Verbatim de DIRIGEANTS LE DEFI de L'ENGAGEMENT de Raphaelle LAUBIE et Philippe WATTIER - Ed. L'Archipel 2017

1.LES PARADOXES DANS L’ENGAGEMENT DU DIRIGEANT
Des racines et des ailes.
Le dirigeant a fait le choix de s’élever…Cela comporte des risques, il doit l’assumer. Tôt ou tard, il se retrouve confronté à son idéal et à des situations paradoxales inédites et parfois brutales…C’est par un travail sur soi, apprentissage permanent, et par la recherche de sa « juste place », que l’on peut surmonter ces paradoxes et en faire des leviers pour l’action.
L’insuffisante prise en compte des facteurs de santé.
Des charges de travail trop importantes sans périodes de repos sont contre-productives…Le respect de certaines règles d’hygiène de vie (alimentation, sommeil, activité physique…) est garant d’un niveau de performance durable…Une pratique sportive régulière permet de maintenir un bon état de santé global tant au niveau du tonus physique que du développement des capacités mentales…Des mesures de prévention limitent les problèmes de santé graves et récurrents.
Les déséquilibres des trois vies
Il est essentiel de ne pas vivre uniquement des vies professionnelle et familiale. D’autres activités (sports, associations, etc.) qui entraînent une socialisation vont créer des sas de décompression…Ces interactions entre vie professionnelle et vie personnelle sont le lieu de très nombreux paradoxes. Avoir un complice indépendant des sphères professionnelle et personnelle pour partager ses questionnements sera d’une grande utilité, notamment pendant une période délicate.
Les dissonances cognitives.
Dans l’exercice de ses fonctions, le dirigeant peut être amené à vivre des situations très inconfortables, lorsque ses pensées et schémas mentaux ne se trouvent plus en harmonie avec sa propre perception de l’environnement externe. On parle alors de dissonance cognitive.
Tout dirigeant peut être confronté à ce type de situation à un moment ou à un autre de sa vie professionnelle…Le « dysconfort » vécu alors par le dirigeant l’amène à modifier son mode de fonctionnement, et parfois à prendre des décisions irrationnelles, laissant collaborateurs et proches démunis et dans une incompréhension totale.
Les erreurs de casting et les fausses routes.
Une mobilité géographique mobilise toutes les ressources du dirigeant…Imprégné de la culture de son entreprise, le dirigeant croit connaître les codes en arrivant dans un nouveau pays et peut faire preuve d’analyses ou de comportements inadaptés. En effet, les cultures locales prédominent encore sur les cultures d’entreprise, aussi fortes soient-elles…Le dirigeant n’est souvent pas préparé à ce paradoxe qui peut l’amener à remettre totalement en question sa performance professionnelle passée, et à perdre totalement confiance en lui…Une mobilité géographique est donc un véritable projet qui doit être préparé au sein de l’entreprise et en famille, afin que le dirigeant se sente soutenu et accompagné dans une expérience qui, si elle est riche d’enseignements, peut se révéler complexe.
2.FEMMES ET LEADERSHIP
Evolution des codes sociétaux et irritants.
Aujourd’hui, les femmes ont les mêmes opportunités, libertés et prérogatives que les hommes. Pas plus, mais les mêmes…Elles ne pourront tirer parti de ces opportunités qu’à condition de définir quel équilibre elles visent en termes de contrainte et de reconnaissance professionnelles, de vie personnelle, familiale, et seulement si elles assument pleinement ces choix.
Les femmes font face à un dilemme culpabilisant qui est présent très tôt…En effet, il est courant pour les femmes de devoir composer avec des injonctions contradictoires –réussir leurs études, puis gérer leur carrière, être une bonne mère de famille en restant présente pour ses enfants –sous peine de perdre leur indépendance en cas de problèmes conjugaux ultérieurs. Il est assez justifié d’avancer que les hommes y sont moins exposés.
Les femmes doivent apprendre à reconnaître et lever leurs « facteurs irritants », les freins à leur développement professionnel et personnel.
La levée de ces obstacles et la création d’un environnement de travail bienveillant et accueillant sont bénéfiques aux femmes, mais aussi aux hommes qui souhaitent se détacher des parcours « masculins classiques ».
Vertus et bonnes pratiques.
Il existe autant d’approches, de démarches et de plans d’action concernant les femmes et leur place en entreprise que de situations. Chaque entreprise doit s’investir dans ce challenge en intégrant sa culture, les problématiques et les moyens qui lui sont propres. Les solutions toutes prêtes à « reproduire » n’existent pas.
Il est nécessaire de s’engager dans une première étape de diagnostic afin d’identifier les points forts et faibles de l’entreprise, mais aussi les freins perçus par les femmes. Cette première étape permet de mettre en place des objectifs, un plan d’action, et d’en préciser les modalités de suivi.
La démarche doit être appuyée par le top management, emporter l’adhésion du middle management et, une fois amorcée, doit être soutenue sur le long terme. Les études et les exemples pratiques montrent que tout relâchement des actions provoque inévitablement un retour en arrière.
Les défis pour demain
Les programmes en lien avec l’éducation des lycéens et lycéennes, par exemple, sont un moyen de traiter certaines problématiques avant l’entrée dans la vie active, et donc de diminuer la nécessité de certaines mesures de « rattrapage » une fois intégré le monde du travail.
Les entreprises peuvent aussi intervenir au niveau sociétal pour poser un regard sur la place et le rôle de la femme dans la société.
Les mesures en faveur de la promotion féminine ne doivent pas être prises au détriment des compétences, faute de quoi le risque de rejet est réel.
Le leadership est-il sexué ?
Les femmes sont perçues comme plus créatives, plus coopératives et à l’écoute, dans une démarche plutôt horizontale.
Les hommes sont perçus comme étant davantage animés d’un esprit de conquête, de compétition –les prises de décision s’effectuent selon une démarche plus verticale.
Les hommes et les femmes appréhendent différemment leurs émotions.
Pour autant, les femmes au pouvoir ne montrent pas de différences majeures dans l’exercice du leadership. Il est impossible de distinguer un leadership spécifiquement féminin.
Par ailleurs, les jeunes générations ont tendance à gommer les différences hommes/femmes.
3.ENGAGEMENT SOCIETAL : TEMOIGNAGES
RSE, vous avez dit RSE ?
La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) est encore méconnue dans les entreprises et relativement peu formalisée, particulièrement dans les petites structures.
Intégrée à la stratégie globale, la RSE est un véritable outil de pilotage de l’entreprise dans une logique de pérennisation et de développement responsable.
La RSE est un atout pour attirer les consommateurs, renforcer la marque employeur et fidéliser les salariés.
Pour mettre en œuvre une démarche RSE, il est recommandé d’être accompagné et de désigner un ou des référents en interne pour le déploiement en lien avec tous les services et directions de l’entreprise.
Valeurs : au-delà des mots
Les valeurs revêtent un usage interne vis-à-vis des salariés et des managers, au moment des recrutements et tout au long de la vie de l’entreprise.
Les valeurs doivent être définies dans un esprit de co-construction avec les parties prenantes de l’entreprise, notamment les salariés.
La simple définition des valeurs ne suffit pas. Elles doivent constituer le socle de pratiques managériales et organisationnelles cohérentes.
Les valeurs doivent être un support dans le cadre de la relation client afin d’assurer un service le plus qualitatif possible.
En tant que premiers ambassadeurs des valeurs de l’entreprise, les dirigeants doivent faire preuve d’exemplarité.
La gouvernance responsable ou l’entreprise étendue.
Recourir aux administrateurs indépendants revêt un intérêt pour se faire challenger et bénéficier du regard de personnes externes à l’entreprise.
Les clients et usagers sont une ressource précieuse qu’il ne faut pas hésiter à consulter dans le cadre du développement de nouveaux produits et services.
Le mode coopératif et la gouvernance incluant toutes les parties prenantes de l’entreprise sont un gage d’équilibre sociétal.
Il est recommandé d’impliquer ses fournisseurs dans la gouvernance de l’entreprise, dans un esprit de coconstruction pour un résultat gagnant-gagnant.
Engagement et responsabilité
La culture managériale doit avant tout reposer sur le fait de donner du sens aux collaborateurs.
Qu’on adopte ou pas le concept d’entreprise libérée, il est nécessaire de réfléchir et innover sur un plan managérial en donnant la possibilité aux salariés de s’investir et d’être force de proposition.
Pour que les salariés s’engagent, les entreprises doivent leur donner toutes les clés et transformer les idées en actions concrètes.
Transparence et pédagogie sont essentielles à une communication fluide entre les collaborateurs et la direction.
Focus : des projets dont ils sont fiers.
Impliquer les équipes, c’est à terme faire émerger dans l’entreprise des collaborateurs citoyens engagés…C’est souvent révéler à des salariés toutes leurs potentialités.
Les Fondations ne doivent être en aucun cas les « danseuses du patron ». Tournées vers l’externe, elles doivent permettre de fédérer et créer du lien en interne.
La diversité est un enjeu de taille dans les entreprises tant d’un point de vue humain qu’économique. La prise en compte de la diversité ne peut être que vertueuse.
4.DIGITAL ET INNOVATION OUVERTE<
Innovation ouverte et clients
A l’instar des pure players, les industries de biens de consommation courante, pour lesquelles l’innovation est une considération prioritaire, ont ouvert leurs process d’innovation à leurs cibles de clientèle, tout autant qu’à des start-ups ou des partenaires industriels.
La valeur attendue du client dans ce processus diffère selon les industries.
Cette ouverture de l’innovation au client représente un phénomène pérenne, auquel le digital et les nouvelles technologies ont donné une formidable puissance…Elle impose qu’une culture centrée sur le client anime l’ensemble de l’entreprise.
Start-ups et entreprises innovantes
Par ses nouvelles offres, les nouvelles manières de travailler qu’il occasionne et ses nouveaux outils, le 2.0 est une opportunité pour aller plus loin dans l’innovation collaborative ou innovation ouverte.
Nous assistons à une accélération des cycles, de même que s’accroît la facilité de mise en relation d’un nombre plus important d’intervenants. Ce qui ne semblait pas possible il y a encore quelque temps est, avec les nouvelles technologies, réalisable et praticable.
Le processus d’innovation ouverte, par nature, traverse les organisations. Ainsi, l’innovation doit venir de partout et un des challenges des organisations établies est de gérer ce changement de culture.
Comme pour les autres processus de l’entreprise, la digitalisation et les nouvelles technologies viennent challenger les principes établis de l’innovation ouverte (open source, crowdsourcing, crowdfunding,…).
Enfin, comme pour tout apprentissage, il est important d’avoir conscience du degré de maturité en innovation ouverte de son organisation pour identifier outils et partenaires.
Financiarisation de l’innovation
C’est à partir de 2008 que les groupes se sont orientés vers l’innovation ouverte.
Innover sous la pression des actionnaires impose de limiter les risques. Sur cet aspect aussi, l’innovation ouverte est intéressante, car elle constitue un moyen d’externaliser les risques inhérents à l’innovation en s’alliant notamment aux start-ups.
Pour les innovations périphériques et incrémentales, les grands groupes se sont naturellement tournés vers d’autres acteurs (universités, start-ups, centres de recherche,…) afin d’avoir accès à l’expertise de pointe en limitant l’investissement et le risque financier.
L’open source, aux frontières de l’innovation ouverte
Le modèle open source…est un processus d’innovation ouvert, souvent à une très large communauté, qui repose sur le partage de la valeur, voire sur la gratuité, notions qui sont éloignées des modes classiques de gestion de la propriété intellectuelle –quand elles ne s’y opposent pas.
Les freins à la diffusion de l’open source sont réels : remise en cause des modèles économiques existants, notamment en termes de valorisation de l’innovation et de contrôle de la valeur, coût élevé de transition du modèle classique au modèle open source, risque d’une extension trop forte d’offres sur mesure.
Le modèle open source, surtout présent aujourd’hui dans le secteur des softwares, a de fortes chances de s’étendre : d’une part, du fait de l’extension des technologies de l’information au sein de toute forme d’innovation, et ce quel que soit le secteur d’activité ; d’autre part, parce que les valeurs « idéologiques » portées par l’open source correspondent en partie aux nouvelles attentes sociétales de partage, d’engagement individuel et de quête de sens.
La diffusion de la culture open source dans l’entreprise imposera alors de bien maîtriser les enjeux technico-juridiques de ce type de modèle (plateforme, système de régulation) et de revoir les pratiques managériales de l’entreprise (capacité à gérer un écosystème externe complexe, à donner un sens collectif à l’action, à assurer un bon équilibre entre leadership et taylorisme managérial).
L’innovation ouverte : pari culturel et défi pour le leadership
Un certain nombre de facteurs culturels contribuent aux succès des entreprises les plus performantes en matière d’innovation ouverte : l’obsession du client, une bonne intelligence de l’écosystème et la capacité à partager une même vision à tous les niveaux de l’entreprise.
Leurs leaders ont une réelle aptitude à observer, à questionner, à associer des savoirs sans relation apparente. Ils expérimentent et encouragent l’essai chez leurs collaborateurs. Ils pensent et agissent en réseau. Ils font preuve d’agilité, d’audace, mais aussi d’humilité.
C’est la combinaison de ces compétences distinctives avec un fort engagement personnel, une attention aux équipes, une mission claire et partagée qui fonde le succès du pilotage des démarches d’innovation ouverte.
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Verbatim proposé par François C.