre

On peut quasiment suivre au jour le jour l’immixtion des cabinets de conseil dans la manière dont l’Etat a géré la crise. Mais aussi, les failles de la puissance publique, son attentisme, ses non-dits, et, surtout, ses moments de panique.

La sidérante facture de McKinsey : le total de la commande atteint le montant vertigineux de 10,7 millions d’euros en moins de dix mois. Ceci témoigne de la perte de savoir-faire du ministère de la Santé dans la gestion de la crise.

Le Covid a agi comme un miroir grossissant sur l’affaiblissement des services publics concomitant de l’envolée du consulting, l’un accélérant l’autre et vice versa.

Chapitre 2 L’irrésistible ascension des consultants

Sous le gouvernement Fillon, des centaines de consultants déferlent dans les ministères : Justice, Intérieur, Ville, Economie, Immigration…

Interventions des consultants dans l’Administration : ils ne prennent jamais l’avis des citoyens qui sont pourtant à la fois les payeurs et les usagers du service public.

Les cadres des ministères, moins nombreux, pressés en permanence par des urgences politiques changeant au rythme des gros titres des chaînes d’info, harassés par le reporting, qui s’ajoute à l’empilement des normes et des règlements, ne vont plus cesser de solliciter des prestataires extérieurs.

Chapitre 3 Un consultant à l’Elysée

Emmanuel Macron, super consultant ?…Dès son entrée au gouvernement sous François Hollande, il s’est appuyé sur les grands cabinets de conseil.

(Présidentielle 2022) Recueil de data, traitement des données, mise en œuvre de préconisations. Un second grand audit pour alimenter le programme de la Macronie. Le process est bien rodé. Et les consultants sont toujours à bord.

Chapitre 4 Grandes écoles et think tanks sous influence

Les cabinets de conseil utilisent ces rencontres pour identifier les donneurs d’ordre de la commande publique. Avec les fonctionnaires qu’ils ont repérés et démarchés, ils agissent en amont et bâtissent des projets de réforme, se trouvant alors en position d’influer voire de participer à l’écriture des appels d’offres nécessaires à la réalisation de la réforme.

Chapitre 5 Grands corps malades

Mettre un pied dans la porte, tisser sa toile, se rendre indispensable…Cet entrisme est facilité par la porosité devenue la règle entre la « caste » des hauts fonctionnaires et la nouvelle « aristocratie » des consultants.

Entre un tiers et la moitié des membres de l’Inspection des finances -la crème de la haute fonction publique, dont les agents sont sortis premiers de l’ENA- pantouflent. Ces adeptes des allers-retours entre le public et le privé semblent aujourd’hui plus soucieux de leur carrière que de l’intérêt général. Grands corps malades !

L’amateurisme de l’Administration culmine dans un secteur d’activité crucial, celui de la numérisation de l’Etat. Le nombre de fonctionnaires qui travaillent dans les directions informatiques des ministères est dérisoire.

Chapitre 6 Numérique : l’Etat a perdu le contrôle

Dans nombre de ministères, la numérisation des services de l’Etat a des allures de gouffre sans fond, avec, à chaque fois, des sociétés de conseil à la manœuvre.

Les informaticiens « publics » sont aujourd’hui 17 000, sur un total de 2,5 millions de fonctionnaires. Soit 0,68% du personnel d’Etat…Parmi ces informaticiens de l’Administration mal payés, peu considérés et insuffisamment formés, combien savent réellement coder ? Quelques centaines, tout au plus. Peut-être encore moins, assurent ceux qui connaissent l’impéritie de ces services.

Ces « entrepôts de données » devenus indispensables à tous les échanges, étant aux mains de sociétés américaines, cela signifie très concrètement que lorsque McKinsey, Roland Berger ou le BCG sont missionnés par l’Etat français pour travailler dans la Défense ou à Bercy, ces cabinets de conseil risquent de stocker toutes les données auxquelles ils ont eu accès dans un cloud américain. Le souci est que les Etats-Unis pourraient, un jour, exiger d’en prendre possession en raison d’une loi extraterritoriale, le Cloud Act, que Washington a adopté en 2018.

Chapitre 7 L’hôpital malade de son administration

Au point que tenter de répertorier tous les contrats de conseil conclus par les organismes en charge de la santé publique en France donne vite le tournis.

Conséquence de cette politique, entre 2000 et 2020, la France a perdu 80 000 lits d’hospitalisation.

A la rentrée 2021, 20% des lits d’hospitalisation ne pouvaient être utilisés faute de personnel.

En attendant des jours meilleurs, l’hôpital concentre tous les effets pervers du consulting : promesses d’économies à court terme, mais apparition de surcoûts à long terme (surcroît de personnels administratifs, absentéisme, etc) qui fragilisent le service public et constituent autant d’opportunités pour le secteur privé.

Chapitre 8 Des consultants cinq étoiles

En mars 2018, Pierre de Villiers, ex CEMA (chef d’Etat-Major des armées), intègre en qualité de senior advisor le Boston Consulting Group.

Après la fin de la guerre froide et la disparition d’une menace immédiate, la France a, année après année et comme d’autres pays occidentaux, réduit le format de ses forces militaires. De 1960 à 2020, les budgets afférents ont été divisés par trois. Et les effectifs de l’Armée de terre par dix, passant de 1 million à 100 000 hommes. Ce changement de paradigme a contribué à l’émergence d’un immense marché privé de la sécurité et permis un recours massif à l’achat de services.

Issus des trois corps et présents sur l’ensemble des bases militaires, ces experts des télécommunications, au nombre de 7000, installent tous les systèmes d’information de la Défense, dont ils assurent aussi la maintenance. Un rôle primordial. Pourtant, en trente ans, plus de la moitié des effectifs a été supprimée tandis que les besoins informatiques s’accroissent toujours davantage, et une partie des activités préalablement accomplies par ces techniciens a été transférée à des acteurs privés.

Chapitre 9 Justice et police menottées

Tous les magistrats le constatent : des fonctions judiciaires, surtout dans le domaine de la justice civile, sont en passe d’être totalement externalisées tandis que de nouveaux marchés s’ouvrent pour les cabinets de juristes ou d’avocats.

Au 1er janvier 2020, selon l’Observatoire international des prisons, 71 établissements pénitentiaires sur un total de 187 ont été partiellement privatisés.

Le ministère de la Justice, relève la Cour en octobre 2021, « a accumulé un retard considérable par rapport aux autres ministères ou à ses homologues européens : équipements obsolètes, logiciels anciens qui communiquent très peu entre eux au sein du ministère, gouvernance informatique en souffrance, très faible niveau de protection des systèmes, incapacité de la justice à disposer d’informations fiables pour conduire le changement. »

La Justice est sous-dotée en informaticiens (environ 500 personnes) et se trouve à la merci des cabinets de consultants qui, faute de suivi effectif, peuvent dégager des marges indécentes.

Chapitre 10 Bercy : consultation à tous les étages

La lecture de cet accord-cadre de février 2021 renvoie l’image d’une Administration étrangement famélique. Les compétences recherchées couvrent en effet un très vaste champ : audit financier, diagnostic industriel, écriture des plans de retour à l’équilibre, restructuration financière, recherche de repreneurs ou de solutions de réindustrialisation, expertise juridique.

Mais il est quand même fascinant de voir un Etat déléguer au privé une mission par nature éminemment politique. Faire des économies revient en effet toujours à faire des choix. La « consultodépendance » atteint ici un seuil critique.

Chapitre 11 Matignon : un sondage toutes les quarante-quatre heures

Entre le 5 mars et le 28 mai 2020, le gouvernement a commandé, pour 1 million d’euros, trente-trois études qualitatives et douze questions hebdomadaires pour mesurer la popularité de l’exécutif, soit un sondage toutes les quarante-quatre heures !

Conclusion

Les Infiltrés ne connaissent pas de frontière. Et la France n’est pas le seul pays avide de conseils, ne faisant que suivre les Allemands et les Britanniques qui, en Europe, en ont été les premiers, et les plus gros consommateurs.

Chaque jour, les citoyens constatent l’écart grandissant entre la charge des impôts et la qualité des services publics.

Il ne s’agit pas de bouter hors de l’Etat jusqu’au dernier des consultants. La priorité consiste à stopper un processus de privatisation larvée afin de bâtir un futur commun. Ministres et hauts fonctionnaires doivent en urgence se « désintoxiquer » du consulting, réapprendre à penser par eux-mêmes, et cesser d’être les faire-valoir des grands cabinets américains. C’est au prix de cet effort qu’ils redeviendront ce qu’ils n’auraient jamais dû cesser d’être, d’authentiques responsables politiques.

Arrêtons de donner autant de pouvoir et d’argent aux grandes sociétés de consulting.

Le retour de la guerre par François Heisbourg - Odile Jacob (essai)

Émetteur du verbatim : François C

Le retour de la guerreChapitre I LA PANDÉMIE COMME ACCÉLÉRATEUR DE L’HISTOIRE

Sur sa durée depuis décembre 2019, il s’agit bien de la pandémie la plus meurtrière en l’espace d’un siècle. Mieux valait être riche que pauvre, bien nourri qu’obèse ou démuni, convenablement logé que condamné à la promiscuité, membre du groupe dominant que victime de discriminations ethniques ou religieuses. Mais jusqu’à quand et jusqu’où cet « argent-hélicoptère » est-il possible ? Nous manquons de précédents par rapport à la combinaison en 2020 – 2021 de l’envolée de l’endettement public, d’interventions sans limites des banques centrales, de quasi absence d’inflation, de taux d’intérêt voisins de zéro et d’envolée du cours des actifs boursiers. Socialement et éventuellement politiquement, la pandémie voit s’accumuler la poudre des explosions futures.Un facteur commun relie entre elles toutes ces réponses sanitaires, économiques et sociales à la pandémie, c’est le renforcement du rôle de l’État sous toutes ses formes, qu’il soit prescripteur, régulateur, ordonnateur, répressif. Simplement, il ne faut pas confondre crise de la mondialisation et crise, par ailleurs bien réelle, de la démocratie, largement imputable justement à l’accroissement des inégalités et de la précarité. Maîtriser et encadrer la mondialisation tant chinoise qu’américaine est au contraire une des conditions d’un regain démocratique. Loin d’être un sujet pour geeks, le domaine numérique et cybernétique est devenu une des clés des relations entre pays. Pendant la pandémie, de façon passablement chaotique et parfois sans cadrage clair, les freins à la circulation des personnes ont été mis en place à l’intérieur de la zone Schengen. Tests PCR obligatoires, quarantaines plus ou moins dures, voire fermetures complètes de frontières se sont multipliées. Le fait est que la pandémie a d’ores et déjà exacerbé la lutte entre les deux principaux pôles de puissance de la planète : la logique est celle de la Covid comme accélérateur de l’Histoire. La pandémie laisse dans son sillage un monde plus divisé et polarisé, dans lequel les facteurs de désordre et les égoïsmes se sont trop souvent donné libre cours, offrant un champ libre aux instincts de conservation et aux appétits de prédation. Dans l’immédiat, elle a exacerbé la confrontation entre les deux superpuissances et les modèles de gouvernance et les valeurs idéologiques que chacune incarne.

Chapitre II CHINE – ÉTATS-UNIS : LES SUPERPUISSANCES ET LA GUERRE

La superpuissance américaine a de beaux restes, et pas seulement dans le domaine militaire. Le positionnement confrontationnel des deux superpuissances sera fait au mieux de rivalité tant idéologique qu’économique et stratégique. Au pire, la confrontation exclura toute stabilisation des relations dans la durée et pourrait déboucher sur la guerre directe ou indirecte, massive ou limitée. Dans tous les cas cependant, les relations internationales de chaque État sont contraintes par les données de politique intérieure, que celles-ci soient le produit de processus démocratiques, comme le Brexit britannique ou le « Make America Great Again ! » de Donald Trump, ou le fruit d’autres logiques : autoritarisme poutinien ou léninisme chinois. Cet impératif qu’est pour la Chine l’unité et cette priorité qu’est la lutte contre le séparatisme n’ont pas, ou plus, leur équivalent du côté américain : si la guerre de Sécession a laissé de profondes plaies en termes de relations raciales, le séparatisme n’est plus un sujet. Il y a là une asymétrie qui pourrait s’avérer belligène. L’Amérique de Biden entend organiser politiquement et stratégiquement le système international, et plus spécialement l’immense aire Indo-Pacifique, autour de la défense et l’illustration de la démocratie. Contrairement aux États-Unis, la Chine n’a pas de réseau d’alliances de sécurité et de défense sur lequel s’appuyer et à partir duquel se projeter. L’Empire britannique à son apogée de la fin du XIXème siècle préfigure à bien des égards les nouvelles routes de la soie à la fois maritimes et terrestres, commerciales, informationnelles, stratégiques et, le cas échéant, militaires. Au quotidien, une sorte d’infra-guerre existe d’ores et déjà entre la Chine et les États-Unis. Cyber-opérations de toutes sortes, à des fins de renseignement, d’entrainement, de rançonnement ou de sabotage, ne sont certes pas le monopole des superpuissances, mais elles en font sans surprise un usage substantiel, le cas échéant en soutien d’opérations informationnelles, sur le registre des fake news et autres « infox »…Ce champ de bataille est extraordinairement propice aux dérapages et à des processus d’escalade pas forcément prévus. Dans la grande région Indo-Pacifique, nous sortons de ce qui ressemblait aux compromis stabilisateurs de la guerre froide vers une rupture incertaine et instable du statu quo. En tout état de cause, l’ordre stratégique dans la grande région Indo-Pacifique a perdu la stabilité qu’il possédait depuis les années 1970 et il n’a pas la robustesse que possédait l’ordre bipolaire de la guerre froide. Pour les pays européens, un bouleversement dans la région Indo-Pacifique au profit de la Chine et aux dépens du système d’alliances américain aurait d’immenses conséquences, que cela passe par la guerre ou par la menace du recours à la force.

Chapitre III LA DÉMOCRATISATION DE LA GUERRE

Si un conflit entre la Chine et les États-Unis est désormais au centre des risques stratégiques à l’échelle de la planète, la guerre elle-même change de nature, dans ses moyens comme dans sa pratique. Il est possible de dire qu’elle se démocratise tout en se banalisant. Dans la guerre asymétrique, l’un des principaux enjeux est précisément la capacité de déterminer qui, des protagonistes en présence, imposera « sa » règle du jeu. La capacité de calcul à prix et surface constants double tous les dix-huit mois…Appliqué à la guerre, ce constat signifie que les barrières d’entrée à des capacités réservées naguère à des pays puissants s’abaissent au rythme exponentiel de la loi de Moore. C’est dans leurs effets de seuil que s’opposent ces deux lois. Celle d’Augustine rend inabordable toute une catégorie d’armements, celle de Moore en démocratise l’accès. Les Saoudiens ont assez d’argent pour acheter à prix d’or des avions de combat, pendant que les Houthis investissent dans les drones tueurs et les missiles balistiques aimablement fournis par l’Iran. Plus que les contraintes financières ou les barrières technologiques, c’est l’aptitude mentale et organisationnelle à l’innovation qui sera cruciale. La lutte pour la prééminence que se livrent désormais la Chine et les États-Unis impose aux superpuissances des logiques quantitatives et qualitatives de dépenses différentes de celles qui s’appliquent aux autres catégories d’acteurs…Les pays qui luttent contre leur déclassement stratégique, comme la Russie, la France ou le Royaume Uni, ou ceux qui tentent de monter dans la hiérarchie des puissances, comme l’Inde, se voient à leur tour amenés à s’engager dans ce nouveau type de course aux armements, rang oblige. La banalisation de la guerre risque d’être tout sauf ordinaire dans ses conséquences. Elle se manifeste de la façon la plus courante à travers les opérations conduites dans la cyber-sphère. Précisément parce que la cyberguerre, c’est tous les jours et tout le monde, les risques de dérapage sont extrêmement élevés, car une fois lâchés dans les réseaux, les virus informatiques sont aussi difficiles à maîtriser que leurs cousins biologiques échappés dans la nature…La généralisation des cyber-opérations multiplie les risques de dérapage pouvant provoquer la montée aux extrêmes. En élargissant le spectre de la conflictualité, la cyber-sphère contribue à l’accroissement du danger de guerre, y compris au niveau le plus extrême de violence. L’avènement à grande échelle des systèmes autonomes, et notamment des armes robotiques destinées à tuer sans ordre humain, pose une foule de problèmes éthiques et juridiques…Le résultat de ces évolutions, ce sont plus d’acteurs, petits et grands, capables et désireux de recourir à la force sur des théâtres d’opérations plus nombreux. Les « zones grises » de la conflictualité virent plus volontiers que naguère au noir. Si l’espace risque désormais de contribuer à alimenter le risque de guerre plutôt qu’à stabiliser la situation stratégique, c’est d’abord parce que le phénomène de démocratisation et de banalisation des moyens s’y accélère, alors que la montée de la superpuissance chinoise change la donne spatiale héritée de la guerre froide. Comme la neutralisation de satellites peut être sélective et que l’identification de sa cause peut poser problème, il est possible que l’espace extraterrestre soit le champ de bataille initial de toute crise majeure entre Pékin et Washington, notamment autour du sort de Taïwan. Ceux qui craignent une nouvelle guerre froide entre la Chine et les États-Unis ont tort ; dans les circonstances énumérées plus haut (armes hypervéloces, multiplication rapide du stock d’armes nucléaires de la Chine…), le risque est qu’elle ne soit ni froide ni limitée à des moyens dits « conventionnels ».

Chapitre IV UN MONDE SANS LOI, OU LE PIEGE DE KINDLEBERGER

A l’échelle régionale depuis 2013 en Syrie, la puissance dominante cesse d’exercer son hégémonie, mais sans que se présente pour l’heure une puissance montante susceptible de la remplacer…Par défaut, d’autres s’y précipitent, telles la Russie ou la Turquie, mais dont aucune n’a la capacité d’y établir une forme d’ordre à l’échelle de la région. Aujourd’hui, le système onusien est marginalisé par la conjonction d’une Russie disposant d’un pouvoir de perturbation mais non de proposition, d’une Amérique affaiblie concentrée sur ses problèmes intérieurs, de démocraties désunies, et d’une Chine devenue superpuissance qui n’a pas encore défini son rôle mondial, le tout sur toile de fond de puissances émergentes ou intermédiaires usant de leurs marges d’autonomie accrues. La Chine est une « force qui va », qui n’a visiblement pas de contribution multilatérale à faire, dépassant la défense étroite de ses intérêts idéologiques et matériels. L’incertitude et l’instabilité ne sont pas les meilleures compagnes de la paix. Cela vaut a fortiori quand il n’existe pas par ailleurs ni accord ni stabilité quant aux règles du jeu international censées régir le système international. Un ordre international ne peut pas se fonder sur ce qui revient à établir une société protectrice des dictateurs et des kleptocrates. Pour le moment, le Chine paraît moins intéressée par la transformation du système international que par son instrumentalisation. C’est une longue période de désordre qui se profile davantage qu’une tentative d’organisation du système international, donc Kindleberger plutôt que Thucydide. Ainsi, dans les prochaines décennies, le changement climatique alimentera la conflictualité à tous les niveaux, dès aujourd’hui en attisant les luttes urbaines et rurales ou en accroissant les flux de réfugiés, et par la suite entre les États, quand ils estimeront ne pas pouvoir obtenir une modération des politiques climatiques des autres pays par des voies pacifiques.

Chapitre V L’EUROPE DÉBOUSSOLÉE

Il y a donc urgence à comprendre comment nous en sommes arrivés là, sinon il y a fort à craindre que d’autres crises, notamment climatiques et guerrières, ne conduisent à d’autres désastres. Se lamenter sur ce déclassement ne saurait tenir lieu de politique. Une Europe herbivore dans un monde de carnassiers…D’une part, une Europe secouée sinon affaiblie, visiblement incapable d’agir à propos dans l’urgence, aura plus de mal à défendre ses intérêts et ses valeurs dans un monde où la prédation s’est durcie, et cela d’autant moins qu’elle n’inspire pas confiance…D’autre part, que penser de la capacité de l’Europe d’agir collectivement dans des guerres dont les adversaires sont des nations ou des groupes non étatiques, au vu du manque d’efficacité et de pertinence dans la guerre contre le virus ? L’Europe subit plus qu’elle ne peut maîtriser ces forces que sont la montée éruptive de la Chine, la réorientation américaine et le révisionnisme d’une Russie dont l’affaiblissement exacerbe plus qu’elle ne modère les instincts. Face à des antagonismes agiles, les Européens doivent pouvoir faire preuve d’une agilité au moins équivalente, dans le temps le plus court possible sur l’espace le plus vaste possible. (Brexit) Tout cela se calmera peut-être, mais en attendant, le Brexit affaiblit l’ensemble des protagonistes au plan stratégique. L’Europe, face à une Russie révisionniste, une Amérique occupée ailleurs, et une Chine menaçante, n’avait pas besoin de cela.

AND THE WINNER IS… ?

Avant même la pandémie, la prédation et la loi de la jungle progressaient partout, fût-ce à un rythme inégal. Avec la pandémie, non seulement toutes ces tendances se sont aggravées, notamment à travers l’extraordinaire coup de frein économique de 2020, mais encore le monde est passé d’un jeu à somme nulle à une ligne de résultat négative…Loin d’unir les efforts face au péril commun à travers un sursaut multilatéral pendant la crise sanitaire, le monde a assisté davantage à un chacun pour soi qui augure mal de notre capacité collective à affronter la menace existentielle que représente le changement climatique. Pendant ce temps, les moyens de la guerre ne cessent de se démocratiser, et ses domaines d’action de s’élargir. Entre la guerre cybernétique et informationnelle qui est quotidienne mais qui tue peu et l’apocalypse nucléaire toujours menaçante mais dont l’emploi reste fort heureusement encore virtuel, le spectre de la conflictualité ne connaît plus de césures aussi nettes entre ce qui relève de la non-guerre ou de la guerre. Dans un monde sans ordre, la tentation et la réalité du recours à la force sont de plus en plus prégnantes aux portes de l’Europe comme à l’épicentre économique et stratégique du monde que représente l’espace Indo-Pacifique, et cela à tous les niveaux, de l’action de groupes non étatiques au choc des superpuissances. Les guerres de toute nature seront désormais l’horizon incontournable de la vie de nos sociétés, et cela vaut aussi pour notre continent. Ce serait dommage de constater qu’à l’épreuve des faits, nous n’avons plus qu’un couteau sans lame auquel il manquerait une manche. Cette crainte explique l’accent que nous avons mis sur l’effort qui s’impose à nous face à la violence guerrière qui se lève.

Les orageuses de Marcia Burnier - Cambourakis (roman)

Coup de cœur de Priscilla, libraire à De Fil en Page: On dit pas vengeance, (…) c’est pas la même chose, là on se répare, on se rend justice parce que personne d’autre n’est disposé à le faire

C’est comme ça après pour celles qui ont dit non sans être entendues. C’est comme ça pour les victimes de viol, n’ayons pas peur de dire les mots.

ARRÊTE de trembler. voilà, comme ça. Respire on a dit. T’arrête surtout pas de respirer. Regarde pas la traînée sur ton pull, regarde-la pas, on s’en fout si ça partira au lavage, au pire tu le jetteras, tu l’aimais même pas ce pull.

Et puis après ça continue encore, la peur, l’angoisse, la honte, le sentiment d’y être pour quelque chose dans ce qui est arrivé… Sauf que là ces «sorcières, (ces) sœurs, ces vengeresses, pétroleuses, prêtresses, toutes un peu abimées mais qui ont réussi à se rafistoler comme elles pouvaient» ont décidé que la peur devait changer de camp. C’est par leur blessure qu’elles se reconnaissent les unes dans les autres et puisent ce qu’il faut de colère salvatrice pour essayer d’en sortir, coûte que coûte et parce qu’il n’y a pas d’autre choix.

Un premier roman saisissant et nécessaire, à mettre entre toutes les mains, pour une révolte aussi vitale qu’urgente.

Un texte publié dans la collection Sorcières.

Passagère du silence de Fabienne Verdier - Livre de Poche (roman)

Émetteur du florilège : François C.

Passagère du silenceIl manquait à mes camarades l’intelligence du cœur, cette curiosité passionnée qui pousse l’être jeune à découvrir la face cachée du monde, l’ivresse et la poésie du jour.

Je me suis mise en chemin -c’était une question de survie-, en quête d’une initiation véritable qui m’ouvrirait les portes d’une réalité autre.

Je me demandais si j’allais rester. La réalité ne coïncidait pas avec l’idée que je me faisais de ce pays et de ce que je venais y trouver. Et pendant des années, il en fut ainsi. Je ne sais pas ce qui m’a fait tenir, sans doute mes aventures cocasses et incroyables, la découverte d’une nature humaine inconnue et d’un monde inimaginable.

Il y avait, jadis, une culture des maisons de thé en Chine, dont celle-ci n’était qu’un vestige, comparable à celle des pubs en Angleterre, ou des cafés en France.

L’artiste, en Chine, possède un statut unique car l’art est supposé traduire la vérité d’un esprit, sans faux-semblant.

Il n’existait pas de sauf-conduit pour l’impunité. Toute faiblesse, tout accès de sincérité risquaient de vous mettre au rang des ennemis du peuple. Rien, alors, ne vous était épargné et vous étiez éliminé.

Les étudiants comme les professeurs étaient trop attachants pour que je ne souhaite pas partager leur vie, une vie où l’histoire donne à l’existence les dimensions de la tragédie. J’avais l’impression de n’avoir connu dans mon pays que des faits divers. Il avait fallu que je vienne en Chine pour comprendre ce qu’est une tragédie. Ce qui me séparait finalement des Chinois n’était rien d’autre que le fait qu’ils avaient traversé une telle expérience historique.

Il était extraordinaire de voir ces jeunes s’inspirer entièrement d’une culture étrangère. Mais qu’avaient-ils eu le droit de conserver de la leur ? On leur avait refusé cet héritage sous le prétexte qu’il n’était qu’un ramassis de vieilleries.

Je devais aussi m’imprégner de la pensée chinoise, devenir un peu chinoise par l’esprit, par toute ma façon d’être et même de vivre.

Grâce à lui, j’ai découvert la présence d’une vie culturelle clandestine et, en dépit des interdits, j’ai rencontré ces êtres pleins d’audace, derniers détenteurs de la tradition esthétique. Il passait ses nuits à copier et recopier des estampes de textes anciens à la recherche d’un style personnel.

Ce n’est qu’au début des années quatre-vingt que l’art des lettrés, ce regard particulier sur le monde, fut peu à peu remis à l’honneur, qu’on se remit à publier des livres classiques et des études anciennes ou nouvelles. Il est impossible de comprendre la peinture chinoise sans connaître la culture chinoise. Mais est-ce tellement étonnant ?

Le paradoxe le plus fou de ces régimes totalitaires c’est qu’ils annihilent chez les plus faibles, l’individu, sa personnalité, sa liberté. Chez d’autres, au contraire, comme ce maître des sceaux, qui n’eut d’autre choix que de subir les affres de l’histoire, ils créent ou déclenchent une énergie intérieure violente, une puissance de survie nouvelle. Ils nous livrent alors un savoir poignant et bouleversant de vérité. Ils se sont construits seuls, dans l’interdit, et n’auraient sans doute jamais atteint cette qualité d’»Etre vrai » dans une vie normale. Ces hommes m’offraient le fruit de leur bataille intérieure : la renaissance et la sauvegarde de leur art. Comment ne pas les suivre ? Dans ses décors à la Zola, la Chine fut pour moi un accélérateur de progrès et de connaissance extraordinaire.

(Paroles de maître Huang) « Tu dois arriver à percevoir que, dans le monochrome, dans les variations infinies de l’encre de Chine, tu peux interpréter les mille et une lumières de l’univers. »

« La peinture chinoise est une peinture de l’esprit ; elle ne vise qu’à transmettre l’esprit des choses à partir des formes, qui ne sont qu’un moyen. »

« Il faut trouver le juste milieu pour saisir la vie. Tout est dans la juste mesure des oppositions. En Occident, vous aimez les extrêmes ; pour vous, le juste milieu est synonyme de fadeur. Pour nous Chinois, le juste milieu c’est épouser la vie, la paix. L’harmonie de la nature est basée sur le juste milieu. »

« Le peintre, au cours de son existence, se construit une banque de données psychiques à partir de sa connivence avec le monde. C’est ce qu’il restitue dans son trait. Un jour, de cette banque de données naîtra naturellement, en un geste spontané, un acte créatif. »

« Le beau, en peinture chinoise, c’est le trait animé par la vie, quand il atteint le sublime du naturel. »

On n’imagine pas l’inhumanité, l’hystérie, l’indifférence qu’engendre la surpopulation. Le corps n’a plus d’individualité, la multitude vous dépasse ; on devient un numéro.

« Laisse-moi vivre ma vie comme je l’entends, lui ai-je répondu. Je ne peux repartir avec toi. Je suis comme la chrysalide occupée à construire le joli papillon que je serai peut-être un jour. » Comment lui faire comprendre la mutation intérieure que j’expérimentais à ce moment-là ?

J’étais aux anges devant ces paysages magiques, ces étendues d’infini ; ils me faisaient mieux comprendre à quel point le ciel régit l’ordonnance du monde, comme me l’avait enseigné mon vieux maître…Là-haut, j’étais heureuse. La beauté des montagnes, les nuages si proches de la terre dont les ombres dansaient dans les champs, parmi les troupeaux de yaks, dilataient mon cœur d’allégresse.

Pour les Tibétains comme pour les tribus africaines, les vieux philosophes du Moyen Âge ou les grands maîtres calligraphes zen, le cercle est le point central : vide nourricier, plénitude première, lieu de naissance de tout ce qui est. Cette sorte de « cosmogramme » représentait l’expérience du sacré, la diversité du monde dans l’unité.

Pour les paysans, le vieil arbre symbolisait la fertilité et la longévité : ses racines, plongeant dans les rivières souterraines, assuraient la liaison avec l’eau qui arrose les champs, nourrit les plantes et donne la vie. Il rassurait les paysans car sa vigueur était de bon augure pour les cultures : il était le protecteur du village.

Un soir, j’ai rencontré dans une ville sordide un Yi complètement saoul qui m’a lancé avec violence : « Rentrez chez vous et racontez ce qui nous arrive, ce qui se passe ici. Il n’y a plus de culture yi, on n’a plus le droit de parler yi, on ne peut plus penser yi. On n’a plus le droit d’être yi. »

« Toute sa vie, Su Dongpo s’est cru obligé de demeurer un dignitaire de l’Etat. Que reste-t-il de son action ? Une digue inutile sur un lac, à Hangzhou. En revanche, par ses essais, ses poèmes, il a laissé une trace durable. Il nous a rappelé un art de vivre empreint de sagesse qui enseigne à mieux supporter les vicissitudes. Que demander de plus ? »

En tant que peintre, je pense que je ne perçois pas les choses comme un sinologue ou un intellectuel. Contempler un brin d’herbe peint par différents maîtres m’enseigne beaucoup. Je suis comme l’abeille laborieuse qui cherche un bon miel pour nourrir son esprit ; et chaque fleur est une expérience unique, l’approche d’essences ou de parfums subtils.

« L’esprit possède des possibilités d’excursion infinies ; tu dois t’en servir pour voyager. Il établit des connexions tout seul ; il est de même nature que le nuage qui passe ; le stable n’existe pas pour lui. Suis ses variations sans fin. Il faut accepter nos pensées diverses, même contradictoires. »

Depuis lors, j’explore le chaos. Pour certains tableaux, je garde le geste qui décrit un rond, car tout naît du cercle et, dans ce chaos d’encre que j’efface et recrée, dans ce tourbillon, ce maelström, soudain, mystérieusement, la forme s’inscrit et l’objet de mon intuition naît de lui-même. Je reste alors émerveillée comme devant un phénomène de magie.

Pendant notre périple, nous avons vécu comme des clochards célestes et de cette façon de vivre j’ai conservé au moins un héritage : je peux me contenter pendant des mois de pousses de bambou et de soupe au riz !

Certains Chinois vouent un véritable culte à ce monde passionnant des insectes ; monde vivant et amusant offert par la nature, créatures complexes et admirables de la mécanique céleste en action jusque dans ces phénomènes en miniature.

Tiraillée entre confucianisme et taoïsme, la culture chinoise tire sa richesse non d’une synthèse de ces deux courants de pensée, mais des milliers de synthèses possibles que chaque individu peut composer à son gré.

« La calligraphie ressemble à une rivière, me dit-il ; ce n’est pas en un jour que celle-ci devient un fleuve puissant ; mais à force de couler, elle finit par creuser son chemin à travers les pierres et, quand elle est devenue un cours d’eau majestueux, rien ne saurait lui faire obstacle. »

Je marchais dans une atmosphère surréaliste parmi les pierres dressées, inclinées, couchées, évoquant la course des nuages, les éclairs de la foudre, les éclaboussures de l’eau jaillissante, l’empreinte du pied d’un bouddha, la tête d’un tigre rugissant, un dragon endormi au bord de l’eau ou des grottes d’immortels. Il se dégageait de ce lieu une harmonie sereine, un jeu de cache-cache entre minéral, végétal, terre, ciel et eau.

Dans cette Chine nouvelle de brutes corrompues, de cadres du Parti vénaux, d’analphabètes vaniteux, comment ces vieux lettrés, ces rescapés du raz de marée parvenaient-ils à survivre ? Ils avaient été à deux doigts de sombrer dans la folie, usés par une agression quotidienne absurde, souvent incompris de leurs proches, regardés avec honte par leurs propres enfants, critiqués avec acharnement pendant des années ; leurs biens, rouleaux anciens, bibliothèques savantes, brûlés ; eux-mêmes battus et torturés, et pourquoi ? Parce qu’ils peignaient ? Parce qu’ils étaient poètes ? Parce qu’ils osaient parler de l’insaisissable et, par la voie des arts, se libérer des entraves ?

Le vieux Lan m’ouvrait ainsi de nouvelles portes, de nouvelles connexions, de nouveaux voyages que je portais en moi sans jamais les faire vivre.

Pékin, outre les pigeons musiciens, était aussi, pour moi, le paradis des cerfs-volants qu’enfants et adultes faisaient voler sur la place Tianan men, témoin de tant de tragédies. Papillons, phénix, dragons aux yeux globuleux, scolopendres de plus de dix mètres de long et autres animaux fantastiques y dansaient dans les airs au gré du vent et adressaient un pied de nez au portrait de Mao encore accroché au-dessus de l’entrée de la Cité interdite.

Elle devait pédaler deux heures pour venir travailler et autant le soir pour rentrer chez elle. Elle habitait un quartier destiné à être rasé et devrait plus tard parcourir un trajet plus long encore. Hors de la ville, les laissés-pour-compte ! « Imagine-toi ! me disait-elle, on va nous loger dans une tour ; aucune vie de quartier, pas de marché ! Nous serons sans repères, isolés, déracinés. Et puis, avec les pannes d’électricité, les ascenseurs ne marchent jamais. »

La Chine se modernisait à grande vitesse : les pauvres s’appauvrissaient, les riches s’enrichissaient ou, comme me disait un Chinois, « L’Europe occidentale se socialise et la Chine se capitalise ».

Il faut oser transformer ! C’est dans la transformation incessante que nous trouvons de nouveaux langages et, de plus, je pense sincèrement que c’est aussi grâce à elle que nous vivons profondément notre nature d’»être au monde ».

La qualité d’une œuvre ne tient pas au talent inné de son créateur, même s’il est nécessaire au départ, ce qui n’est pas sûr. La différence réside dans la persévérance, la volonté acharnée de poursuivre. Certains, satisfaits, s’arrêtent en route ; d’autres continuent à chercher jusqu’à ce qu’ils trouvent…J’ai compris en arrivant en Chine que mon séjour n’aurait de sens que si je me pliais à un apprentissage rigoureux…Très vite, je me suis rendu compte en maîtrisant la technique que, pour aller plus loin, je devais m’initier à leur philosophie.

Pour moi, l’acte de peindre porte en gestation toutes les modernités possibles. Accueillir sur le pas de sa porte la beauté du monde, libre et sans entrave, l’insouciance d’un instant…

Réaliste: soyons logiques autant qu'écologiques de Bertrand Piccard - Stock (Actualités)

Émetteur du florilège : François C.

Réaliste : soyons logiques autant qu'écologiquesL’origine

Avec l’héritage scientifique de ma famille et mes deux tours du monde, en ballon sans escale, puis en avion solaire sans carburant, on risque de me cataloguer en adepte inconditionnel de la technologie comme solution à tous les problèmes de l’Humanité. Pourtant, j’ai baigné toute mon enfance dans les balbutiements de l’écologie et cela m’a autant influencé que les histoires familiales de stratosphère et d’abysses qui peuplèrent mes rêves de jeunesse. J’ai eu suffisamment l’occasion de parler de la façon dont ces récits m’ont inspiré pour devenir explorateur, mais je n’ai jamais raconté les autres influences qui expliquent mon engagement pour la protection de l’environnement. Mon engagement, mais aussi ma volonté de tracer la voie d’un possible modèle écologique différent.

L’esprit pionnier

Je me souviens des quelques années passées avec ma famille en Floride, près de Cap Canaveral, à deux pas du Kennedy Space Center, où mon père préparait son Mésoscaphe pour explorer le Gulf Stream. Grâce à lui, j’ai été invité à six décollages de fusée, d’Apollo 7 à Apollo 12, et aux événements de la NASA. Quand je me retrouvais face à face avec les héros de mon enfance, dont j’avais lu les aventures dans mes livres d’école, j’avais l’impression qu’il n’y avait plus aucune limite entre le rêve et la réalité. Tout devait être possible.

La nature humaine

Au-delà de mon histoire familiale et des exemples d’écologie que j’ai eus devant les yeux, mes expériences d’explorateur et de médecin ont façonné mon action environnementale et fait de moi un être réaliste et pragmatique. J’adore bien sûr revenir de mes expéditions aériennes en racontant la beauté de ce que j’ai vu, en décrivant la magie de la Nature qui reflète le miracle de la vie sur notre planète bleue flottant dans le Cosmos. Tout le monde m’applaudit, mais cela ne sert à rien. A rien, s’entend, pour changer le monde, pour l’améliorer. La beauté ne dissuade pas l’être humain de commettre l’horreur et le miracle de la vie ne l’empêche pas de la détruire. Si les lois gouvernant le monde étaient celles de la morale, du respect et de la compassion, ce livre n’aurait pas lieu d’être, je ne chercherais pas de solutions puisqu’il n’y aurait pas de problèmes. Ce n’est malheureusement pas le cas.

Le monde du passé

Ces innovations technologiques et ces comportements rationnels ne sont-ils qu’anecdotiques ? Pourraient-ils se généraliser à l’échelle de la planète ? Cela suffirait-il pour nous tirer d’affaire ? Notre monde pollue-t-il parce que nous y vivons trop bien ou parce que nous utilisons des systèmes et des structures archaïques ? Pourrait-on les changer et serait-il économiquement possible de le faire ? Il est fondamental de poser le problème ainsi, de voir la réalité en face, d’identifier les axes sur lesquels nous pouvons agir, avant de se lancer dans la bataille. Car, pour gagner, nous devons créer un large consensus.

Quelle décroissance ?

Si l’on peut économiser de l’énergie à grande échelle, réduire magistralement le gaspillage de matières premières et la production de déchets, tout cela de manière financièrement rentable, prôner la décroissance est-il encore nécessaire ? Philosophiquement, oui, cela se comprend. Instiller de la sobriété dans un monde qui succombe à ses excès a beaucoup de sens. Devenir moins matérialiste et remettre l’humain au premier plan, aussi. J’y serais favorable si je l’envisageais comme possible. Mais que fait-on une fois qu’on l’a dit ? Car l’humain, c’est aussi un salarié en quête de travail, de loisir, de confort. Alors est-ce vraiment souhaitable ? Est-ce même réaliste ?

La croissance qualitative

Si vous m’avez suivi jusqu’ici, vous aurez compris que je considère la croissance dite illimitée comme une aberration dangereuse et la décroissance comme une philosophie sans psychologie, en ce sens qu’elle ne tient pas compte de la nature humaine. Aucune des deux n’offre à mes yeux de voie réaliste pour éviter le désastre que nous sommes en train de préparer. Si aucune des deux voies ne répond à nos besoins, nous devons sortir de tout clivage conventionnel et trouver une troisième voie : celle que j’appelle la croissance qualitative.

La révolution énergétique

Nous venons de voir que la croissance qualitative s’appuie sur un modèle économique qui rentabilise l’efficience d’énergie et de ressources en misant sur la maturité des technologies propres. Il s’agit par conséquent d’une transformation profonde de notre fonctionnement, bien plus que d’une simple transition. Je n’hésite plus aujourd’hui à parler de révolution énergétique, tant les sources renouvelables, par l’incroyable bras de levier qu’elles représentent, permettent d’aller vite. Mais cela ne se fera pas sans intervention gouvernementale.

Sortir de la paralysie

Les pionniers apprécient les défis qui les obligent à quitter leur zone de confort. Ils recherchent même l’inconnu, qui ouvre des horizons différents, ainsi que les doutes et les points d’interrogation qui stimulent la créativité. Mais il en faudrait bien davantage dans tous les domaines de la société. Trop souvent, notre monde affectionne les stratégies qui renforcent la prédictibilité, la certitude, la stabilité, l’immédiateté. Au risque de stagner, de perdre des opportunités d’évoluer. Notre système s’est progressivement sclérosé, sur les plans politique, économique, financier, législatif, bureaucratique. Le paradoxe est que l’Europe ne s’est jamais aussi bien portée,en matière de sécurité, de santé et de qualité de vie, mais ce qui a assuré notre présent nous empêche maintenant de garantir notre avenir. A moins de reprendre notre destin en main et de changer un vieux narratif qui ne fonctionne plus.

Les 1 000 Solutions

C’est depuis le cockpit de Solar Impulse, au milieu de l’Atlantique, entre New York et l’Europe, que j’ai envoyé le communiqué de presse annonçant la création du Comité international pour les technologies propres, rebaptisé plus tard Alliance mondiale pour les technologies efficientes. Charles Lindbergh avait accompli son vol en 1927 pour ouvrir la voie au transport aérien long-courrier. Je voulais que le mien serve à la recherche et la promotion de solutions pour protégerl’environnement.

Un aperçu du futur

Parler autant de solutions sans donner d’exemples concrets n’a aucun sens, mais faire ici une liste à la Prévert n’en a pas non plus. L’inventaire complet se trouve sur le site de la Fondation et je vais me limiter à en présenter les grands principes par domaine. Je le ferai comme si ces solutions étaient déjà implémentées, pour bien montrer ce qu’elles apportent comme améliorations. Il s’agit donc ci-dessous d’une projection dans un futur non seulement souhaitable mais surtout possible, dont la réalisation ne dépend que de la vitesse à laquelle réagira l’humanité. Certaines sont géniales par leur technicité, d’autres enthousiasmantes par leur simplicité. Elles sont parfois si logiques, évidentes, qu’on se demande pourquoi personne n’y a pensé plus tôt. Et pourquoi on ne les utilise toujours pas à grande échelle. Les mailles de notre filet n’ont pas encore permis de labelliser toutes les solutions existantes et certains domaines sont mieux fournis que d’autres. Mais nous continuons notre travail de recherche.

Le capitalisme en question ?

Dans un monde idéal, les mécanismes du marché réguleraient harmonieusement la production et la consommation. On ne produirait que ce qui est nécessaire et on ne consommerait que ce qui est sain. Le court terme ne prendrait pas le pas sur le long terme, car on comprendrait que c’est dangereux. Les Etats n’auraient à jouer qu’un rôle d’observateurs. Ce monde a été imaginé et soutenu par les penseurs du libéralisme économique, mais il faut être naïf –ou malhonnête- pour prétendre qu’il existe. En même temps, quelle légitimité avons-nous pour critiquer les grands acteurs de notre monde réel, qui, somme toute, ne sont pas différents de nous, avec les mêmes imperfections, irrationalités et égoïsmes ?

Le rôle des Etats

Je ne veux pas que cette notion de croissance qualitative s’ajoute à la liste des bonnes intentions qui n’aboutissent à rien. D’autant qu’il ne s’agit pas d’une théorie mais d’une façon très concrète d’utiliser la chasse aux gaspillages et à l’inefficience pour stimuler l’augmentation des richesses globales. Bien entendu, une telle transformation sociétale ne se fera pas spontanément. Le rôle des Etats est fondamental pour définir les caps les plus ambitieux et faire respecter les objectifs. Seuls les gouvernements peuvent fixer des seuils incompressibles de durabilité, i.e. des niveaux en-dessous desquels techniquement, et même avec la meilleure volonté du monde, il serait impossible d’aller. Ces standards exigeants doivent être établis en fonction de ce que les technologies les plus modernes permettent d’atteindre.

Conclusion

Nous avons compris que la situation actuelle ne pouvait plus durer, pour garantir la qualité de vie non seulement des générations futures, mais de la nôtre. Nous avons vu d’où venaient les réticences et les obstacles qui ont freiné la protection de l’environnement jusqu’à aujourd’hui. Nous avons saisi que la décroissance, même si elle était philosophiquement souhaitable, n’était sans doute pas socialement ni psychologiquement acceptable. Par chance, il existe une alternative à la décroissance : la croissance qualitative. Cette dernière nécessite le passage d’une économie de gaspillage à une économie d’efficience. Ce serait utopique si les solutions n’existaient pas et si elles n’étaient pas rentables, autant pour l’industrie que pour le consommateur. Le travail de la Fondation Solar Impulse depuis quatre ans a montré que c’était possible. Plus de 1 200 solutions existent pour atteindre cette efficience, pour développer de nouvelles opportunités industrielles, pour protéger l’environnement tout en créant des emplois. Que manque-t-il alors pour que tous ces éléments s’enchaînent et aboutissent au résultat que nous espérons ? La modernisation du cadre légal, sans laquelle il ne se passera rien.

Le vrai état de la France de Agnès Verdier-Molinie - L'Observatoire

Émetteur du florilège : François C.

Le vrai état de la FranceLa France mérite mieux que des mensonges, des approximations ou des artifices. D’où qu’ils viennent. Elle mérite la vérité sur le décrochage qui nous guette. Et les solutions pour en sortir.

Partie I DÉCROCHAGE

23ème rang mondial en richesse par habitant, la France a décroché

Dit autrement, notre richesse nationale est gonflée à l’hélium de la dépense publique et de la dette. C’est ce qu’on retrouve en 2021 où un tiers des six points de croissance de la richesse nationale vient de la hausse de la dépense de fonctionnement de nos administrations publiques.

Sept milliards d’heures travaillées en moins

En France, on travaille 630 heures par an par habitant. Selon l’OCDE, qui publie ce classement, la France est le pays où cette quantité de travail par habitant est la plus faible. L’Espagne est à 697 heures par habitant, l’Allemagne à 722 heures, le Royaume-Uni à 808, les Etats-Unis à 826, la Suisse à 943.

Deux millions d’emplois en moins dans l’industrie

Le secteur industriel français comptait 5,5 millions d’emplois salariés en 1980, il n’en comptait plus que 3,1 millions en 2021…soit une diminution de plus de deux millions.

Il est préoccupant de constater que l’accélération récente de cette désindustrialisation n’est pas partagée avec les autres pays d’Europe, qu’elle est le fait de notre perte de compétitivité liée au coût du travail et à la cascade fiscale qui pèse sur nos entreprises.

82 milliards de déficit commercial

Allemagne pour 2020 : + 183 milliards d’euros (balance commerciale) ; France : - 82 milliards.

D’après l’Insee, de 1970 à 2016, la part de la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière a baissé dans la richesse nationale de 22,3 à 10,2%. En comparaison, la part de l’industrie manufacturière dans le PIB en Allemagne monte à 20,6%, soit deux fois plus qu’en France. L’Italie et l’Espagne ont aussi une industrie manufacturière plus importante qu’en France avec respectivement 14,6% et 12,8% de la valeur ajoutée.

8ème rang en Europe pour les investissements étrangers

Sur les vingt dernières années, les investissements directs en provenance de l’étranger en France se sont établis en moyenne à 21 milliards d’euros par an. Près de 440 milliards d’euros d’investissements étrangers sont venus se localiser en France sur ces vingt ans. Sur ces mêmes vingt dernières années, les investissements français à l’étranger se sont élevés à 1075 milliards d’euros et donc à une cinquantaine de milliards d’euros par an, soit un solde net négatif de 30 milliards d’euros par an.

90% des nouvelles entreprises créées avec…un seul salarié

(enquête SINE, également effectuée par l’Insee) sur l’indicateur des emplois créés par génération de créations. Les cohortes de nouvelles entreprises produisent peu, voire pas d’emplois…Ce phénomène est accentué par les disparitions d’entreprises, le taux de pérennité sur trois ans étant de 72% puis 60% sur cinq ans, un phénomène logique compte tenu du risque associé à la création d’entreprise. Mais qui se renforce lorsque l’on constate que les nouvelles entreprises démarrent en moyenne avec un financement de moins de 8000 euros dans leur projet.

Partie II REPOUSSOIR

Deux millions et demi de Français partis…à l’étranger

Ils aiment la France mais ils l’ont quittée. Ils sont presque 200 000 en Suisse, 130 000 en Belgique, 140 000 au Royaume-Uni inscrits au consulat…Ils sont partis de France pas toujours pour des raisons fiscales. Souvent aussi pour des raisons de liberté, de pouvoir d’achat, de rêves d’entreprise.

483 taxes, impôts et cotisations, 1126 milliards de prélèvements obligatoires

La France est championne du monde du nombre d’impôts, taxes, contributions et cotisations. En 2019, on en comptait 483 ! Soit 214 impôts, 159 taxes et 110 cotisations. Sur ces dernières, 37 cotisations et contributions employeurs, 38 cotisations et contributions salariales, 8 cotisations pour indépendants et inactifs, et 17 autres cotisations, majorations et pénalités (à la charge des ménages, des entreprises ou des deux). Une véritable litanie.

La France reste fin 2021 taxée de l’ordre de 140 milliards de plus que ses homologues de la zone euro.

25 milliards d’impôts en plus pour les ménages

La réalité, c’est qu’entre baisses de cotisations sociales, chômage et maladie (-24 milliards d’euros) et hausses des impôts directs des ménages (+ 25 milliards d’euros) on fait plutôt du sur-place jusqu’en 2019 en matière d’imposition des ménages, mais cela étonnera peu nos concitoyens. Encore un coup du bonneteau fiscalo-social français.

150 milliards d’impôts en plus pour nos entreprises

Que s’est-il donc passé entre 2012 et 2019 pour que tous les efforts pour améliorer la compétitivité de nos entreprises se traduisent par des résultats aussi faibles ? Eh bien, une partie des baisses liées au CICE et au pacte de responsabilité a été avalée par des hausses d’impôts sur la main d’œuvre, sur les outils de production et par des hausses de cotisations sociales.

Partie III SOUMISSION

2950 milliards de dette publique

Un chiffre énorme. En 2022, la dette de la France représente 44 000 euros par Français. En 2012, c’était 20 000 euros.

Notre dette va devenir notre croix. Cette dette n’est pas une dette d’investissement, mais une dette de fonctionnement. Entre 1995 et 2019, la dette a augmenté de 900 milliards pour que la France fonctionne, et de moins de 700 milliards d’euros pour qu’elle investisse. C’est l’inverse de ce qu’il faut faire. Si la France s’était endettée pour investir, elle n’aurait pas plus de dette aujourd’hui par rapport à notre richesse nationale que l’Allemagne.

Officiellement, on va vers les 3000 milliards d’euros de dette mais, officieusement, si on fait bien les comptes, et notamment si l’on ajoute tous les engagements « hors bilan » de l’Etat qui correspondent à des sommes qu’il s’est engagé à verser si certains événements se produisent, on est plutôt à presque 8 000 milliards d’euros de dette pour la France.

200 à 300 milliards de dette détenue par la Chine ?

La souveraineté financière de la France est en jeu….La question de la « soutenabilité » de la dette française mais aussi de la souveraineté de la France sont devant nous.

Bercy doit faire la lumière sur ceux qui, en achetant notre dette, détiennent de facto une partie de notre avenir. C’est une question de finances publiques mais aussi de souveraineté et de liberté géopolitique.

270% du PIB entre dette publique (114%) et dette privée (156%)

Depuis 2008, le taux d’endettement des entreprises françaises n’a pas cessé de progresser chez nous, passant de 117,5% à 143,2% du PIB. C’est près du triple du niveau observé chez nos vertueux voisins allemands (57,2%)…Et les conséquences à long terme de cet endettement supplémentaire contracté pendant la crise sanitaire interrogent. La capacité de nos entreprises à investir ou à embaucher dans les prochaines années risque d’être sérieusement compromise.

200 milliards de déficit, le plus lourd déficit historique

Le « quoi qu’il en coûte » dope la croissance de la France à la dépense publique. Tout cela financé à crédit par la dette.

Il y a fort à parier, du fait de la campagne pour les présidentielles, que le dérapage des dépenses publiques va continuer en 2022, continuant de gonfler artificiellement la croissance en la finançant par du déficit et de la dépense publique.

1454 milliards de dépenses publiques

Dont environ 558 milliards d’euros pour l’Etat en 2022 et environ 253 milliards pour les collectivités locales, auxquelles il faut ajouter 570 milliards de dépenses de la Sécu. Et encore, il manque les dépenses d’assurance chômage et les retraites complémentaires…

Partie IV BUREAUCRATIE

120 000 postes en moins ou en plus ?

A coups d’embauches, de revalorisations et de primes, les dépenses de personnel du secteur public auront dérivé de plus de 20 milliards en cinq ans, entre 2017 et 2022.

Il faut dire que, pour faire tourner la bureaucratie française, il faut des bureaucrates et même des bureaucrates d’exception. C’est l’énarchie française. Détricoteurs de l’ombre des réformes, ils empêchent la suppression du statut public, ils freinent des quatre fers sur les réductions de postes, ils refusent la décentralisation du système et contribuent à ajouter une louche de complexité chaque fois que sont annoncées des « simplifications ».

Oser parler de productivité et de coûts de gestion comme partout ailleurs en Europe. Pour nos agents publics, c’est pour quand ?

650 milliards d’euros de coûts de production de nos services publics

Nous payons pour produire nos services publics 84 milliards de trop par an. Un surcoût par rapport à la moyenne des pays européens lié à notre mauvaise organisation publique et à sa sous-productivité qui est considérable. Ces 84 milliards de plus ne nous permettent même pas d’avoir à notre disposition des services publics plus efficaces qu’en Allemagne.

Notre secteur administratif (non marchand) écrase notre secteur marchand et nos entreprises. La période que nous venons de vivre avec son « quoi qu’il en coûte » sans fin a contribué à augmenter le déséquilibre structurel de la France entre secteur marchand et non marchand dans la richesse nationale.

60 000 guichets publics

Qu’on parle de millefeuille, de mammouth, des douze travaux d’Hercule, l’administration française est incroyablement complexe. Il y a bien, déjà, beaucoup de formulaires en ligne, mais souvent il faut les télécharger, les imprimer, les remplir et…les envoyer par la poste !

2 millions de cartes Vitales surnuméraires ou 153 000 ?

Faut-il rappeler que la fraude sociale est évaluée à 20 milliards d’euros par an en comptant les cotisations et les prestations ?

On comprend qu’on est en bureaucratie quand on ne sait pas compter les cartes Vitales, qu’on a des lois que personne ne respecte, que l’on garde des guichets ouverts sans visiteurs…Kafka n’est pas loin.

Partie V INACTIVITÉ

11% d’économie grise

(Sondage Opinion Way : évaluation de l’économie informelle en France) En 2021, 24% des sondés admettent connaître dans leur entourage quelqu’un qui travaille de manière dissimulée ; 13% des Français déclarent avoir rémunéré un travailleur dissimulé pour au moins une activité en 2021 ; à 54% ils expliquent que c’est pour avoir un prix plus bas et à 31% pour éviter des impôts.

Avec notre système de protection sociale élevée, nous courons le risque de désinciter au travail déclaré.

8,1% de chômeurs ou plus de 13% ?

Si l’on additionne le chômage et le halo du chômage en France, on est à 13,5%. En Allemagne on est à 7,2% et aux Pays-Bas à 9%. Si on ajoute le sous-emploi, on est toujours à 17,9% en France, à 9,6% en Allemagne et à 12,4% aux Pays-Bas.

Effectivement, si l’on fait le compte entre les demandeurs d’emplois, les inactifs qui ne cherchent plus d’emploi et les personnes qui travaillent mais souhaiteraient travailler plus (sous-emploi), on englobe près de 6 millions de personnes (on triple donc le nombre de demandeurs d’emplois officiels).

1,7 actif pour financer un retraité

En 2018, la France comptait 17,2 millions de retraités…Cela fait en réalité des décennies que le ratio démographique du régime général, de loin le plus important régime français de retraite (83,4% des retraités) se dégrade d’année en année.

Seuls 35% des 60-64 ans travaillent contre plus de 40% en Europe

Depuis 1983 et la retraite à 60 ans au lieu de 65, nous ramons pour faire remonter l’âge de la retraite. Pendant ce temps-là, en Allemagne, le débat porte sur le report de l’âge de départ à la retraite à 68 ans pour éviter la baisse des pensions.

La France reste hors sol. Aidée par nombre de bonimenteurs qui font croire que le travail n’est pas la clé de la création de richesse.

25 jours d’absence en moyenne par an dans le public, 18,7 dans le privé

En réalité, les 35 heures n’ont jamais été réellement appliquées dans les collectivités. Les exécutifs avaient une dérogation pour conserver les régimes de temps de travail inférieur dont ils bénéficiaient depuis 1984. Ainsi, les agents publics locaux cumulent-ils près de 40 motifs de congé dérogatoires dont les jours du maire, des jours de congé pour déménagement ou encore des jours pour «rentrée scolaire ».

Deux fois plus de syndiqués dans le public que dans le privé

Nos syndicats sont donc peu transparents, peu représentatifs, très financés par nos deniers publics, mais aussi moins enclins à la négociation et beaucoup plus au blocage que dans les pays plus syndiqués. Les statistiques de jours de grève le montrent.

Partie VI PAUVRETÉ

Deux fois moins de milliardaires qu’en Allemagne

Se focaliser avec acharnement à regarder toujours le 0,1% (38 000 foyers), voire le 0,01% (3800 foyers) à la loupe pour les trouver trop riches est destructeur.

Le débat public doit gagner en lucidité. Couper la tête des riches ne fait pas baisser le nombre de pauvres. Au contraire.

7,1% de travailleurs pauvres en France contre 3,7% en Allemagne

Le modèle allemand est donc bien plus protecteur, car il permet aux foyers allemands d’avoir plus de travail, plus de ressources et moins de pauvreté…Alors que le modèle français, hyper-dépendant, dépensier en aides sociales et hyper-taxé, crée plus de pauvres, en créant moins de jobs et moins de richesse.

Un jeune sur vingt illettré et 100 000 jeunes sans diplôme ni formation

Il faut rappeler que le décrochage scolaire est une réalité en France : nombreux sont ceux qui abandonnent prématurément les bancs de l’école, sans qualification ni diplôme. En 2016, 140 000 jeunes Français sortaient de l’enseignement sans avoir obtenu ni un diplôme professionnel, ni le baccalauréat. Au final, c’est 620 000 jeunes de 18 à 24 ans sans diplôme du second cycle du secondaire qui restent durablement sans formation.

En 2020, les « NEETs », soit ces jeunes de 20 à 34 ans qui ne sont ni dans l’emploi, ni en formation, ni dans l’enseignement sont 10,7% en France. Beaucoup plus qu’en Allemagne qui compte 7,9% de « NEETs ».

Quatre fois plus de logements sociaux qu’en Allemagne, passeport pour créer des ghettos et plus de pauvreté

La France compte 17% de logements sociaux, soit deux fois la moyenne européenne (8,6%), nettement plus que l’Italie (5,3%) ou l’Allemagne (4,6%) et un peu moins que le Royaume-Uni et la Suède (18%).

90 communes franciliennes sur 1300 concentrent 66% du parc social…Une folie qui crée des ghettos, du communautarisme, de la pauvreté, de l’insécurité…Des zones où prolifèrent des trafics en tous genres.

300 000 sans domicile fixe, 27 000 sans-abris

Nous comptons selon la Fondation Abbé Pierre 300 000 personnes sans domicile fixe. Un chiffre qui a doublé depuis les 140 000 personnes du dernier rapport de l’Insee en 2012. Plus inquiétante encore est la montée du nombre de sans-abris, bien qu’il soit difficile à définir : ils seraient 27 000 de plus ?

32% de la richesse nationale ; championne du monde des dépenses sociales

La France est à la première place du podium en matière de dépenses publiques sociales.

En juin 2018, Emmanuel Macron parlait du « pognon de dingue » de la dépense sociale. Difficile de le contredire, car ces dépenses sont passées de 659 milliards d’euros en 2012 à plus de 800 milliards d’euros. Et pourtant, la pauvreté est toujours là.

Partie VII INSÉCURITÉ

880 homicides en 2019

Depuis 2016, les cambriolages de logements seraient en hausse de près de 10%, les coups et blessures volontaires de 31,2%, les escroqueries (entre 2012 et 2020) augmenteraient de 49% et les violences sexuelles exploseraient de + 104,5%.

Avec 3,8 millions de crimes et délits répertoriés par an, la France détient, avec la Belgique, le triste record de l’Union européenne : 723 crimes et délits pour 100 000 habitants, loin, très loin devant les Italiens (386), les Allemands (271), les Espagnols (234) ou les Danois (69).

113% de surpopulation carcérale

A cause notamment de ces programmes pénitentiaires qui n’avancent pas, 80 000 à 100 000 peines de prison resteraient en attente d’exécution chaque année.

Nombreux sont les condamnés à ne pas aller en prison, car toute peine d’emprisonnement de deux ans ou moins peut être commuée en assignation à résidence, port du bracelet électronique (ou anti-rapprochement) ou semi-liberté après examen du dossier par un juge d’application des peines (JAP).

122 839 OQTF, mais seulement 18 906 retours à la frontière!

Problème : dans les faits, les mesures de reconduite à la frontière sont bien loin d’être exécutées.

On estime à partir des fichiers des bénéficiaires de l’aide médicale d’Etat que les étrangers entrés en clandestinité en France pourraient avoir dépassé les 334 546 en 2019, soit + 115% depuis 2004.

28 000 mineurs non accompagnés

En 2005, on comptait 2 500 mineurs isolés en France. Fin 2017, ils étaient 25 000 pour une dépense qui dépasse 1,4 milliard d’euros.

De plus en plus nombreux, ces mineurs deviennent des fauteurs de troubles, se tournant vers la délinquance dans beaucoup de centres urbains.

Cette absence d’état civil fiable est une véritable bombe à retardement. Selon la Direction de la coopération internationale, 237 millions d’enfants de moins de cinq ans dans le monde n’ont pas d’acte de naissance. Et près de 70% d’entre eux n’ont jamais été enregistrés à la naissance. Ils n’ont donc aucune trace légale dans leur propre pays d’origine.

8 000 fichés S

On compte 12 000 fichés S dont 8 000 pour terrorisme, 2 100 sont en prison pour des faits de terrorisme ou soupçons de radicalisation, 390 le sont pour faits de terrorisme en lien avec l’islam radical, 1329 individus détenus, prévenus ou condamnés pour des infractions de droit commun (ne portant pas atteinte à l’ordre public) mais susceptibles d’être radicalisés.

1,6 point de PIB seulement de dépenses de sécurité intérieure

En 2021, la dépense sociale explosait, à 32% de PIB, tandis que la dépense de  sécurité intérieure (y compris la justice et le pénitentiaire) stagnait autour de 1,63% du PIB.

Conclusion: Le déclassement de la France n’est pas une option

La France est sur un fil, elle hésite: elle peut basculer du côté des pays du Nord de l’Europe bien gérés ou des Pays du Sud. Pays encore riche ou pays plus pauvre? Les Français sont dans l’expectative. Les réformes ne se font pas. Le sentiment de paupérisation monte. Les débats se tendent. Avec sa débauche de dépenses publiques, la crise du Covid a accéléré l’effondrement de la France.

La France ne doit plus être ce tonneau des Danaïdes qui finance par les aides sociales (et donc la dette) la consommation de produits importés plutôt que de travailler et de produire en France.

Reconstruire la France. Tout simplement car la France n’a pas droit au déclin.